Que d’émotion !

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Une foule considérable a déferlé ce jeudi sur le village d’Ifnaiene, pour accompagner à sa dernière demeure Ramdane Amazigh. Sa dépouille a été exposée dans la cour de sa maison, aussi vaste que son cœur, pour un dernier hommage des habitants de son village, nombreux à être un peu étonnés d’apprendre que leur bourgade ait abrité dans la discrétion un personnage aussi illustre. Le service d’ordre a bien fait les choses ; femmes et hommes ont pu jeter dans la dignité un ultime regard au parent, à l’ami, au frère de combat.

Beaucoup d’animateurs de partis politiques, du Mouvement citoyen, de personnalités artistiques étaient là. On pouvait voir Abdenour Abeslam, Belaid Abrika ou Rabah Ouferhat. Les partis politiques implantés dans la région ont tenu à être présents. Les “anciens moudjahdine” se replongeaient dans la ferveur des retrouvailles. Le levée du corps s’est faite à midi, sous les cris stridents des femmes et des hommes apparentés au défunt. Ses enfants étaient inconsolables. La marée humaine fut obligée de se scinder en deux, suivant deux accès différents, pour se rejoindre au cimetière du village.L’oraison funèbre prononcée par Tayeb Abdelli, dit Tayeb Ikkouvach, fut une lettre passionnée d’adieux et de remerciements au défunt pour ses hauts faits de militantisme. D’une voix assiégée par le sanglot, sur un ton de douloureuse confidence, Tayeb a touché tous les présents figés dans un silence religieux plein de frissons. C’est que Da Ramdane ne s’est pas ménagé de son vivant pour la promotion de la culture berbère. Il était un adjoint très proche de feu Bessaoud Mohand Arab. Il mit ses biens à la disposition des militants et gens de passage, qui trouvaient chez lui le gîte et le couvert. Il était aussi attaché à un certain purisme, tenant à débarrasser son parler des mots ou locutions étrangères, surtout qu’il trouvait toujours le mot qu’il faut à la place qu’il faut. Il fut aussi constamment sur la brèche, face aux embûches de toutes sortes qui à cette époque s’opposaient à l’émancipation de la langue de Jugurtha.

En cette journée ensoleillée, Ifnaiene aura enterré un militant de valeur. Si la langue amazighe a arraché des acquis indéniables, Ramdane Haifi aura été de ceux qui auront creusé les premiers sillons, les plus difficiles car creusés sur le difficile terreau de l’unicité linguistique. Il aura réussi la dernière prouesse (message posthume ?) de rassembler autour de lui des personnages que les aléas de la politique semblent avoir séparés.

Amarouche

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