Le rendez-vous a été pris pour le lendemain à 11 h. Seddik termine son travail à l’hôtel à minuit. Il lui faut à peu près une heure pour rejoindre, par bus, Steinway. dans ce quartier, il occupe une chambre avec trois autres Algériens. Nous avons tenu à commencer notre périple américain en nous rendant dans une zone où vivent des Algériens. Seddik nous a parlé de Steinway, où vivent non seulement des Algériens, mais aussi d’autres Maghrébins et des Arabes (Egyptiens, Libanais, Syriens…). La veille, notre nouvel ami nous a expliqué comment s’y rendre. Il fallait prendre le bus n° M 60 qui fait la rotation de Broadway à l’aéroport La Guardia. Quand nous montons dans un bus américain pour la première fois nous remarquons qu’il n’y a point de receveur. Il est remplacé par une machine à l’intérieur de laquelle il faut glisser deux pièces d’un dollar. Comme nous n’avons pas prévu cela, le chauffeur, ayant remarqué notre embarras, nous fait descendre poliment à la prochaine station. Nous sommes contraints d’acheter un sandwich pour faire de la monnaie. Nous reprenons le chemin vers Steinway. Le trajet est agréable car nous avons la latitude d’admirer d’autres sites de New York. Beaucoup de verdure et des gens qui jouent au base-ball. Par la même, nous traversons le majestueux pont de Brooklyn qui relie Manhattan à Brooklyn. Sa construction a débuté en 1869. Ce pont est le plus long du monde. Il faut au moins vingt minutes pour le traverser d’un bout à l’autre. Pour ne pas se tromper de station, nous demandons à une dame si cela ne la dérangerait pas de nous faire signe une fois parvenus à Steinway. C’est le deuxième arrêt après la fin du pont. Avant d’arriver, nous avons imaginé une ambiance similaire à celle de Barbès en France. Finalement, aucun signe ostentatoire ne distingue Steinway du reste de New York. Saut peut-être la présence d’une petite mosquée, au tout début de l’Avenue. Mais c’est en abordant les gens qu’on parvient à se rendre compte que nous avons affaire à des Arabes dans la grande majorité. Le premier homme auquel nous parlons est un Egyptien. Il tient un magasin juste en face de la mosquée. Nous nous adressons à lui en arabe et lui demandons où se trouve le café où se rencontrent les Algériens. «Vous allez tout droit, c’est du même côté», précise-t-il. En parcourant le trottoir, nous remarquons la même hygiène des lieux. Les enseignes des magasins sont transcrites en arabe comme c’est le cas du café des Egyptiens s’appelant «Maqha layali el hilmia». D’autres commerces «sentent» aussi l’arabité, comme cette petite librairie gérée par un Syrien d’où se dégage des verset coraniques. A l’intérieur, sont vendus des cassettes et des livres ayant trait à la religion musulmane. Un peu plus loin, de l’intérieur d’une gargote fusent aussi des versets du Coran. Un buraliste vend des cartes de téléphone à 5 dollars qui seraient destinées aux Arabes puisqu’en les utilisant, les orientations de l’opératrice sont données en anglais et en arabe. Ici, sont distribués gratuitement plusieurs journaux en langue arabe dont certains sont des éditions américaines de journaux conçus en Egypte. On trouve notamment un magazine féminin «Sayidati» et des journaux politiques d’opposition dont l’un s’en prend au président égyptien «accusé» de vouloir être président à vie. Mais ces publications en dépit de leur gratuité, ne semblent pas intéresser grand monde. C’est du moins ce que nous avons constaté. Un autre signe que nous sommes dans un quartier maghrébin : dans un magasin d’habillement pour hommes, nous écoutons des chansons de Julio Eglesias. Dans le reste de l’Amérique on ne peut entendre que des chansons américaines ou du moins anglaises : du jazz, du rock, du reggae… Mais il n’y a aucune trace d’un autre langue. Les boucheries de cette ruelle portent toutes sur leurs enseignes le mot «Hallal». Nous tombons aussi sur un restaurant qui emploie des Américains mais dont le patron est un Kabyle de Tizi Ouzou. Malheureusement, au moment de notre passage, le patron est absent. La serveuse nous dit que si nous voulions le rencontrer, il faudrait revenir en soirée. Ce restaurant organise chaque samedi un dîner traditionnel : du couscous suivi d’une soirée musicale typiquement algérienne.A quelques dizaines de mètres de là, nous lisons sur une grande enseigne : «Café le Méditerranéen». Nous accédons à l’intérieur. Ici, il est environ 11h (17h algérienne). Un écran géant diffuse un match de football : USM Blida – NA Hussein Dey.
Aomar Mohellebi
