S. Ait Hamouda
Le 8 août 1994, tu es parti au royaume des révolutionnaires, les vrais, que rien n’intimide, ni ne leur fait peur, ni ne les désarçonne. Tu es parti comme les grands d’Algérie et de ta montagne de Kabylie, belle et rebelle. Tu as été un bon cavalier, comme les hordes berbères montant à nu des chevaux barbes, endurants et beaux. Tu allais par les sentiers, noueux, et tu n’obéissais qu’à ton cœur, qu’à ta conscience, qu’à ton crédo. Tu as fait de la prison comme un homme, en 1981, mais cette détention n’était pas faite pour te réduire, tu n’es pas de ceux-là de ceux que les geôles soumettent. Tu as été un héros, mais sans prétention démesurée, pas de ceux qui claironnent, sur tous les toits, à qui veut bien les entendre, leurs performances, leurs exploits, leurs prouesses. Tu accomplissais ton devoir avec la conviction rivée au tréfonds de toi-même, comme une tâche nécessaire. Il arrive parfois au fin fond de tes colères, parce qu’il t’arrivait de t’énerver, de remettre chacun à sa place après avoir transcendé tes ires. Qu’importe les colères irascibles, les emportements, pourvu que ce soit pour la bonne cause. Et maintenant que tu es parti, que reste-t-il aux démocrates à se raconter, à faire et défaire ? Pas grand-chose, sinon à ressasser le passé, le jour où tu étais des leurs et où tu guidais leurs pas. En tant que syndicaliste, à l’ENIEM, de militant à l’ORP et enfin du RCD dont tu étais membre fondateur. Tu étais là au moment où l’Algérie se penchait dangereusement à la fenêtre du néant, rasant les murs, mais sans peur et sans reproches. Armé de ton courage, de ta témérité, sachant que ceux qui voulaient t’assassiner savaient où te trouver. Toutefois, ta mort prématurée, d’un arrêt cardiaque, t’a arraché à celle du coutelas et t’a accueilli, à bras ouverts, dans la légende. C’est ainsi que tous tes amis (es) t’évoquent à Debza, et partout où tu étais passé, l’âme en alerte, jusqu’au Panthéon que tu as plus que mérité.
S. A. H.
