l Son premier roman avait conquis même l’Amérique. La beurette Faïza Guène revient avec sa gouaille. Plus mature et toujours caustique. Certains l’ont surnommée la Sagan des cités, d’autres, la Bridget Jones des banlieues. Même la presse anglo-saxonne s’est penchée sur le cas de Faïza Guène, plume refraîchissante de 21 ans trempée dans le bitume de la Seine-Saint-Denis et nouvelle voix, autrement optimiste, des filles des quartiers. Dans Kiffe Kiffe demain, premier roman vendu à 230 000 exemplaires et traduit en 24 langues, cette eurette de Pantin racontait le quotidien d’une adolescente de 15 ans. Avec Du rêve pour les cufs chronique tendrement caustique d’une émigrée de 24 ans, sa prose gouailleuse gagne en maturité. Plus midinette éclairée que chienne de garde, Ahlème, son héroïne, habite à Ivry. Arrivée en trance à 11 ans, elle est orpheline de mère, assassinée en Algérie. Depuis l’accident de son père, “le patron sur le chantier”, aujourd’hui rivé à sa télévision, c’est elle qui doit maintenir son (voyou) de petit frère dans le droit chemin. Pas facile pour la bouguette (fille) de tout concilier. Entre une mission d’intérim de comptage de clous chez Leroy Merlin et un rendez-vous amoureux foireux arrangé par ses copines, une visite à la préfecture, où elle doit pointer tout les trois mois, et un retour au bled, Ahlème cherche sa place, se battant pour faire exister ses rêves. Quelle que soit la galère, aucun misérabilisme n’affleure sous l’humour acide de Faïza Guène, elle distille la nuance et l’espoir dans le cliché de la cité. Sa langue créative, mélange de verlan, de phrases châtiées et de proverbes africains de Tantie Maristou, fait d’elle une porte-parole efficace, mais aussi un auteur à part entière.
Idir Lounès