Alors qu’un avant-projet de loi visant à mettre les cliniques privées sous tutelle publique est élaboré, des enquêtes menées sur le terrain par des praticiens inspecteurs ont constaté des « dérives » et des « dysfonctionnements » absolument graves.
Dans une correspondance de la tutelle du 24 septembre dernier adressée aux walis et directeurs de la Santé et de la population des wilayas et relative à l’organisation des activités dans le secteur privé de la santé il est souligné que suite aux « différents contrôles menés dans ces structures, il a été constaté des infractions liées aux conditions de fonctionnement ainsi que des pratiques perverses en matière d’exercice de l’activité complémentaire ».
Cette dernière activité, instaurée en 1998 est qualifiée de « source de beaucoup de dérives dans son application », suite au « laxisme » des gestionnaires dans le contrôle de l’exercice de cette activité.
Le ministre qui rassure que le principe de cette activité « n’est pas remis en cause, mais vient même d’être consacré par l’ordonnance portant statut général de la fonction publique », ajoute par ailleurs que ces effets pervers relevés ne seront plus tolérés et c’est là la tâche à laquelle s’attelle actuellement le ministère chargé de la santé avec le concours du conseil de déontologie médical pour contribuer à la moralisation de la profession.
Le ministre de la Santé n’a pas épargné les praticiens spécialistes du secteur privé conventionnés avec le secteur public en les accusant de plusieurs dérives.
« Certains médecins spécialistes du secteur privé conventionnés avec le secteur public n’hésitent pas à évacuer délibérément des malades qu’ils sont censés soigner dans le secteur public avec lequel ils sont conventionnés vers leurs structures privées d’attachement, plus grave encore, ils vont jusqu’à les ré- évacuer vers les structures publiques en cas de complications graves allant jusqu’au décès du malade ».
Le réquisitoire ne s’arrête pas là puisque l’on parle aussi de « malades traités illégalement par des spécialistes du secteur publique de la santé au profit occulte de certains structures privées, malades qui leur sont orientés, par ces derniers, en leur fournissant des soins et des produits pharmaceutiques gratuitement ».
Outre les réseaux croisés de trafic de malades entre hôpitaux publics et cliniques privées, les contrôles effectués par la tutelle ont relevé que des interventions chirurgicales dans beaucoup de cliniques privées « sont réalisées sans traçabilité ; pas de protocoles opératoires ».
Pour bannir toutes ces pratiques dont les malades sont les premiers à payer la facture, de nouvelles dispositions visant à remettre de l’ordre dans ces structures privées sont déjà tracées par la tutelle qui menace que toute infraction fera l’objet de sanctions allant jusqu’a là fermeture de la structure.
Parmi ces dispositions, il est noté que toute clinique doit assurer un service permanent et continu et se doter d’un règlement intérieur.
Aussi, les recrutements des personnels doivent se faire dans la légalité et la liste des employés, accompagnée de diplômes et titres, doit être disponible au niveau de la Direction de santé de wilaya.
Chaque malade admis est mentionné sur un registre des entrées et des sorties et doit disposer d’un dossier médical complet.
Outre ces mesures de contrôle direct des cliniques privées par les autorités sanitaires, de nouvelles règles touchent les spécialistes du secteur public exerçant l’activité complémentaire en les sommant de remettre à leurs administrations respectives l’emploi du temps de leurs activités hospitalières.
Tout compte fait, ces nouvelles mesures du premier responsable du secteur de la santé vont peut être mettre fin à l’anarchie qui règne dans les cliniques privées à condition qu’elles ne connaitront pas le même sort que les directives relatives à la restauration et à l’hébergement des malades.
Nadir Touati
