Le nouveau roman de Chabane Imache La mort du vieux chêne – les rêves brisés, paru en juillet dernier, relate une histoire imaginaire, bien sûr tirée de faits réels et d’anecdotes vraies ayant pour théâtre un des nombreux villages perchés au pied du Djurdjura. Un roman plein d’intrigues et de suspens, d’une lecture facile et aisée que même un étranger qui le lira comprendra facilement certaines scènes propres à la société kabyle. D’autre part, tous les mots, expressions du terroir et termes religieux, sont expliqués dans des notes de bas de page. Une famille kabyle type, composée du père Ahmed, un vieux retraité de France, la mère Taous, les deux garçons Akli et Saïd, les deux filles Dehbia et Malika ainsi que la bru Kahina, la femme d’Akli, vivait en parfaite harmonie jusqu’au jour où après la mort du père, Saïd, le plus jeune encore célibataire, commençait à dévier du «droit chemin». Licencié par son employeur pour absences répétées, il passait le plus clair de son temps dans les cybers et les bars. Alors qu’il venait de célébrer ses fiançailles avec Chabha, une fille du village, sur facebook, il fait la connaissance de Wahiba, une émigrée d’une cinquantaine d’années, originaire de Béjaïa, plusieurs fois mariée-divorcée. Elle lui fait miroiter le paradis s’il la rejoint à Paris et qu’il se marie avec elle. Ce sera elle qui causera sa perte. Dans le bar, il fait la connaissance d’un notaire véreux qui lui délivrera une fausse procuration moyennant déboursement de plusieurs millions, pour pouvoir disposer de la pension de sa mère ainsi que de la totalité de la somme laissée par son père dans un compte à la BNP en France, puis transférée sur un compte «devises» ouvert dans une autre banque à Tizi-Ouzou au nom de la veuve. Il met une croix sur Chabha et décide de rejoindre Wahiba en France coûte que coûte. Il essuie à deux reprises un refus pour sa demande de visa. Il a opté même pour la solution extrême qui consistait à payer chèrement des intermédiaires qui auraient des connaissances au niveau du Consulat, mais peine et argent perdus cette fois aussi, car il ne s’agissait en fait que de véritables escrocs qui l’ont arnaqué. Un soir, il rentre plus tard que d’habitude et saoul à tel point qu’il ne distinguait pas entre le jour et la nuit. Après une dispute avec son frère Akli, il part pour une destination inconnue. Il demeure injoignable. Cette dispute et ce départ houleux ont aggravé l’état de santé de la mère, déjà fragile. Cette dernière ainsi que son fils Akli, se sont rendus compte mais tardivement que le compte bancaire a été complètement vidé par Saïd grâce à la fausse procuration. Une plainte est déposée contre lui ainsi que contre le notaire indélicat et les deux faux témoins. Ces trois derniers furent arrêtés les jours suivants. Il séjourne quelque temps dans un complexe touristique à Tichy, puis, ayant appris qu’il était recherché, il s’est rendu à Annaba d’où il espérait tenter une traversée en compagnie d’autres harragas, pour atteindre les îles italiennes de la Sardaigne et de Lampedusa à partir desquelles il comptait rejoindre la terre ferme pour passer en France. Malheureusement, en haute mer, la frêle embarcation n’a pas résisté au vent fort et aux vagues géantes qui l’ont engloutie tel un fétu de paille. Les corps de Said et de ses malheureux compagnons furent repêchés quelques jours plus tard par les gardes côtes italiens, au large de la Sardaigne. Les fiançailles avec Chabha étant rompues de fait, cette dernière est demandée en mariage peu de temps après par Karim, un jeune astrophysicien qui travaille dans un observatoire d’astronomie à Montpellier. Elle le rejoint en France après la cérémonie, dans le cadre du regroupement familial. Comme un malheur n’arrive jamais seul, la vieille Taous n’a pas survécu longtemps à son fils. Ce drame a entrainé dans son sillage et précipité sa mort. Ils furent enterrés tous les deux dans le carré familial à côté du père Ahmed. Auteur d’un autre livre «Proverbes et dictons kabyles» en 2017, Chabane Imache a réédité, en 2012 chez les éditions L’Odyssée, «L’Algérie au carrefour», une brochure de son défunt père Amar Imache parue en 1937. Dans cette dernière, Chabane Imache a rassemblé, compilé et publié les brochures et quelques articles du journal «El Ouma», rédigés par son père qui était, pour rappel, l’un des fondateurs de l’Etoile nord-africiane (ENA).
Farida Elharani