Pouvait-on épargner les coups durs qu’à eu à subir la Loi fondamentale du pays depuis l’intronisation de Abdelaziz Belkhadem à la Chefferie du gouvernement et le retour du FLN aux affaires ? Une Constitution élaborée dans les pires moments, qu’a vécus le pays où ses institutions n’ont jamais connus un précédant, en matière de déstabilisation, comme fut le cas à cette époque, confectionnée à l’ère de Zeroual, afin de réduire la menace islamiste et séparer les pouvoirs judiciaire, exécutif et législatif.
Ouyahia empêché de présenter la politique générale du gouvernement
Abdelaziz Belkhadem, qui traîne depuis belle lurette la casserole peu glorieuse de « barbefélene » étant d’extraction politique islamiste et qui fut ministre des Affaires étrangères d’août 2000 jusqu’au dernier remaniement ministériel du 1er mai 2005, s’était opposé à ce que M. Ouyahia, alors chef du Gouvernement fasse sa déclaration de politique générale devant les députés,conformément aux dispositions de la Constitution algérienne. M. Ouyahia, qui avait introduit une demande, en ce sens, au bureau de l’APN, a dû renoncer à se présenter devant les députés après le refus du président de cette institution, Amar Sâadani, un apparatchik à la caricature, de répondre favorablement à sa demande. Le FLN et le bureau de l’APN violent d’un manière claire la Constitution.
Celle-ci prévoit, dans l’article 84, ceci : « Le gouvernement présente annuellement à l’Assemblée populaire nationale une déclaration de politique générale. La déclaration de politique générale donne lieu à un débat sur l’action du gouvernement ».
Le «nous ne souhaitons pas que Ouyahia présente son bilan», lancé par Abdelaziz Belkhadem était en réalité une injonction faite au président de l’APN de ne pas programmer la séance plénière où le chef du gouvernement devrait défendre un bilan économique qui fait état d’une croissance de plus de 5%, et des réformes qui ont considérablement avancé sur les registres de l’éducation, de la justice et du système financier. Autant de points positifs qui ont valu à l’Algérie les félicitations du FMI, de la Banque mondiale et des partenaires étrangers.
Sachant l’homme capable de convaincre l’opinion publique du bien-fondé de sa démarche, ses contradicteurs n’ont pas voulu courir le risque d’une motion de censure que la société ne comprendrait pas du tout. Ainsi, on interdit à Ahmed Ouyahia un face-à-face avec le peuple, via l’écran de télévision, étant entendu que ce genre de rendez-vous est traditionnellement retransmis en direct. C’est justement cette pratique «déloyale» que dénonçait Ouyahia à l’époque, selon les observateurs. Il estime que ses adversaires ont été loin dans la «manigance», en refusant le débat d’idées. Le chef du gouvernement aurait alors compris l’acharnement de Belkhadem et de Soltani à son égard et présenté sa démission au président de la République.
Belkhadem à la tête de l’exécutif sans présentation du programme gouvernemental
En effet, dès que ce dernier eut été remplacé par le président de la République à la tête de l’exécutif, celui-ci n’a pas jugé opportun de présenter le programme du gouvernement qu’il préside devant les députés. Une pure violation de l’Article 80 qui stipule que « le chef du gouvernement présente son programme devant l’assemblée pour son adoption. L’assemblée discutera sur le projet », mais aussi l’Article 83 qui dit que « le chef du gouvernement applique et coordonne le programme adopté par l’APN »
Ainsi donc, entre deux gouvernement passés, deux politiques générales n’ont pu été présentées devant les élus du peuple, l’une empêchée, l’autre ignorée…
APN : étrange report de l’investiture
Ce report, en violation de l’article 113 de la Constitution, serait-il lié à des tractations au sommet au sujet de la personne qui accédera au perchoir ? L’installation de la sixième législature de l’Assemblée populaire nationale a été reportée à la quatorzième journée depuis son élection. Ce report de dernière minute constitue une entorse à l’article 113 de la Constitution qui prévoit un délai légal de 10 jours entre la tenue de l’élection et l’installation de l’APN.
« Cette session de l’Assemblée nationale se tiendra conformément aux dispositions de l’article 113 de la Constitution qui stipule que la législature débute de plein droit le 10e jour suivant la date de l’élection de l’APN, sous la présidence du doyen d’âge, assisté par les deux députés les plus jeunes, et ce, après la proclamation par le Conseil constitutionnel des résultats des élections législatives le 21 mai 2007 », tente vainement la nouvelle assemblée de contourner la loi. Or, dans sa justification juridique au report, le communiqué de l’APN s’autorise une interprétation et partant, de sa propre lecture de l’article 113 puisque pris de la Constitution, cet Article fait référence uniquement à la date des élections législatives et non pas à la proclamation des résultats par le Conseil constitutionnel comme le fait le communiqué de l’Assemblée nationale : « La législature débute de plein droit le 10e jour suivant la date d’élection de l’Assemblée populaire nationale, sous la présidence de son doyen d’âge assisté des deux députés les plus jeunes. L’Assemblée populaire nationale procède à l’élection de son bureau et à la constitution de ses commissions. Les dispositions ci-dessus sont applicables au Conseil de la nation », énonce intégralement l’article 113 de la loi fondamentale. Il y a eu donc violation de la Constitution.
Cumul de fonctions des ministres du gouvernement
C’est ce qui s’est traduit par la tenue de la première séance de la nouvelle Assemblée avec des ministres appartenant au pouvoir exécutif et législatif en même temps, ceci n’est pas qu’une violation flagrante de la Constitution mais aussi aux fondations du système républicain basé sur la séparation des pouvoirs…en effet, l’article 105 stipule que « la fonction du député ou du sénateur est nationale, renouvelable et ne peuvent assembler entre celle-ci et d’autres fonctions ». Aucune formation politique, même celles dites de l’opposition, n’a jugé utile de dénoncer ce flagrant enfreint à la Loi fondamentale du pays. M. Hanoune du PT qui crie dans chaque coin à l’ingérence étrangère et au complot dans chacune de ses sorties, n’a pas trouvé quelque chose de grave dans ce qui s’est passé.
Une démarche qui ne peut être classée que dans la case de la provocation du peuple et qui vise à minimiser ses sacrifices pour la défense de ces institutions. Au lieu d’une réponse favorable au message qu’a eu à transmettre ce peuple au pouvoir, à travers son boycott massif des dernières élections, les pouvoirs publics multiplient les erreurs en excellant dans la provocation.
Ni le chef de l’Etat, ni l’un de ses représentants, ni aucune autre force ne peuvent s’opposer à cette obligation constitutionnelle. A moins qu’on se soit accordé, quelque part à installer le pays dans une zone de non-droit. A ce moment-là, il faut le dire clairement pour éviter, au moins, au pays une crise inutile. De plus, le chef du gouvernement et le président de la République doivent soumettre le bilan de leurs activités, quelle que soit la méthode, au contrôle populaire. Sauf si le but est de consacrer le pouvoir sans partage. Cette manière de faire qui consiste à fouler aux pieds toute déontologie politique et verser dans le complot de bas étage.
Yassine Mohellebi
