l La cour de cassation a débouté mardi les héritiers de Victor Hugo qui affirmaient que les deux livres présentés comme une suite au roman Les Misérables et édités par Plon portaient atteinte à l’œuvre de leur ancêtre.
La haute juridiction n’a pas définitivement clos ce dossier et a chargé la cour d’appel de Paris de rechercher « une éventuelle atteinte au droit moral de l’auteur ». Le 31 mars 2004, la cour d’appel de Paris avait condamné la maison d’édition à verser un euro symbolique de dommages-intérêts aux héritiers de l’écrivain ainsi qu’à la Société des gens de lettres pour avoir publié deux romans, ayant pour titre Cosette ou le temps des illusions et Marius ou le fugitif, qui se présentaient comme une suite aux Misérables. Dans son arrêt, la cour d’appel avait estimé qu' »aucune suite ne saurait être donnée à une oeuvre telle que Les Misérables, à jamais achevée ». Les héritiers de Victor Hugo, et notamment Pierre Hugo, arrière-arrière-petit-fils de l’écrivain, s’insurgeaient notamment contre la réapparition de l’inspecteur Javert dans Cosette ou le temps des illusions. Commentant la mort de ce personnage, Victor Hugo lui-même avait écrit : “Si cette fin n’émeut pas, je renonce à écrire à jamais », selon l’assignation déposée en première instance par Me Emmanuel Pierrat, l’avocat de Pierre Hugo. Les éditions Plon avaient formé un pourvoi en cassation contre la décision de la cour d’appel. Dans un arrêt rendu mardi, la 1ère chambre civile de la cour de cassation, présidée par Jean-Pierre Ancel, a annulé la décision rendue par la cour d’appel de Paris. Selon Bruno Anatrella, juriste au cabinet Pierrat, c’était la première fois que la haute juridiction avait à se prononcer sur la question du respect du droit d’auteur dans le cadre des suites littéraires. Selon la cour de cassation, la cour d’appel ne pouvait décider qu’écrire une suite des Misérables constituait par principe une atteinte au droit moral de Victor Hugo. Pour sanctionner les ouvrages publiés par Plon, il aurait fallu qu’elle examine le contenu de ceux-ci. « En statuant ainsi, par des motifs inopérants tirés du genre et du mérite de l’œuvre ou de son caractère achevé, et sans avoir examiné les oeuvres litigieuses ni constaté que celles-ci auraient altéré l’œuvre de Victor Hugo ou qu’une confusion serait née sur leur paternité”, la cour d’appel, qui n’a pas ainsi caractérisé l’atteinte au droit moral et s’est déterminée en méconnaissance de la liberté de création, a violé « le code de la propriété intellectuelle », précise la décision de la haute juridiction. En cassant l’arrêt de la cour d’appel, la cour de cassation ne met pas fin au litige. Ce dossier doit en effet être désormais réexaminé par la cour d’appel de Paris qui le jugera dans une autre composition. Selon un communiqué de la cour, il appartiendra à la cour d’appel de renvoi de procéder à l' »examen et à la recherche d’une éventuelle atteinte au droit moral de l’auteur par les oeuvres discutées ». Interrogées par l’AFP, les éditions Plon n’étaient pas en mesure, mardi en milieu d’après-midi, de commenter la décision de la cour de cassation.