“Le véritable enjeu est le poste de vice-Président”

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Pour l’ancien sénateur du tiers présidentiel, les luttes au sommet opposant des groupes ou des clans se sont aiguisées et les divergences tourneraient essentiellement autour du poste de vice-président censé être prévu dans la nouvelle mouture du texte fondamental algérien.Pour rappel, le ministre de l’Intérieur, Yazid Zerhouni, et le Chef du gouvernement, Abdelaziz Belkhadem, ont annoncé, presque simultanément à la fin du mois d’octobre dernier, que ce référendum serait reporté, mais aucune date précise n’a été avancée par l’un ou l’autre membre de l’Exécutif pour la tenue de cette consultation. De même, il y a lieu de rappeler que Abdelaziz Belkhadem, nouveau secrétaire général du FLN issu du ‘’redressement’’ du vieux parti unique, n’a eu de cesse, juste après l’élection présidentielle d’avril 2004, de claironner à qui voulait l’entendre qu’il avait placé des commissions pour plancher sur une nouvelle mouture de la Constitution algérienne. Simple ‘’sens de l’initiative’’ débordant d’imagination ou ‘’inspiration’’ venue des dédales du sérail, l’idée portée par le FLN ne rallie pas, en tout cas, les suffrages de tous les acteurs politiques. Après qu’il fût annoncé par le président Bouteflika lui-même à la fin de l’été dernier, le projet de la révision constitutionnelle semble marquer le pas. Des langues commencent à se délier pour décrypter ce qui s’apparente à un recul.

Maître Aït Larbi commence par situer les enjeux en estimant que « le problème n’est ni technique ni juridique ; il est essentiellement lié aux équilibres régissant les groupes exerçant une autorité à l’intérieur du pouvoir et les groupes exerçant une autorité à l’extérieur du pouvoir ». Ainsi, l’idée exposée-de révision constitutionnelle –‘’n’agréerait pas à certains groupes du pouvoir’’. « L’on se souvient, ajoute maître Aït Larbi, que le parti du FLN avait préparé un projet dans ce sens et il en a fait un programme et une devise. Comme on se souvient que le président de la République a traité cette idée dans l’un de ses discours en déclarant qu’un amendement constitutionnel et un référendum interviendraient à la fin de l’année en cours. Aujourd’hui, on voit que l’intensité des déclarations se fait plus timide (…) Il en ressort qu’il n’est pas facile de fermer le dossier comme cela sous le prétexte de problèmes techniques ou juridiques », poursuit-il.

Abordant ce qu’il pense être le nœud gordien des enjeux charriés par l’idée d’une nouvelle Constitution, Aït Larbi pense que « les luttes entre les différents groupes exerçant une autorité vont conduire vers le report du projet d’amendement constitutionnel. Ce que je puis affirmer est que le problème n’est pas lié à la question [du nombre] de mandats présidentiels. Il porte sur le poste de vice-Président de la république et celui qui devrait le désigner. Est-ce le président de la République lui-même ou bien sera-t-il élu au suffrage universel en même temps que le président ? D’après des informations en notre possession, le président Abdelaziz Bouteflika veut désigner lui-même son adjoint ». Aït Larbi affirme que les groupes en question ne s’opposeraient pas à la création du poste de vice-président, mais ne se sont pas entendu sur la manière d’installer son titulaire (élection ou désignation). Le conflit perdure et des groupes seraient fermement opposés à la désignation du vice-président par le président lui-même.

L’invité d’ ’’El Khabar Hebdo’’ développe par la suite sa vision de la philosophie politique pour apporter des éclaircissements sur la nature du régime que les promoteurs de l’idée de la nouvelle Constitution présentent avec un raccourci pour le moins générateur d’ambiguïtés. À ce propos, il affirmera : « Ceux qui appellent à un régime présidentiel ne savent pas de quoi ils parlent, car l’une des bases du régime présidentiel est que le président de la République et le Chef du gouvernement ne sont pas responsables devant le Parlement. En Contrepartie, le président de la République ne peut pas dissoudre le Parlement. De même, la fonction législative du pouvoir est entièrement détenue par le Parlement, et le président de la République ne peut pas s’y immiscer. Il y a aussi un autre point : la désignation aux postes supérieures de l’État ne peut s’effectuer qu’après approbation du Parlement ou, du moins, d’une commission parlementaire ». Quant à l’idée répandue de la nécessité d’un régime présidentiel fort pour justifier l’amendement constitutionnel projeté, Aït Larbi l’assimile à un ‘’régime impérial élu’’. Des cercles au sein du pouvoir voudraient insérer dans la mouture de la nouvelle Constitution une clause pour faire désigner la moitié des membres du Sénat par le président de la République au lieu du tiers qu’autorise la loi fondamentale actuelle. L’ancien sénateur estime que « cela nous conduira clairement vers la rupture des équilibres à l’intérieur du Parlement et à brider l’action législative. Si tous ces problèmes évoqués ne sont pas résolus et aplanis par les groupes en présence, la révision constitutionnelle n’aura pas lieu de sitôt”, fera remarquer Aït Larbi.

Invité à expliciter davantage la notion de groupes ou de clans au pouvoir, Mre Aït Larbi renverra son interlocuteur vers le discours du président Bouteflika qui ‘’se plaignait’’ en disant :  » C’est tout ce que je peux, et c’est tout ce que se permettent les équilibres nationaux « . C’était, en s’en souvient, lors de sa présentation, en 2005, du projet de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale.

Concernant l’idée d’un troisième mandat qui serait convoité par le président Bouteflika, Aït Larbi pense que le problème ne se pose pas en ces termes lorsque le président est effectivement élu par le peuple.  » Mais, si ce sont les ‘’groupes’’ qui désignent au préalable le président, comme c’est le cas jusqu’à présent, un seul mandat est déjà au-delà du raisonnable « . Il ajoute qu’une éventuelle nouvelle Constitution- selon les critères universels et les besoins de notre société- devrait être le couronnement d’une politique de dialogue global qui traiterait de toutes les questions auxquelles nous sommes confrontés depuis des décennies. La seule condition étant la discussion pacifique et le rejet de la violence. Mre Aït Larbi reproche implicitement aux autorités de traiter le problème de la violence politique en aval (via la Charte), alors que la crise algérienne  » requiert que le pouvoir permette d’ouvrir un dialogue sur la crise, ses causes, ses conséquences et les mécanismes à même de nous éviter de telles crises « .

A. N. M.

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