l La caméra de “Envoyé spécial’’, le magazine d’information de France 2, est allée fouiner dans la misère de la Montagne, dans la banlieue d’Alger, pour esquisser le profil du néo-kamikaze made in Algeria. Et bien entendu, la caméra est d’abord allée à la recherche de la famille et des amis du premier kamikaze formaté puis endoctriné par Al Qaida-Maghreb, avant qu’il n’aille s’écraser contre le Palais du gouvernement, le 11 avril dernier.
L’équipe de France 2 ne réussira à interviewer aucun membre de la famille de l’auteur de l’attentat suicide. Agacé par le harcèlement de la caméra, l’un de ses jeunes frères, une douzaine d’années à peine, s’emportera : « Foutez-nous la paix ! ».
La colère de cet enfant était franche et spontanée. Il revenait de la corvée quotidienne : aller chercher de l’eau pour les besoins de la journée. Il ne doit pas comprendre que l’on s’intéresse plus à son frère qu’au jerrican d’eau qu’il traîne comme un boulet, pendant que les enfants de son âge sont en classe.
Le journaliste se contentera de faire parler d’autres jeunes qui connaissaient plus ou moins le kamikaze, avant de se rabattre sur les clichés classiques : la mosquée et la drogue. Sa caméra filmera un groupe de jeunes se partageant une ‘’rouina’’ (barbituriques écrasés et mélangés vraisemblablement à des céréales), juste à côté de la mosquée. Un barbu, la cinquantaine, s’approche de la caméra pour expliquer le désarroi des jeunes. « Vous savez, même à mon âge, je suis prêt à quitter le pays », dira-t-il.
La caméra de France 2, qui jusque-là ‘’tourne dans le cliché’’, réussira à enregistrer une phrase qui donne à réfléchir : « Je suis prêt à me faire péter ! ». L’affirmation est d’un jeune, la trentaine, filmé en train de rafistoler tant bien que mal un taudis qu’il partage avec son frère. Il dira comprendre que des jeunes se transforment en kamikazes. Il expliquera qu’il en ferait de même, si on lui assurait de quoi survivrait sa famille.
T.O.A.