Meule de pierre et presse de bois

Partager

Réalisé par Rachid Oulebsir

De vieilles maisons du Moyen-Age, des agoras séculaires, des mausolées sans âge, et surtout, des moulins à sang : pressoirs actionnés par des meules de basalte triturant l’olive à la vitesse d’un cheval pour fabriquer des huiles dorées, vert jade, lourdes et onctueuses comme du miel. La récolte des olives a été retardée par les perturbations atmosphériques. Nous sommes en période de Mirghou dans le calendrier agraire kabyle, une durée de sept jours qui précède la fameuse journée de Aretal, marquée en principe par les gelées et le froid intense.Les moulins tournent encore en cette fin de février. Les pressoirs traditionnels situés tous en montagne, à la cadence d’un cheval, d’autres, modernes, disséminés dans les gros bourgs de la vallée, à la vitesse des centrifugeuses électriques.Nous remontons, ce matin du jeudi 18 février, malgré le lourd manteau de neige, vers Taghalat, le plus haut village des At Mélikèche pour visiter un moulin traditionnel. Le chemin de wilaya n° 7 vient d’être dégagé par les engins de la commune, mais ses accotements demeurent encore encombrés par la poudreuse. Le ciel est encore lourd. La neige ne tombe plus que sur les crêtes qui dominent les versants septentrionaux d’Illiltène. Elle menace, cependant, de revenir à tout instant.’’Nous aurions pu remonter par Akbou, mais la route est encore impraticable, coupée par la neige vers Iazouzène. Le chemin par Allaghane n’offre aucun intérêt, se ce n’est la traversée des oliveraies qui surplombent les ruines du limes romain ’’Tablastensis’’ réduites en terrain vague. Cette garnison aurait été construite à la même époque que ’’Bida Municipum’’, l’actuelle Djemaa n’Saharidj et le fortin du Piton d’Akbou’’, affirme Hamid Boukrine, notre guide du jour.La sortie nord de Tazmalt est encombrée. La chaussée étroite, défoncée par le creusement d’une canalisation de gaz, se rétrécit encore dans le hameau d’Idhrikène, ne laissant le passage qu’à un seul véhicule. Il n’y a pas grand monde sur la route, à l’exception de quelques adolescents conduisant des bourricots chargés de bouteilles de gaz. Sur notre gauche la route entre dans la wilaya de Bouira. Elle mène vers la haute Kabylie à travers At Hamdoune, la cité dont le fondateur serait originaire du M’zab, et Ivehlal, le village des marabouts descendant de Bahloul-ou-Assem, un Almoravide venu de Rio d’Oro l’actuel Sahara occidental. Nous prenons la route de droite. Le chemin pentu remonte en serpentant à travers le tapis blanc, côtoyant dangereusement le ravin de l’Assif-ou-Guentour qui renvoie les échos de chutes de roches que le poids de la neige arrache aux flancs des collines.La voiture ahane dans la longue côte de Nezla. Après le hameau de Boubelodh composé d’une dizaine de maisons à terrasses et à toitures de tuile romaine, nous entrons dans la commune d’At Mélikèche.En face, sur notre droite, des éboulements monstrueux ont dessiné sur la face de la colline de hautes colonnes d’argile rougeâtres, des orgues herculéennes qui découpent le coteau parsemé d’une moucheture d’oliviers ébouriffés par la main froide de la neige.

L’hadj Amar, visité par des centaines de pèlerins, donne une certaine respectabilité à ce village de deux mille habitants. L’eau de la source Voudraâ est recherchée pour ses bienfaits pour la santé notamment par ceux qui souffrent de maladies rénales.’’Là-bas derrière les pains de schistes, il y a les ruines de Sengou, un village envahi par des crapauds venimeux et déserté par ses habitants il y a plus d’un siècle, comme le raconte une légende locale’’, dit Hamid. Devant notre étonnement, il ajoute : ’’Les ruines existent bien et une association de jeunes de la localité de Rodha, manifeste beaucoup d’intérêt à cette histoire. Elle aurait retrouvé du côté de Draâ El Mizan, la trace des descendants de cet ancien hameau abandonné’’.Déchiquetés, brisés, emportés par des éboulements à hauteur du lieudit Sikh Ath Mouhou, les oliviers centenaires d’Iharqan offrent un panorama de désolation de part et d’autre de la grande rivière Assif ou Guentour, qui coule dans un bruit assourdissant. Les figuiers dénudés et les frênes à l’allure souffreteuse sont plus adaptés à l’altitude, la neige ne leur a fait aucun mal.Il est 13 heures. Nous entrons dans le hameau d’Idamouthène. Un panache de fumée monte d’un moulin à olives. La cour est encombrée de piles de sacs d’où suinte un jus noirâtre. Des bidons de plastique bleus et verts trônent sur des tas d’olives trop mûres. ’’C’est l’huilerie de Haddad Mohand Sghir. Elle tourne à deux presses motorisées. Il a encore de nombreuses journées de travail. L’ancien pressoir des Merabtine, mû par un bœuf, est à l’abandon. Le voilà, en contrebas, avec la toiture effondrée. Personne ne s’intéresse à ce trésor, qui a fabriqué l’huile de toute la région durant des décennies’’, remarque Hamid.Nous prenons avec nous un paysan de la localité désireux de se rendre au mausolée de Sidi El Moufaq, à l’extrême est de la commune de montagne, pour y déposer une obole. Il nous raconte en cours de route la vie des villageois durant l’épisode neigeux jamais vécu par la région depuis un demi-siècle.’’Nous l’avons échappé belle, mes enfants et moi-même. Le toit de notre maison s’est partiellement effondré le troisième jour des intempéries. La tempête nous a surpris dans la nuit du mardi. Le premier jour, mercredi 26 janvier, notre bonheur était à son comble. On n’avait jamais vu pareille épaisseur de neige. Des toisons (Ilissen) d’un blanc immaculé, recouvraient les villages, les monts et les vaux. Pour nous autres paysans, qui avons longtemps souffert de la sécheresse, c’était de l’or qui tombait du ciel ! Notre joie n’avait d’égale que notre insouciance. Les enfants jouaient dans la poudreuse. Les adultes immortalisaient des souvenirs sur des kilomètres de pellicule.Le deuxième jour nous avons pris peur. La tempête est revenue plus forte, plus dense. La neige a empêché certaines portes de s’ouvrir. Des toitures ont cédé. Les routes coupées ont isolé des hameaux entiers privés d’alimentation et de gaz, unique source de chaleur. Tout le monde a été pris de court. Certains n’avaient pas la nourriture d’un jour. Ni bois ni gaz pour se réchauffer. Il faut dire que nous avons délaissé les règles de conduite des ancêtres. Tant pis pour nous. La coupure du courant électrique a paralysé tous les services communaux. Nul ne pouvait aider son prochain’’.Lemdjaz, Tahemamt et Tiharqatine, trois hameaux de la rive gauche de la bruyante rivière, sont encore partiellement couverts de neige. Une antenne de téléphonie mobile trône sur Lejva-Tewrirt, un col chauve qui domine des oliveraies tourmentées par la bourrasque. Après une longue remontée en large boucle nous entrons au village d’At-Ouamar.Sur la droite avant la grande source du village, se trouve Aharoun-Tervaht, un endroit où étaient immolés, autrefois, les animaux des sacrifices rituels. ’’On raconte, justement, que lors d’une tempête de neige, similaire, qui avait enseveli des villages entiers durant des semaines, nos ancêtres avaient sacrifié un bœuf à cet endroit. On avait alors, dans la hâte oublié un viscère. Après la fonte du tapis neigeux, l’intestin était accroché à une branche. On s’aperçut que la cérémonie s’était déroulée sur un olivier de la variété Aharoun, enseveli dans la neige, d’où le nom donné à cette placette’’, raconte El Hassen, le vieux montagnard. Des grappes de jeunes jouent au lancer de boules de neige. Le geste est lourd. Les silhouettes sont difformes. Godillots, bottes de caoutchouc, burnous, bonnets et capuchons, tout est bon pour se protéger du froid. Le souci du paraître est secondaire par cette rigueur jamais enregistrée par la mémoire collective.At Ouamar est un gros bourg de montagne, avec toutes les commodités de la ville : poste, téléphone, infirmerie, collège pour les adolescents et école primaire. Le mausolée de Si L’hadj Amar, visité par des centaines de pèlerins, donne une certaine respectabilité à ce village de deux mille habitants. L’eau de la source Voudraâ est recherchée pour ses bienfaits pour la santé notamment par ceux qui souffrent de maladies rénales.C’est le seul village à notre connaissance où l’on pratique encore les soins des varices et des goîtres par l’utilisation des sangsues (Ideghran).Les sangsues sont des vers carnivores plats utilisés autrefois par les médecins et les barbiers pour réduire les oedèmes par la pratique de la saignée. Un bassin où prolifèrent les sangsues existe encore près du mausolée de Si L’hadj Amar, même si les visiteurs qui s’adonnent à cette pratique de soins sont plutôt rares. L’usage des sangsues est redevenu de mode en Europe. Elles sont élevées et exportées vers les USA où elles suscitent un grand intérêt scientifique.Tissirt-At-Ali, un vieux moulin à eau installé sur le gué de l’Aguentour entre At Ouamr et Tineswine est à l’arrêt.Le dernier meunier qui y a travaillé l’a quitté dans les années soixante-dix. C’est, de nos jours, uns simple vestige d’une époque lointaine. Seule l’huilerie subsiste encore. Elle a été cependant mécanisée. El Hassan, le dépositaire de la mémoire régionale l’évoque avec une pointe de nostalgie trahissant une jeunesse heureuse.’’Une grande roue à godets (essania) mue par la coulée de l’eau provenant du lointain et mystérieux Tamgout imprimait un mouvement monotone à un rouet vertical denté en bois dur (Erriach) qui entraînait la meule supérieure (Agharef). Celle-ci broyait le blé en tournant sur la meule inférieure fixe dans une cuve à piste circulaire (El Hodh). Nous venions regarder et nous émerveiller devant le mouvement prodigieux du moulin !’’.A l’entrée de Tinessouine, une foule de visiteurs se dirige vers la maison de la famille Kharoub. ’’Le vieux Hcène est décédé. L’information a été affichée à Tazmalt sur le mur de la mosquée’’, affirme Hamid. Nous nous arrêtons pour présenter nos condoléances comme le veut l’usage.Nous remontons vers Amarâi, où Ali Melaâb nous apprend que Timechret, le sacrifice rituel aura lieu demain samedi. ’’Nous égorgeons une dizaine de bêtes pour prendre en charge les pauvres de notre village. La même cérémonie aura lieu à Aguentour et At Ouamar’’. Taâchourt de cette année a pris rendez-vous avec la neige. Arrivée sous un lourd manteau blanc, elle ne donnera pas lieu aux processions habituelles : les agoras seront froides, les mausolées moins fréquentés. Avec un caractère de fête privée familiale, sa célébration se déroulera, en général, intra-muros, même si dans quelques villages on a décidé de braver la rigueur du temps. C’est le cas, cette année, de Aguentour, At-Ouamar et Amarâi, où elle sera célébrée dans des agoras à valeur symbolique avec Timechret, un rituel sacrificiel de portée propitiatoire. De nombreuses bêtes seront immolées sur le tapis de neige. L’offrande de lots de viande fraîche aux familles démunies est l’objectif de ce sacrifice rituel. Il consolide les réseaux de la solidarité mis à mal par la pauvreté et la trame du tissu communautaire usé par la crise sociale.At-Oureqqas est un hameau d’une vingtaine de maisons, prolongé sur sa gauche par Ivejiwène, habité par trois familles qui revendiquent une ascendance romaine. La neige a déjà modelé les démarches. On fait attention où on met les pieds, les glissades et les accidents des premiers jours de tempête sont oubliés.

Déchiquetés, brisés, emportés par des éboulements à hauteur du lieudit Sikh Ath Mouhou, les oliviers centenaires d’Iharqan offrent un panorama de désolation de part et d’autre de la grande rivière Assif ou Guentour, qui coule dans un bruit assourdissant.Après les virages de Tighilt Amara, encombrés par des amas de neige, transformés en congères, nous abordons Tighzert Iqedâane, endroit symbolique de l’histoire nationale. “C’est là que fut tiré le premier coup de feu qui a déclenché la guerre de Libération nationale dans notre région. La première embuscade que les moudjahidine ont tendue à une colonne de l’armée française”, affirme El Hassen.La circulation est difficile. Nous nous arrêtons au croisement de tout usager venu en sens inverse. A l’entrée d’Agouni Goroiz, le chef-lieu de la commune, nous rencontrons monsieur le maire. “Lors de la première tempête de la fin janvier, nous avons souffert de l’enclavement. Nous avons réussi, après de gros efforts, à dégager les routes, ravitailler les villageois en gaz et faire les démarches nécessaires pour rétablir le courant électrique. L’APC n’a fait que son devoir. La situation est de loin meilleure aujourd’hui. La deuxième tempête ne nous a pas surpris. Les citoyens ont pris leurs précautions, et c’est tant mieux”, affirme Abdeslam Houd, premier magistrat de la commune. “Il n’y a pas de moulin à Taghalat, le village du chahid commandant Mira Abderrahmane. Par contre, il y en a à Tighvirt, plus à l’est et plus bas”, nous informe un citoyen de Tighzert. La route redescend vers Tavouda. Une camionnette décharge des bouteilles de gaz. Des badauds se bousculent à proximité de la boutique de Ben Abdellah, l’unique magasin qui donne sur la route bitumée. Deux équipes d’adolescents se battent hardiment à coups de boules de neige, parfois fourrées de mottes de terre ou carrément d’une pierre. Un marchand ambulant de poulets fait de bonnes affaires. De nombreux gallinacés vendus sont immédiatement égorgés sur la neige. A l’occasion de taâchourt, les Kabyles consomment beaucoup de viande. Les filets rouges coulant sur le tapis blanc constituent une icône des mystérieuses légendes berbères.Iâgachène, le village de Mohand Saïd Amlikèche, poète de la résistance à la colonisation française, compagnon de Boubeghla, évoqué par Mouloud Mammeri, est un énorme bourg filiforme à l’est de la commune, étendu jusqu’à Tala Tighilt, dernier hameau du Arch At Melikèche. Tajmaât, l’agora du village est quasiment vide, fait inhabituel pour ce village de 2 000 âmes. Un homme d’un certain âge dégage à la pelle la neige accumulée sur sa terrasse. Les toitures ont perdu leur couleur. Les vieux troncs noueux d’oliviers ont été fendus et déchirés comme de vulgaires étoffes. Le manteau de neige tiendra encore longtemps. Le gel lui formera une carapace de glace que seul le soleil d’avril fera fondre. Le mausolée de Sidi El Moufaq est très peu fréquenté. Les visiteurs ne peuvent s’aventurer par ce temps inhabituel sur des routes dangereuses. Seules quelques vieilles inconditionnelles traînent vers ce lieu symbolique de leur mémoire leurs fragiles silhouettes. Les marabouts de l’Agraw, le cercle des bénédictions, ne se réuniront que demain pour dire les suppliques coutumières et recevoir les oboles (waâda) des pèlerins.Après Lemsela et Ighil Ieqrar, deux villages qui se touchent pour n’en faire plus qu’un, la route serpente, redescendant en pente raide vers Tighvirt. Des filets de fumée blanche montent des cheminées. Un rayon de soleil perce l’épaisse gangue de nuages gris, présageant une éclaircie future. L’oliveraie de Tiza Charikh est dévastée par la neige et le gel. Des troncs en apparence solides sont déracinés, fêlés comme de fragiles poteries d’argile. Le vent se lève de l’ouest. Des rafales décollent des flocons pour les semer à tout va. “Il faudra beaucoup d’argent pour élaguer ces milliers d’arbres et sortir tout le bois mort. Les paysans se remettront forcément au chauffage au bois. L’Etat devra mettre la main à la poche pour que les paysans restent chez eux et ne rejoignent pas le train de la ville”, dit Hamid, notre guide, quelque peu fatigué par le périple vertigineux et cette lumière aveuglante que renvoie le tapis neigeux. Il est quatre heures, le froid est mordant. Le moulin de Ziane Hamid est notre dernière escale. Une petite maison isolée en contre-bas de la route, propre et ordonnée. La fumée qui monte du toit, en volutes perturbées par le vent, indique que le petit atelier est en marche. Hillal, un artiste dramaturge natif du coin est là pour faire les présentations d’usage. Il aime la gelée de caroube préparée à l’huile d’olive et le propriétaire en fait un label de son moulin. La cour est en béton légèrement inclinée pour permettre l’évacuation des margines. Les tas d’olives sont séparés par des murettes de parpaing. L’atelier est un peu sombre. La meule, retenue au plafond par un axe, est actionnée par un cheval relié à cet axe par un attelage horizontal. L’animal en tournant autour de la cuve entraîne la meule. On y met alors les olives qui sont broyées. Par une ouverture à la base de la cuve (el hodh), on sort la pâte des grignons (pulpe, noyaux). Un jeune homme aide El Hamid. Il libère les scourtins (sacs ronds et plats tressés avec de la fibre de coco) du grignon, pour les remplir à nouveau de pâte d’olive fraîchement triturée. Le cheval blanc tourne à la voix de son maître. Le moulinier installe les sacs plats sur la presse, taâssart. L’huile de la première pression s’écoule dans un bac. C’est la meilleure huile, elle est dite vierge. El Hamid nous fait goûter avec un morceau de galette chaude. “Aucune comparaison avec l’huile des moulins électriques”, dit Hillal.Une fois bien compressés, les scourtins sont ôtés des chapelles, les grignons (noyaux) sont entreposés dans un coin du moulin : ils seront brûlés pour actionner la chaudière ou offerts aux paysans quand la quantité est importante. Autrefois, ils étaient vendus pour une usine de Béjaïa qui fabriquait du savon. Dans les pays de la rive nord de la Méditerranée, les grignons sont vendus à des usines pour être traités en farine : elle servira au fleurage des boulangers (le fleurage consiste à saupoudrer de la farine de grignons sur la pelle à enfourner les pains afin que la pâte ne colle pas). L’huile s’écoule doucement dans différnents bacs de décantation alignés, remplis d’eau chaude. Plus légère, l’huile reste en surface. Recueillie à la “feuille” (grosse cuiller plate et large avec manche), elle est entreposée dans des bidons que les paysans récupèrent, après que le moulinier ait prélevé sa part, un septième du volume global. L’atelier de Ziane est petit, avec une seule meule et une seule presse. Les vieux moulins font partie de l’identité régionale, les paysans y sont attachés et leur accordent une valeur sentimentale exagérée. L’analyse froide des spécialistes leur attribue un allongement de la durée de la campagne de trituration, une augmentation du coût de production donc du prix de l’huile sur le marché et une rapide détérioration de la qualité du produit marqué par une forte acidité même si le goût et la saveur de départ peuvent faire illusion. Ce n’est pourtant pas notre impression après dégustation ! Le sympathique moulinier nous offre une ultime dégustation de la gelée de caroube. Nous quittons avec regrets la convivialité et la chaleur du petit moulin à 5 heures trente. La lumière du jour faiblit. Le froid est insupportable. Nous redescendons vers la vallée par Tassargant, cinq kilomètres de lacets, entre les monceaux de neige.“Les paysans n’ont cure des explications techniques pour des raisons historiques, culturelles et sentimentales, ils préfèrent le vieux moulin de pierre et de bois. Le pressoir est actionné par un cheval, un mulet ou un bœuf, l’huile est récupérée dans des barriques de bois, un rituel de dégustation quotidienne de l’huile nouvelle est entretenu en permanence durant toute la campagne. On dévore des kilos de figues sèches trempées dans l’huile vierge, on offre des galettes bien chaudes et on ne se soucie pas du coût de production”, affirme notre guide du jour. C’est ça l’identité amazighe. Le bonheur n’a pas de prix.

R. O.

Partager