»L’Etat français doit répondre de ses actes devant des juridictions internationales »

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La France coloniale a systématiquement utilisé la torture, voire même généralisé et institutionnalisé cette pratique infâme, pour tenter d’arracher des aveux des Algériens. C’est le constat accablant établi par Me Benbraham, Louisette Ighilahriz et Djouher Akrour, deux moudjahidates torturées par l’armée française, lors d’une conférence-débat, tenue hier, au forum d’El Moudjahid, à l’occasion de la célébration des événements tragiques du 8 Mai 1945. Le général Massu a pondu une note le 19 mars 1957 après laquelle la pratique de la torture fut généralisée en Algérie. Auparavant les pouvoirs spéciaux avaient octroyé plus de prérogatives à l’armée. C’est ainsi que la torture a été institutionnalisée.  » A cette époque, le maire d’Alger reconnaissait la disparition de 3000 à 5000 personnes. Selon des chiffres, il y avait 8000 disparus. Ces actes sont des exactions « , estime l’avocate, ajoutant que le général Paris Bollardiere, ayant contesté cette pratique, a été jeté en prison alors que le préfet de police d’Alger, Paul Tenjen, a démissionné de son poste, après le transfert des pouvoirs de la police vers l’armée. M.Benbrahem s’élève contre le fait que des anciens tortionnaires de la trempe de Massu, Le Pen et Schmit revendiquent et se glorifient de leurs méfaits à travers des livres. Cependant, elle rend hommage à ces militaires qui veulent libérer leurs consciences en dénonçant les agissements de leurs chefs criminels. Pour étayer son argumentaire, la conférencière cite l’exemple du tortionnaire de la sinistre villa Susini. Henri Poyot, tourmenté par sa conscience, a demandé pardon au peuple algérien. C’est le cas aussi, de H G.Esmeralda, qui a témoigné dans son livre Un été en enfer, de femmes torturées à mort. L’historien et journaliste Henri Alleg qui a contribué, selon l’avocate, a révélé la généralisation de la torture, il a été condamné, lui aussi, pour une réclusion de 10 ans de prison ferme pour atteinte extérieure de l’Etat.  » Cette condamnation veut dire que c’est l’Etat qui a ordonné la torture. « , précise M.Benbrahem, en soulignant que Jacques Duquel, journaliste du quotidien La Tribune, détenait des pièces et des documents inédits sur cette pratique inhumaine. Dans le même ordre d’idées, l’intervenante évoque l’appel des “12”, parmi lesquels figuraient Pierre Vidal Naquet et Gisèle Halimi. Ceux-ci ont demandé à la France de reconnaitre ses crimes commis en Algérie. Par ailleurs, elle invite les ministères de la Justice et de la Défense alégériens à faire des efforts dans le but de récupérer les archives des personnes torturées ou disparues. La juriste révèle qu’un ancien officier, sous l’ère du général Schmit a exprimé sa volonté d’apporter sa contribution à faire la vérité sur les cas de tortures et de disparitions, ajoutant que son supérieur à savoir, le général Schmit lui a intimé l’ordre de taire.  » Le débat sur la torture fait peur aux Français de crainte des poursuites judiciaires. L’Etat français est coupable de crime d’Etat « , clame-t-elle. Citant l’article 7 du traité de Rome, elle précise que la France criminelle doit répondre de ces pratiques devant des juridictions internationales.

Elle rappelle que “Massu et Aussaresses revendiquaient de manière claire et sinistre avoir exécuté les ordres de ses chefs pour le premier et assassiné des Algériens pour le second. Aujourd’hui, 70% des Français reconnaissent la torture pratiquée en Algérie « , conclut-elle. Intervenant, Louisette Ighil Ahriz révèle, pour sa part, qu’un officier français compte faire des révélations sur les tortionnaires de Larbi Ben M’hidi. S’agissant de ses démarches, pour obtenir un document sur la sevée d’écrou, elle dit qu’on lui a signifié que les documents ont été brûlés.  » Nous sommes sur la bonne voie. Même si on n’a pas de documents, des gens nous envoient des archives « , note-t-elle, confiante.

Hocine Lamriben

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