Fadhma Aït Mansour Amrouche

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l Marguerite-Fadhma Aït Mansour Amrouche (1882 à Tizi Hibel en Kabylie – 1967 en Bretagne), mère des écrivains Jean Amrouche et Taos Amrouche, était poète et écrivain Kabyle. La mère de Fadhma, Aïni Aïth Larbi Ou-Saïd, née dans les environs de Taourit Moussa en Haute Kabylie, est mariée très jeune à un homme beaucoup plus âgé, avec lequel elle a deux enfants. À la mort de son mari, Aïna décide de vivre seule avec ses deux enfants, et refuse l’offre de son frère Kaci de revenir habiter chez sa mère, comme c’est la coutume. Son frère la renie alors : mise en quarantaine par sa famille, elle ne peut même pas assister aux funérailles de sa mère. Aïni et un homme de son voisinage, qui s’avère être de la même famille que son ancien mari, tombent amoureux l’un de l’autre, Aïni tombe enceinte. L’homme, déjà fiancé avec une femme d’une famille importante, refuse de reconnaître la paternité. Aïni est exclue de la « communauté », et accouche seule dans sa maison de Tizi Hibel, avec ses deux jeunes enfants. Dans ce contexte, naît Fadhma Aït Mansour, fille illégitime. Toute son enfance, au village, elle subit la méchanceté des villageois, avec de nombreuses violences. En 1885, sa mère la confie aux Sœurs des Ouadhias : elle y est persécutée par les religieuses. Sa mère se remarie. En 1886, Fadhma entre au pensionnat laïque de Taddert Ou-Fella près de Fort National. Elle passe son certificat d’études en 1892. Elle retourne ensuite à son village près de sa mère, qui lui apprend les coutumes et les savoirs traditionnels, notamment chants et poèmes kabyles. Lorsque sa mère meurt, elle quitte définitivement son village, et part travailler à l’hôpital des chrétiens de Ait Menguellet. Les Sœurs blanches, catholiques, ont une grande emprise sur elle, et finissent par la convertir. Elle reçoit plus tard le nom catholique de Marguerite. Elle rencontre un autre Kabyle catholique converti, originaire d’Ighil Ali en Basse Kabylie, Antoine-Belkacem Amrouche, avec lequel elle se marie, alors qu’elle a seulement 16 ans et lui 18. Ils ont ensemble huit enfants: Paul-Mohand-Said (1900-1940), Henri-Achour (1903-1958), Jean-El-Mouhoub (1906-1962), Louis-Marie (1908-1909), Louis-Mohand-Seghir (1910-1939), Marie-Louise-Taos (1913-1976), Noël-Saadi (1916-1940) et René-Malek (1922-). La famille Amrouche, après avoir habité quelque temps à Ighil Ali chez les beaux-parents de Fadhma, s’installe à Tunis en Tunisie. Fadhma y passe la majeure partie de sa vie, mais ne cesse de penser à sa Kabylie natale :  » J’étais toujours restée en Kabylie, malgré les quarante années que j’ai passées en Tunisie, malgré mon instruction foncièrement française… » En 1930, elle entreprend, avec sa fille Taos et son fils Jean, l’écriture et la traduction en français de ces chants berbères, conservés jusque-là par la tradition orale. Belkacem, son mari, meurt la nuit du 27 décembre 1958. Elle vit de nombreux autres décès dans sa famille, et compose elle-même des poèmes pour ses enfants partis trop tôt. Ces contes sont mis à l’honneur dans les Chants berbères de Kabylie de Jean Amrouche en 1939. Ils sont également repris en partie dans Le Grain magique par sa fille Taos Amrouche, publié en 1966. Fadhma décède le 9 juillet 1967 à l’hôpital de Saint-Brice-en-Coglès en Bretagne (France), à l’âge de 85 ans. En 1968, son autobiographie Histoire de ma vie est publiée à titre posthume. À travers ce récit, Fadhma peint le combat de la femme kabyle du XXe siècle, sa place entre la Kabylie, sa langue et la langue de l’empire colonial, dans cette société kabyle qui lui impose de nombreuses contraintes, sa religion, pourtant exercée discrètement, mais qui la force à l’exil, les coutumes au nom desquelles cette même société l’exclut, en la punissant durement déjà avant même sa naissance, mais aussi cette culture berbère, et ses chants folkloriques qui lui « avaient permis de supporter l’exil et de bercer sa douleur. »

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