Les facs prennent le relais de la contestation anti-Sarkozy

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Fait inédit, c’est la première fois en France que l’élection d’un président déclenche, dès la proclamation des résultats, des manifestations d’hostilité. « Cette situation n’est pas acceptable », a dénoncé le ministre de l’Intérieur François Baroin, mercredi, sur France Info, sortant de sa retenue. Selon le ministre, les violences anti-Sarkozy étaient « en décrue » avec environ 200 véhicules incendiés et 80 interpellations dans la nuit de mardi à mercredi, contre 365 voitures brûlées et 160 interpellations la veille – un décompte lui-même en retrait de celui de la nuit de l’élection (730 voitures, 595 interpellations). Même si ce chiffre demeure non exhaustif.

Trois jours après l’élection de Nicolas Sarkozy à l’Elisée, les manifestations de protestation et les violences consécutives dues à sa victoire ont été moins nombreuses à travers le pays, dans la nuit de mardi à mercredi.

Parallèlement, des assemblées générales commencent à s’organiser dans des universités parisiennes. Ces AG organisées dans des facultés par les étudiants, démontrent si besoin est, que ces violences ne sont nullement des actes de vandalismes qui ne toucheraient que les quartiers dits sensibles. En effet, lundi, deux petites AG se sont tenues à Paris à la Sorbonne et au site de Paris I – Tolbiac, pour lancer une mobilisation contre le projet de réforme de l’université de Nicolas Sarkozy. Mercredi, des étudiants de Tolbiac, de Paris-VIII-Saint-Denis et de Lille 1, se réunissaient à la mi-journée. Des rendez-vous sont aussi prévus à Nanterre et à la Sorbonne jeudi.

A Saint-Denis, il s’agissait surtout de s’accorder sur les moyens de réagir sur certaines mesures à venir du prochain gouvernement, notamment concernant les étudiants étrangers. A Lille, l’objectif est « d’organiser la riposte face aux attaques libérales-réactionnaires ».

A propos des constats établis par le ministre de l’Intérieur, celui-ci estime que « Tout ce qui s’est passé dans la rue depuis trois jours, en décrue (…) montre que ce sont des mouvements clairement engagés politiquement, affichés ouvertement d’extrême-gauche », a affirmé le ministre, pour qui l' »agitation » de ces militants « n’est pas acceptable » et « ne sera pas acceptée ». Démentant toute « violence policière » à l’encontre des manifestants et louant a contrario le « professionna-lisme » des forces de l’ordre, M. Baroin s’est « félicité » de la réponse judiciaire apportée,

y voyant un « message de fermeté ».

A Toulouse, par exemple, où des incidents étaient survenus dimanche soir, la dernière nuit a été « moins intense », selon la police, et le rassemblement (extrême-gauche, anarchiste, étudiants) s’est dispersé dans le calme. A Lille également, une « baisse sensible » du nombre d’incidents a été notée par les autorités, mais les façades des permanences UMP d’Amiens et de Laon (Aisne) ont été vandalisées. Dans le Rhône, le nombre de voitures brûlées a été divisé par trois (30 contre 98 la veille). A Lyon, quatre personnes ont été jugées en comparution immédiate pour des violences sur policiers et des dégradations dimanche soir : deux ont écopé de la prison ferme (6 et 3 mois) et deux autres de 120 heures de travaux d’intérêt général. De même, au Creusot (Saône-et-Loire), un majeur qui avait été interpellé à la suite de jets de pierre sur un véhicule de police dimanche a été condamné à 6 mois de prison dont 2 fermes. Enfin à Paris, sept personnes interpellées dimanche soir seront jugées mercredi après-midi en comparution immédiate par le tribunal correctionnel. Une dizaine de mineurs ont par ailleurs été présentés à des juges ou au tribunal pour enfants. Ces violences dévoilent, entre autres, une réalité amère, celle d’un profond malaise au sein de la société française. En effet, depuis l’embrasement des banlieues en novembre 2005, dû au marasme criant dont sont victimes les jeunes de ces périphéries, aggravé par les propos virulents de Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur ; aucune solution concrète n’a été apportée par les politiques, baignant dans les problématiques d’intégration ou parfois de xénophobie patente. Profitant des violences urbaines, la parole commence à se débrider à droite. La polygamie, l’immigration et l’étranger non européen sont pointés du doigt.

Yassine Mohellebi

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