Ou les trois dimensions pour parler du sida

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Les travaux laborieux menés dans les laboratoires du professeur Sanhadji à Lyon (France) ont abouti à une nouvelle piste qui pourrait mener le chercheur et ses collaborateurs droit vers un nouveau remède contre le sida.Une molécule destinée à piéger le virus HIV, jusque-là fugace, même au stade des expériences scientifiques serait un signal donné aux millions de séropositifs et de malades atteints de ce syndrome de croire que l’espoir, c’est peut-être demain.Réputé pour ses recherches expérimentales sur les souris, le professeur émérite algérien, établi en France, emboîte le pas aux autres chercheurs du globe et met le doigt dans l’engrenage de l’immunologie et la génie génétique. Ses recherches dans la sphère de la transplantation d’organes et de la virologie l’ont conduit sur les traces d’une nouvelle thérapie anti-sida appellée thérapie génique.Mais avant d’aborder cette nouvelle technique consistant en la combinaison de plusieurs médicaments anti-HIV, Kamel Sanhadji part en croisades pour présenter ce syndrome, sinon ses aspects fondamentaux en trois aspects : droits de l’Homme, recherche et pandémie.“La situation sociale des personnes touchées par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) peut être dramatique. Combattre le sida, c’est s’attaquer à ses implications démographiques, politiques et économiques”.En sa qualité de parlementaire, l’éminent chercheur propose en matière de droits de l’Homme que pour “influer sur le comportement des communautés médicales et politiques, les meilleurs alliés sont encore les associations de patients et que les parlementaires doivent être à leur écoute”.Forts de cette intéraction avec le tissu associatif, puisera sa sève en faveur “d’une meilleure qualité de vie, pour plus d’associations de patients, pour le droit de l’autonomie de décision, pour des soins palliatifs apportant compassion et humanité, pour une humanisation de l’hôpital et pour une pédagogie de la prescription médicale”.Afin de concrétiser ce respect des droits de l’Homme, Sanhadji pense que le parlementaire ne doit pas “négocier les promesses faites par les Etats, mais il est là pour contraindre les responsables de tenir leurs engagements”.Aussi, le parlementaire doit s’impliquer davantage dans la défense de la femme et de l’enfant car “sur plus de 40 millions de personnes atteintes du virus VIH/sida dans le monde, 18 millions sont des femmes et 2,6 millions d’enfants sont séropositifs. On estime à plus de 11 millions le nombre des orphelins du sida”.La discrimination existe à tous les niveaux, selon le chercheur qui propose entre autres que pour “corriger l’inadéquation des réponses que propose la santé publique aux problèmes auxquels elle doit faire face, il faut imaginer l’intervention d’autres acteurs que les professionnels de la santé publique, comme ceux concernés par les droits de l’Homme”. Une extension des champs d’action envisagée devrait, selon notre interlocuteur, “constituer une nouvelle étape dans l’évolution de la santé publique”. En tout état de cause, il est difficile pour la santé publique de prendre en compte la dimension “droits de l’Homme” des problèmes auxquels elle est confrontée. “Les solutions peuvent venir de l’observation des phénomènes mondiaux dans leur ensemble. Cette approche macroscopique a permis, après une période d’analyse en quelque sorte (myope) des différents paramètres du problème et de se rendre compte que les facteurs sociaux constituaient le dénominateur commun de la propagation de l’infection à VIH”.

Recherche : thérapie génique expérimentale de l’infection par le VIH : Espoirs et perspectivesEn matière de sida, des essais cliniques sont envisagés dans un futur court terme et les études fondamentales ayant conduit à ce projet thérapeutique ont été menées dans le laboratoire du professeur algérien, Sanhadji.“Les progrès de la recherche ont abouti à des traitements très actifs, associant plusieurs médicaments. Ces traitements d’un grand bénéfice liés aux résistances acquises par le virus ou à des effets secondaires et à une précarité des moyens dans les pays en voie de développement”.Cela suscite intérêt et grand espoir que les résultats expérimentaux sont prometteurs chez l’animal de laboratoire, en matière de thérapie génique anti-VIH dans un stade d’essai. L’objectif de cette nouvelle piste consiste, selon notre chercheur, à “introduire dans l’organisme des cellules modifiées par l’adjonction d’un gène d’intérêt grâce auquel elles fabriqueraient et libéreraient en permanence des facteurs antiviraux in vivo”.Les travaux de recherche en cours définiront les meilleures modalités de ce traitement en vue de son utilisation chez l’homme et dans la perspective d’une “efficacité durable”. Il y a ici donc une manipulation de la génie génétique par ce que le professeur appelle la “reconstitution génétique des mécanismes naturels de défense”. L’objectif de cette recette biologique est de “transférer un gène connu pour la production d’un facteur antiviral dans les cellules (moelle osseuse, lymphocytes) prélevées chez le sujet infecté par le VIH et ensuite réinjectées. Les petits organes artificiels (éponge ou organoïdes) incluant des gènes thérapeutiques peuvent aussi être construits et implantés chez le patient. Ils fonctionnent comme une entité autonome capable de libérer le facteur ou la protéine”. Cette molécule qu’on appelle désormais CD4 est une protéine leurre du virus.Les performances de cette protéine thérapeutique ont été améliorées en lui associant d’autres fragments de protéines telle “la chaîne lourde des immunoglobilines G”. La thérapie génique expérimentale par apport de molécules ayant un effet antiviral est illustré par un mécanisme biologique complexe qui fait dans la synergie de la molécule CD4, des anticorps neutralisants (IgG et 2F5) et interférons (IFN), interleukins (IL). “En conséquence cette synthèse s’arrête dès que l’infection par le VIH disparaît”. Une autre approche expérimentale du chercheur a pour objectif d’inhiber certaines fonctions régulatrices du cycle VIH par “immunisation intracellulaire. “Il s’agit d’induire une résistance cellulaire vis-à-vis de l’infection ou de la propagation du VIH par transferts de gènes codant pour des molécules inhibant des étapes précises du cycle viral”.Dans la foulée de cette imagination nouvelle dans la lutte contre la maladie du siècle, Sanhadji garde les pieds sur terre. “Il y a toujours des limites dans les conquêtes scientifiques”.“Bien que certaines stratégies de thérapie génique aient obtenu in vitro des résultats encourageants, il est évidemment prématuré de préjuger d’une réelle efficacité clinique, quelle que soit l’approche considérée”. D’autant que les évaluations in vivo chez les souris ou, mieux, chez le macaques, sont encore limités, il faut se rappeler que des progrès significatifs récents dans le domaine de la cartographie du génome humain et de la thérapie génique pourront profondément modifier le tableau des années à venir.Des travaux, pour la plupart effectués à la faculté de médecine RTH Laénnec de Lyon, dirigé par le professeur Sanhadji et à l’hôpital Edouard-Herriot de la même ville. Dans le cadre d’une collaboration scientifique, une partie de ces thèmes de recherche sera transférée au laboratoire de recherche en immunologie en cours de création à la faculté de Tizi Ouzou (UMMTO). Le ministère de l’Enseignement supérieur a accordé à ce labo un financement de 70 millions de DA en juin 2005, grâce au Fonds national pour la recherche. L’entrée en activité de ce laboratoire est prévue pour janvier prochain.

Nadir Touati

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