Créée le 19 septembre 1985 à l’initiative d’un groupe de diabétiques et de médecins, l’association des diabétiques de la wilaya de Tizi Ouzou, sise au cœur du quartier populaire de la Nouvelle-Ville, jouxtant le commissariat de police, est constituée d’un bureau de six membres, de deux commissions, sociale et médicale ainsi que d’une permanence chargée de l’accueil et de l’orientation des diabétiques ou de leurs parents. Elle compte aujourd’hui quelque six mille adhérents des deux sexes à travers tout le territoire de la wilaya. Rencontré sur les lieux, le docteur Belabbas, jeune médecin bénévole, se montre impatient pour nous décrire avec son enthousiasme si particulier, l’association pour laquelle il se consacre corps et âme aux côtés de nombreux autres bénévoles.
Des objectifs pragmatiquesIl s’agit d’abord d’éduquer et de participer à l’éducation sanitaire des personnes vivant avec le diabète ainsi que de leur entourage afin de leur apprendre à mieux gérer la maladie et vivre mieux tout en évitant les redoutables complications qui peuvent en découler. A côté de cela, l’association intervient auprès des services publiques notamment les organismes d’assurance, afin d’orienter et de faire entendre la voix des personnes vivant avec le diabète. L’information et la communication occupent une place importante dans les missions de l’association des diabétiques et ce par l’édition de brochures, de dépliants ainsi que l’organisation de journées d’information et l’intervention dans les médias.
Les activités médicales constituent sans nul doute le fer de lance et l’association car la bonne compréhension de la maladie et des complications qui peuvent en découler est la condition sine qua non pour une bonne prise charge du patient diabétique.
De par son caractère humanitaire et social, l’association des diabétiques de la wilaya de Tizi Ouzou vient régulièrement en aide aux diabétiques démunis et défavorisés par des dons en médicaments, matériel et autres nécessités (glucomètres, bandelettes, etc…).Des activités à profusion, l’autre point fort de l’associationDepuis maintenant près de 20 ans d’existence, l’association des diabétiques de la wilaya de Tizi Ouzou a pu mener un nombre incalculable d’actions et d’activités très diversifiées. Sur le plan social, l’association organise chaque été depuis 1986, une à deux sessions de colonies de vacances pour enfants diabétiques âgés de 7 à 14 ans. Ces enfants sont pris en charge dans des centres du ministère de la Jeunesse et des Sports et sont encadrés par une équipe médicale bénévole de l’association. Ainsi, plus de six cent enfants ont participé aux colonies de vacances de l’association de 1986 à 2002, ce qui leur a permis de vivre des moments d’évasion sans toutefois perdre de vue la bonne observance du traitement : activités sportives, jeux éducatifs mais aussi et surtout des cours d’éducation sanitaire théoriques et pratiques ont constitué l’attraction de ces vacances. Les diabétiques du troisième âge ne sont pas en marge des activités de l’association car celle-ci organise à leur profit chaque année quatre à cinq cure thermales et ce par groupe de vingt-cinq. Les sorties et les excursions pour les enfants diabétiques et leurs familles constituent également une tradition dans les activités sociales de l’association des diabétiques de Tizi Ouzou.Les activités médicales constituent sans nul doute le fer de lance et l’association car la bonne compréhension de la maladie et des complications qui peuvent en découler est la condition sine qua non pour une bonne prise charge du patient diabétique. A cela, s’ajoute bien sur la bonne maîtrise des gestes thérapeutiques : mesure de la glycémie avec un glucomètre, mode d’administration de l’insuline, adaptation du régime diététique en fonction de l’activité physique, etc…. Ainsi, l’équipe médicale de l’association des diabétiques assure à longueur d’année des cours d’éducation sanitaire à raison d’un cours par semaine par groupe de 20 diabétiques.La formation médicale continue est un autre challenge pour les bénévoles de l’association et consiste en l’organisation de journées scientifiques et d’information en collaboration avec le comité local de diabétologie, avec en sus l’édition de brochures et de dépliants.
L’information et la communication occupent une place importante dans les missions de l’association des diabétiques et ce par l’édition de brochures, de dépliants ainsi que l’organisation de journées d’information et l’intervention dans les médias.
L’activité physique qui est une étape-clé de la prise en charge de la maladie, prend toute sa dimension au niveau des activités de l’association. Il est utile de rappeler néanmoins qu’un exercice aigu et de durée brève a un effet néfaste. Par contre, une activité physique s’inscrivant dans la régularité et la pratique au long cours constitue, surtout si elle est associée aux règles diététiques, un moyen efficace pour éviter le passage à des stades évolués de la maladie. C’est donc tout naturellement que les randonnées pédestres et les escales dans les hauteurs boisées et les montagnes du Djurdjura sont régulièrement menées. Enfin, les animateurs de l’association des diabétiques, voulant sans doute réaffirmer leur devise qui transcende les blocages psychologiques liés à la maladie, soulignent, non sans fierté, la participation de deux adhérents diabétiques au marathon international de Djanet dans le Sahara en février 2001, ainsi que deux participations aux marathons des diabétiques à Alger en 2001 et 2002.
Des perspectives à la hauteur des ambitionsL’acquisition d’un centre de regroupement propre à l’association constitue un objectif de premier ordre pour les animateurs de l’association des diabétiques. En outre, ces derniers se battent avec hargne pour le remboursement de l’appareillage et le matériel utilisé par les diabétiques. A titre d’exemple, le glucomètre (appareil destiné à la mesure du taux de sucre dans le sang capillaire) coûte 9 000 DA environ en pharmacie alors qu’il est cédé au niveau de l’association à 2 500 DA. Même chose pour les bandelettes destinées à recevoir les gouttelettes de sang. Entre autres perspectives, signalons l’ambition des cadres de l’association de jumelage et d’échange avec d’autres associations dans le monde, ainsi que l’édition d’un journal périodique.
Situation au service de diabétologie du CHU de Tizi OuzouAvec un total de 462 malades hospitalisés pendant l’année 2004, le service de diabétologie du CHU de Tizi Ouzou situé sur les hauteurs magistrales du mont Sidi Belloua est ce qu’on appelle communément un service «surchargé». Sur place, nous sommes émus par le nombre effrayant de pieds diabétiques qui constituent assurément la première complication du diabète en Algérie surtout chez l’homme avec son lot d’amputations parfois très mutilantes.
Les nouveaux critères pour le diagnostic du diabète définis par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) se caractérisent par l’abaissement du seuil de diagnostic pour la glycémie (taux de sucre dans le sang) à jeun de 1,40 grammes/litre à 1,26 g/l alors que le seuil de 2,00 g/l après ingestion de sucre est maintenu.Le constat du Dr Aliane, chef de service, est d’ailleurs sans appel : «Certains patients, par défaut d’observance du traitement médical et du régime y afférent, sont devenus des habitués du service avec plusieurs hospitalisations dans l’année ; ceci induit incontestablement des complications graves à type d’amputations des membres inférieurs, des insuffisances rénales sévères et les redoutables réinophaties diabétiques qui causent la cécité».
Quelle définition pour le diabète ?Le diabète sucré est un groupe de maladies caractérisées par une élévation du taux de sucre dans le sang (hyperglycémie chronique) résultant d’un défaut de la sécrétion de l’insuline (hormone produite par le pancréas qui diminue le taux de sucre dans le sang), on parlera alors du diabète de type 1 ou diabète insulino-dépendant (DID) d’origine génétique et héréditaire, ou d’une résistance à l’action de l’insuline au niveau des organes cibles, il s’agira alors du diabète de type 2 ou diabète non insulino-dépendant (DNID) qui se manifeste tard dans la vie et qui accompagne souvent une obésité ayant pour origine un régime alimentaire inapproprié.
La plupart des femmes diabétiques peuvent avoir une grossesses normale. Cependant, un taux de sucre trop élevé au moment de la conception peut constituer un risque de malformation pour le fœtus ; aussi, la grossesse doit-elle être planifiée et surveillée.
Les nouveaux critères pour le diagnostic du diabète définis par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) se caractérisent par l’abaissement du seuil de diagnostic pour la glycémie (taux de sucre dans le sang) à jeun de 1,40 grammes/litre à 1,26 g/L alors que le seuil de 2,00 g/L après ingestion de sucre est maintenu. Le diabète ne pose donc habituellement pas de problèmes diagnostic mais plutôt le problème d’une prise en charge au long cours comprenant une surveillance spécifique astreignante et le dépistage des complications rétiniennes, rénales, neurologiques et cardiovasculaires.
Le diabète, une maladie aux proportions épidémiquesLe diabète sucré de type 2 représente la forme la plus répandue de diabète, sa fréquence croit dans les pays développés mais aussi dans les pays en voie de développement. C’est un trouble de la glycorégulation qui touche environ 07 % de la population adulte. Sa prévalence ne cesse d’augmenter, elle était de 110 millions en 1997, elle est de 180 millions actuellement et atteindra les 300 millions en 2025. Le diabète constitue un problème majeur de santé publique, il représente la première cause d’insuffisance rénale dans tous les pays occidentaux, d’un quart à un tiers des causes d’infarctus du myocarde chez l’homme et chez la femme, la première cause d’artériopathie des membres inférieurs (pied diabétique), une des grandes causes d’accidents vasculaires cérébraux, et la première cause de cécité acquise.
Une femme diabétique peut-elle avoir une grossesse normale ?La plupart des femmes diabétiques peuvent avoir une grossesses normale. Cependant, un taux de sucre trop élevé au moment de la conception peut constituer un risque de malformation pour le fœtus ; aussi, la grossesse doit-elle être planifiée et surveillée. En outre, une glycémie trop importante peut provoquer un développement du fœtus plus rapide que la normale, accroissant les risques à l’accouchement et provoquant l’accouchement d’un bébé à gros poids de naissance (supérieur à 4 kilogrammes). Un traitement par les anti-diabétiques oraux, qui font courir des risques de malformation au fœtus, doit impérativement être arrêté pendant la grossesse et éventuellement remplacé par une insulinothérapie transitoire.
Diabète et permis de conduire Un diabétique insulino- dépendant étant exposé aux malaises hypoglycémiques, certains métiers dits “de sécurité” lui sont interdits, car une perte de connaissance pourrait avoir des conséquences graves pour lui-même et pour autrui. La conduite automobile peut également s’avérer dangereuse. Les diabétiques insulinodépendants (traités uniquement avec de l’insuline) peuvent obtenir le permis B (véhicule léger) pour une durée temporaire. En revanche, le permis C (poids lourds) leur est formellement interdit. Les diabétiques non insulinodépendants (poursuivant un traitement oral) peuvent, quant à eux, obtenir les deux types de permis après avis d’une commission médicale.
Diététique et activité physique : piliers de la prise en charge du diabète Le rôle de l’alimentation sur la santé est connu depuis des lustres. En 400 avant JC., Hippocrate écrivait déjà que “l’alimentation est notre première médecine”. Le régime du diabétique doit être équilibré et aussi proche que possible de l’homme normal. Il doit comporter une quantité normale de protéines et de graisses et une quantité limitée de glucides (sucres et farineux). Ce qui est défendu pour tout diabétique, quel que soit son type, sont tous les sucres rapides (miel, bonbons, pâtisserie, dattes,…) ainsi que les liqueurs et les fritures. Par contre, il est permis de prendre les aliments ne contenant pas de sucre et ce en quantité «rationnelle» sauf avis médical contraire : viandes, poissons, crustacés, œufs, fromages, margarine, huile d’olive, etc… La répartition des repas est une autre particularité du régime du diabétique puisque qu’elle doit comporter trois repas principaux et trois collations. Le patient doit être par ailleurs averti qu’il ne doit jamais sauter aucun repas au risque de déséquilibrer son diabète. Les objectifs de la diététique sont donc, d’une part, éviter les pics hyperglycémiques surtout après les repas et la nuit, et de réduire le surpoids notamment chez les diabétiques de type 2 (appelé également diabète gras), d’autre part. La pratique d’une activité physique régulière doit trouver toute sa place au sein du projet thérapeutique en rappelant l’obligation d’un supplément glucidique pendant et après l’effort afin d’éviter les redoutables hypoglycémies, bien fréquentes malgré les croyances d’usage. De ce fait, et aussi paradoxal que cela puisse paraître, tout patient diabétique doit constamment avoir sur lui trois morceaux de sucre ou d’autres sucres rapides (bonbons, chocolat,…), toujours porter sur soi sa carte de diabétique et savoir reconnaître les signes cardinaux de l’hypoglycémie : sueurs froides, crampe gastrique, flou visuel, maux de tête et accélération des battements du cœur.
Un traitement à vie Le traitement à base d’insuline ou «insulinothérapie» est indiqué dans le diabète de type 1 (ou diabète maigre) et dans le diabète de type 2 en cas d’échec du traitement antidiabétique oral. L’insulinothérapie s’avère également nécessaire au cours de certaines situations : grossesses, infection, traumatisme, chirurgie ou tout autre situation transitoire déséquilibrant le diabète. On dispose aujourd’hui de plusieurs types d’insulines qui peuvent être prescrites en fonction de différents schémas thérapeutiques (une, deux ou plusieurs injections en sous-cutané par jour). Trois grands laboratoires se disputent la gamme des insulines rapides (Actrapid R, Insuman R, Lentes (Ultratard R, Umuline R) et semi-lentes (Insulatard R, NPH R) commercialisées en Algérie. Il s’agit des laboratoires Novonordisk, Lilly et Aventis.Ce dernier est, pour rappel, partenaire de Saidal dans le projet de réalisation de l’usine d’insuline à Constantine qui sera opérationnelle au plus tard le 15 juillet de l’année en cours.Par ailleurs, les diabétiques traités par l’insuline viennent d’accueillir avec beaucoup de soulagement la mise sur le marché des stylos injecteurs NovoPen3R dont la particularité consiste en leur étonnante facilité d’utilisation et surtout le fait que les cartouches utilisées avec ces stylos n’ont pas besoin d’être conservées à des températures basses comme il était d’usage avec les flacons d’insuline traditionnels, ce qui, en conséquence, contribuera à faciliter la mobilité des patients, à améliorer leur bien-être et surtout leur équilibre glycémique. D’ailleurs, nous avons constaté de visu que ces stylos injecteurs NovoPen3R sont distribués gratuitement aux patients au niveau de l’association des diabétiques et du service de diabétologie du CHU Belloua.Chez les diabétiques de type 2 (ou diabète gras), catégorie la plus fréquente, l’introduction d’un traitement par agents anti-diabétiques oraux ne sera envisagée qu’après échec du traitement hygiéno-diététique seul bien, conduit pendant 3 à 6 mois.Le traitement médicamenteux est également légitime lorsque le taux de l’hémoglobine glyquée (HbAlc) demeure supérieur à 6,5 % après 3 à 6 mois des seules mesures hygiénodiététiques. Cependant, le traitement médicamenteux devient nécessaire si le taux de l’hémoglobine glyquée demeure supérieur à 8 % et utilisera différentes familles de produits dont les plus prescrits en Algérie sont les sulfamides hypogli-cémiants (Amarel R, Daonil R) et la «bonne vieille» mais non moins indispensable Metformine (Glucophage R) surtout chez les patients obèses.Les thiazolidine-diones (TZD), de découverte plus récente, ne sont pas encore commercialisées en Algérie. A cet effet, tous les yeux demeurent braqués sur le projet de réalisation par le géant Novonordisk de l’usine de Oued Aïssi à quelques encablures de Tizi Ouzou et qui mettra sur le marché, d’ici la fin de l’année en cours, quelque 8 millions d’unités d’antidiabétiques oraux et d’anti-hypertenseurs (médicaments utilisés contre l’hypertension artérielle, fréquemment associée au diabète gras de type 2). A noter que les responsables du laboratoire Novonordisk, leader mondial dans le traitement du diabète, comptent doubler la capacité de production de cette usine dans une deuxième phase et créer plus d’une centaine d’emplois directs, ce qui constituera à coup sûr une véritable bouffée d’oxygène pour les jeunes de la région où le chômage sévit à l’état endémique, et permettra d’élléger un tant soit peu, le dur quotidien, mais néanmoins rempli d’espoir, de quelques deux millions de diabétiques en Algérie. «L’espoir changea de camp, le combat changea d’âme», disait à juste titre Victor Hugo.
Hamadachi Karim