Opération grandeur nature

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L’exercice grandeur nature de simulation d’un tremblement de terre avec rupture de la digue du barrage de Tilesdit se déroule de manière efficace, selon les différents intervenants qui ont pris part hier à un point de presse sur l’ex-base de vie de la société Todini.

Les autorités de wilaya, civiles et militaires, le directeur général de la Protection civile Mustapha Lahbiri étaient présents, ainsi qu’une délégation diplomatique de l’Union Européenne composée d’un attaché de la délégation européenne, d’Allemagne, d’Autriche, de Belgique, d’Espagne, de France, de Hongrie, d’Italie, de Pologne et du Portugal. Pour Mme Anne Simone, représentante de l’Union Européenne, les mécanismes développés sur le différents sites où se déroule l’exercice, ont prouvé que la coopération était excellente : «Dans le cadre de la coordination entre les États membres de l’Europe avec les pays partenaires, notamment l’Algérie ou la Tunisie, nous avons la possibilité de financer des exercices à hauteur d’un million d’euros pour aider les pays désirant participer à cet exercice à apprendre ou à développer leurs procédures afin de mieux se coordonner. Dans le cadre de cet exercice, nous ne finançons pas la capacité nationale de la Protection civile algérienne, mais nous cherchons à financer la coopération internationale lorsqu’un désastre dépasse les capacités nationales des pays. Ce que j’ai pu voir, ici, lors de l’organisation de cet exercice, démontre que la Protection Civile Algérienne est très organisée, connaissant très bien son terrain, connaissant les sites du désastre et pouvant imaginer et analyser tout ce qui pourrait arriver en cas de catastrophe. C’est là notre objectif, celui d’avoir une protection civile qui sache réagir nationalement et qui puisse faire appel à des partenaires européens pour venir renforcer leurs capacités lorsque le désastre dépasse ses capacités», déclara-t-elle.

Mustapha Lehbiri : «Notre force de frappe est importante»

Pour le directeur général de la Protection civile M. Mustapha Lehbiri, les éléments algériens sont très compétents : «Notre protection civile est organisée avec un effectif de 60.000 hommes et femmes très brillants. Nous avons une puissance de frappe assez importante. Toutefois, je souligne, s’il arrive une catastrophe qui nous dépasse, nous avons l’Armée qui nous soutient et qui a une solidité à toute épreuve. Je la remercie infiniment en cette occasion, car à chaque fois que nous avons fait appel à elle, l’armée s’est solidarisée avec nous. Je suis aussi ravi que l’Algérie partage l’expérience de cet exercice avec nos amis français qui font partie de l’Europe. Je tiens à souligner que l’Algérie n’a pas engagé un sou pour cet exercice, grâce au financement de l’Union Européenne. Notre Protection civile est aussi solide que celle de n’importe quel pays en Afrique ou même en Europe», se félicite M Lehbiri. Le DG de la Protection Civile, M. Lehbiri profitera de cette occasion pour souligner que les éléments de la Protection civile algérienne sont prêts à faire face à tous les sinistres. En plus de ses effectifs, elle dispose de 2000 volontaires formés et titulaires d’un diplôme de soigneur de premiers secours «Nous avons des volontaires réservistes sur lesquels nous pouvons compter au niveau de n’importe quelle wilaya. Ils peuvent être appelés pour n’importe quel sinistre. Ils sont organisés et entrainés pour intervenir en cas de plan ORSEC ».

Le réchauffement climatique, une menace qui pèse lourd

Jacques Witkowski, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises à l’administration centrale du ministère de l’Intérieur français, estime qu’il faut rester modeste face aux catastrophes naturelles qui peuvent s’abattre sur n’importe quel pays : «Il faut savoir qu’aucun pays ne peut répondre entièrement seul à une crise de toute ampleur. Cet exercice est l’occasion de se connaitre davantage en plus des liens bilatéraux que nous avons, parce qu’à ce niveau on apprend à se parler. J’ai tendance à dire à mes équipes que c’est un cauchemar pour le directeur général d’avoir un exercice qui a fonctionné. On en garde que des bons souvenirs et on reproduira donc toujours les mêmes erreurs. En Europe, on essaye de construire notre mécanisme pour fonctionner de manière plus intelligente et rapide. Il faut pouvoir se spécialiser et se porter assistance mutuellement pour pouvoir s’entraider car les crises n’ont pas de frontières. Aujourd’hui le réchauffement climatique est un sujet plus que jamais d’actualité. Le pourtour méditerranéen avec les feux de forêts n’est qu’un exemple, et la France, depuis plusieurs années, n’y échappe pas. Les limites des feux de forêts augmentent de 30 à 40 kms vers le nord chaque année. Bientôt certains pays non concernés par le réchauffement climatique le seront et c’est à cette situation que nous devons faire face. De nouvelles situations apparaissent, et il est important de faire des exercices ensemble, loin de nos bases respectives, afin d’essayer de se coordonner pour une meilleure efficacité. Que cela soit en traversant la Méditerranée pour s’intégrer dans un dispositif purement algérien ou l’inverse. Nous espérons aussi que la Protection civile algérienne puisse s’intégrer dans nos dispositifs parce qu’en toute logique, on peut avoir besoin de ses moyens. Des moyens qui réellement m’impressionnent favorablement avec des hommes bien entrainés extrêmement motivés et bien construits. D’ailleurs, je tiens à féliciter mon collègue le directeur général pour cette organisation, aussi bien pour le camp, que l’exercice en lui-même. C’est d’un très haut niveau et ce n’est pas galvaudé de le dire ». Pour sa part, le wali de Bouira, M. Limani Mustapha, révélera que cet exercice est une expérience internationale de très haute envergure et de très grande importance : «Les éléments de la Protection civile algériens et étrangers sont des professionnels qui viennent mettre leurs expériences à contribution. Les nations qui participent ont acquis une expérience extraordinaire, ils viennent la partager avec nous pour acquérir les automatismes de coordination entre les différents intervenants. Plusieurs pays qui ont participé, et l’aspect positif à retenir est qu’il y a eu une excellente entente et une parfaite complémentarité. Ceci n’est pas négligeable. Bravo à nos éléments de la protection civile et un grand merci à tous ceux qui sont venus participer avec nous dans cette manifestation internationale».

La communication est un élément clé dans la gestion des crises

En cas de rupture de moyens de communication et d’Internet pour permettre l’application du plan ORSEC, M Jacques Witkowski, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises à l’administration centrale du ministère de l’Intérieur français, dit que la situation a déjà été vécue par les sapeurs pompiers français qui ont pu dépasser cet écueil : «La communication est un élément clé, car les autorités du pays ont des consignes à faire passer. Des consignes du plan ORSEC qui doivent être appliquées sur le terrain pour diriger les manœuvres, et du pays vers l’extérieur pour exprimer ses besoins au niveau l’international. Le réseau de communication n’est pas une fiction, et en France, nous avons eu à gérer, il y a quelques mois, une succession de cyclones qui se sont abattus sur les Antilles. Sur place, nous avons constaté que l’ensemble du réseau de communication était out. Aussi bien en matière de téléphonie ou Internet, et nous sommes revenus à l’époque romaine où il fallait écrire sur un bout de papier, le remettre à quelqu’un pour le transmettre et cela a duré plusieurs jours. Une de nos priorités a été de reconstruire un réseau de communication fiable. Alors même que nous disposons partout au niveau des départements, d’un réseau satellitaire très déployé, ce dernier s’avère peu efficace par temps nuageux. La communication papier, dans ce cas, est la mieux adaptée, mais il faut pouvoir aussi, de manière assez rapide, faire appel à des associations pour recréer un réseau internet, comme Internet sans frontières, pour que les gens puissent retrouver une antenne et se connecter».

Manœuvres incessantes sur le terrain depuis lundi

En fin d’après-midi, la délégation étrangère s’est rendue à Bechloul, au niveau de la digue du barrage de Tilesdit, pour assister à des manœuvres de secourisme en milieu inondé. Au cours de la matinée, les éléments de la protection civile des différents pays étaient en manœuvre pour secourir d’éventuels survivants des décombres de bâtisses. Pour le commandant Heur du détachement USAR français, l’objectif est de démontrer la coopération au niveau international avec les autorités algériennes qui organisent l’exercice, ainsi que les autres unités internationales, portugaise, espagnole, italienne, polonais et tunisien : «Le détachement français est un détachement engagé sur cet exercice algérien aux cotés d’un deuxième détachement sauvetage et déblaiement ainsi que d’un détachement à compétence médicale». Le Colonel Debussy, chef du détachement français des formations militaires de la sécurité civile, présent sur le terrain en Algérie et responsable de la cellule de coordination des opérations de sauvetage et déblaiement. Son équipe s’est illustrée sur 05 sites. «Dans le cadre de cet exercice depuis lundi vers 07h nous avons extrait de 05 chantiers différents 17 victimes vivantes et 04 personnes décédées dont nous avons restitués les corps aux familles. Aujourd’hui l’opération se poursuit sur 04 autres chantiers avec des détachements de sauvetage et déblaiement issus de trois nations européennes et deux nations maghrébines, à savoir la Tunisie et l’Algérie. Dans le cadre du mécanisme européen de la protection civile, la France est présente avec deux détachements, l’Espagne avec un détachement, ce sont les trois détachements européens. La coordination se passe très bien. L’équipe de coordination européenne a depuis deux jours pris ses consignes auprès des autorités algériennes pour recueillir les priorités, les zones d’efforts en matière de recherches, et je reçois mes instructions pour déployer les éléments internationaux et locaux sur le terrain. L’exercice se déroule à merveille», dira-t-il.

Hafidh Bessaoudi

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