Tamazight – Âme de l’Afrique du Nord, dans les librairies

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Après ses deux romans «Hold-up à la Casbah» et «Un butin de guerre», Tarik Djerroud vient de publier un Essai sur la question de l’amazighité intitulé «Tamazight, âme de l’Afrique du Nord». Constitué de 2 tomes, l’ouvrage est un voyage dans l’Histoire de la langue amazighe, ponctué d’interrogations sur les raisons du déclin puis de la renaissance de tamazight. L’Essai fait une approche scientifique des différents facteurs qui ont influé sur le destin de tamazight. Le peuple amazigh, occupant un territoire très vaste allant de Siwa (Égypte) aux îles Canaries, et de la méditerranée aux pays subsahariens, a participé à l’essor de la civilisation humaine. «Une fois un individu nourri d’une culture durant ses années d’enfance, il ne peut plus être attaché à une autre culture sous peine d’aliénation et de conditionnement artificiel, mais cela ne l’empêche cependant pas d’y être ouvert et de s’y intéresser», lit-on à travers les pages. Ce voyage dans l’Histoire a aussi pour ambition de jeter un regard serein dans le récit national. Chaque chapitre du livre en est un fragment. Trente chapitres alimentés d’une écriture ciselée, soulignent des faits saillants tels la proximité entre le punique et tamazight ; le voisinage entre tifinagh et le latin et l’instabilité politique comme facteur empêchant tamazight de se hisser au rang de langue officielle sur son propre territoire. L’arrivée des Arabes est une étape qui a lancé tamazight dans une sorte de rivalité avec la langue du texte coranique, c’est-à-dire l’arabe, laquelle est accompagnée du sceau de la sacralité dont le profit politique est cueilli comme un fruit mûr, du gouverneur de Damas Abdelamlek jusqu’au zaim du PPA, Messali Hadj. La force de cet ouvrage réside, en effet, dans le tacle donné par l’auteur à l’Histoire officielle. Il déconstruit une histoire rédigée avec des œillères, démonte une mécanique huilée par l’idéologie arabo-baathiste agrémentée d’un fanatisme morbide, met en relief la poussée contraire d’une conscience à la sauce amazighe amorcée depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Voir tamazight ignorée, traînée dans la boue nous choque et nous déçoit. Mais à l’indépendance du pays, tout va basculer, dans la difficulté il est vrai. Avec la chanson engagée, le mouvement sportif avec une JSK dont chaque victoire résonne comme un clairon identitaire, avril 80, ce sont les chaînes de la peur qui explosent et la parole se met à se libérer peu à peu. De la revendication populaire à l’exigence politique, tamazight a été pendant des décennies un enjeu majeur ayant secoué la société en profondeur. Pour Tarik Djerroud, tamazight et la laïcité constituent l’épicentre de la démocratie à l’algérienne : l’une et l’autre se condensent pour formuler des symboles d’altérité et de diversité. Évoquant les pages sombres de cette aventure linguistique et culturelle, avec le souci de l’exactitude et du ton libre qui le caractérise, l’auteur se fend en divers hommages aux chevaliers défenseurs de l’amazighité et annonce, tout de go, que le XXIe siècle verra la fin d’un Maghreb arabe omnipotent et fait le pari que la place la plus sûre pour tamazight est bel et bien le cœur des hommes et des femmes qui en utilisent les syllabes et la perpétuent au quotidien. «La question de l’amazighité reste un livre ouvert», peut-on lire en quatrième de couverture comme un clin d’œil : l’officialisation n’est pas suffisante, les défis à venir sont nombreux…

Bachir Djaider

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