Les splendeurs d’une grandeur passée à Tokyo

Partager

A l’heure où leurs médias dissèquent la « Révolution » française, s’interrogeant sur l’avenir d’un Premier ministre bonapartiste et d’une prétendante royale, les Japonais férus d’histoire se voient offrir une présentation exceptionnelle de l’épopée napoléonienne et des splendeurs de Versailles.L’exposition « Napoléon et Versailles » s’est ouverte samedi au musée Edo de Tokyo et se prolongera jusqu’au 18 juin. Elle a été inaugurée le 2 décembre dernier, bicentenaire d’Austerlitz oblige, au musée municipal de Kobe (ouest du Japon). L’exposition a été préparée par l’Etablissement public du musée et du domaine national de Versailles à l’occasion du bicentenaire du sacre de Napoléon (2 décembre 1804). »C’est peu connu, mais 90% des collections napoléoniennes sont à Versailles. Versailles est le premier musée napoléonien du monde », soulignent Claire Constans et Jérémie Benoît, conservateurs de Versailles.Les organisateurs nippons –le groupe de presse Nikkei fêtant son 130e anniversaire– espèrent rééditer le succès de l’exposition « Fastes de Versailles » (de Louis XIV à Louis XVI) qui avait attiré près de 700.000 visiteurs à Kobé et Tokyo fin 2002-début 2003. Un défi car les Japonais associent Versailles au Grand Siècle plutôt qu’à l’Empire. »Pour les Japonais, Versailles c’est Marie-Antoinette, et Napoléon le cognac », plaisante Chiyoko Motono, la scénographe de l’exposition.A dire vrai, l’épopée napoléonienne est connue au Japon depuis l’ère Meiji (1867-1912) et a soulevé des comparaisons avec la défaite nippone de 1945. « Les Japonais, qui ont un vieux fond guerrier, sont fascinés par l’homme de guerre, son génie et sa gloire, puis sa chute, sa mort en exil, la légende », explique Mme Motono. « Napoléon et Versailles » s’ouvre sur la Révolution, « Louis XVI au pied de l’échafaud », « La mort de Marat » et le dernier portrait de Marie-Antoinette, et s’achève sur les « Adieux de Fontainebleau » et le « Retour des Cendres » de 1840. Des tableaux rarement montrés venant des immenses galeries du Musée de l’Histoire de France constitué par Louis-Philippe à Versailles. Sont rassemblées plus de 150 pièces, dont beaucoup jamais vues au Japon: des portraits d’apparat de Napoléon par Gérard, David et Gros, des bustes de Ney et de Davout; un bronze admirable du jeune Bonaparte à Brienne; des meubles, dont un bureau de l’Empereur; des parures portées par Joséphine et Marie-Louise; des grands vases de Sèvres, des plâtres originaux, etc.Un col et cravate de Napoléon, que l’on voit sur le célèbre portrait de l’Empereur en costume de sacre de François Gérard, a été spécialement restauré pour l’occasion. « Nous avons voulu montrer la société nouvelle née de la Révolution à travers les peintures, en particulier de David, tout en gardant l’histoire des batailles », explique Mme Motono. Elle a mis un soin tout particulier, avec la collaboration d’artisans français, à la reconstitution de la vie quotidienne de l’Empereur au Grand Trianon.Les installateurs de Versailles sont venus pour l’accrochage des tableaux. Et, comme toujours au Japon, il a fallu prévoir la logistique pour… les tremblements de terre. »Modèles et tissus d’époque, papiers peints, rideaux, tapis abeille, marbre en trompe-l’oeil, on a vraiment soigné l’aspect visuel », vante la scénographe, qui a travaillé près de trois ans à cette entreprise et qui promet une suite avec le château de Versailles.

Partager