Des vignobles à perte de vue et… d’argent

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Salah, un jeune d’une trentaine d’années qui s’est lancé dans la viticulture après avoir essayé plusieurs autres activités agricoles, estime ce business fructueux.

Sous un soleil de plomb, Salah Keddache, un viticulteur de Chabet El-Ameur, nous accueille chaleureusement dans son vaste champ de vignes. Sur les lieux, des surfaces viticoles à perte de vue ornent les vastes terrains agricoles appelés communément Irrès. Salah, jeune d’une trentaine d’années qui s’est lancé dans la viticulture après avoir essayé plusieurs autres activités agricoles, estime ce business fructueux. D’ailleurs, plusieurs fellahs de la région et même d’autres localités ont transformé leurs champs en de vastes vignobles.

A notre question relative à la production de cette saison, Salah n’a pas caché son désappointement : «Elle a été médiocre. Pire, nous n’avons pas enregistré de telles pertes depuis plusieurs années. Les conditions climatiques des mois de mai et juin, période propice pour le traitement des vignes, ont causé d’énormes dégâts à la fleur. J’ai déboursé tout mon argent dans les traitements, mais sans résultats. Le traitement requiert du temps. Il faut au moins trois heures pour qu’il apporte ses fruits, sachant que les pluies n’aident pas», a-t-il expliqué.

Ce n’est que vers la mi-juin que les fleurs ont muri. «A ce moment-là les maladies ravagent les champs. D’ailleurs, le mildiou est le mal dévastateur des champs de vignes dans toute la région de Boumerdès et ailleurs. Cette maladie cryptogamique est une menace pour la vigne ainsi que pour d’autres fruits de potager, notamment la tomate», ajoute Salah qui avoue avoir perdu près de 50 % de la récolte régulière de la variété «Le cardinal» qu’il cultive depuis plusieurs années.

A Sidi Daoud, fief par excellence de la culture des vignes, plusieurs vignerons estiment que la production a chuté de plus de 50 %. Outre le facteur climatique, certains d’entre eux amputent cette situation au manque d’irrigation et au traitement de la vigne qui ne se fait pas dans les normes. «Certains agriculteurs ne maîtrisent pas le traitement de la vigne avant la maturation des fleurs», dira Mohamed, un viticulteur de la région qui a su traiter ses champs.

Il explique : «Il a fallu que je m’informe davantage et chercher partout le bon traitement», déplorant, dans le même sillage, le manque de formations au niveau des structures étatiques, notamment les services agricoles. Le manque de formations s’ajoute à la cherté des pesticides et engrais, hors de portée pour de nouveaux viticulteurs. Que ce soit à Naciria, Baghlia, Dellys, Khemis El Khechna ou Corso, les vignerons exposent le problème de commercialisation de ce produit périssable et l’absence de chambres froides pour son stockage et sa conservation.

Les vignerons s’interrogent, par ailleurs, sur le sort du projet portant réalisation d’une chambre froide, en collaboration avec des étrangers, pour la conservation sous froid de certaines variétés de raisins. Depuis une dizaine d’années, la wilaya de Boumerdès a réussi à préserver son leadership en matière de production de raisins de table. Elle couvre, d’ailleurs, près de 45 % des besoins nationaux de ce fruit, aux richesses nutritionnelles avérées.

D’ailleurs, en quelques années, la superficie consacrée à la viticulture a doublé pour atteindre les 10 000 hectares, notamment à l’Est de la wilaya. Ce qui revient à dire que près de 17 % de la surface agricole de la wilaya sont exploités par les viticulteurs. «Il y a près de sept ans, la variété « Red Globe » avait été introduite à Boumerdès. Certains fellahs ont risqué le pari en plantant plusieurs hectares de cette espèce. Maintenant, ils ne regrettent pas le risque qu’ils avaient pris, car la récolte était conséquente et le produit n’est pas hautement périssable par rapport à d’autres variétés», indique Ahcène, un technicien agronome qui préconise l’encouragement de l’exportation de la variété de raison sus dite.

Des fellahs qui n’arrivent à écouler leurs marchandises déplorent, en outre, l’absence d’une industrie de transformation leur permettant d’amortir les pertes. L’année dernière, l’actuel wali avait chargé une commission technique pour examiner les possibilités de réaliser un marché de gros de raison dans la région.

Youcef Z.

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