Dans les méandres de la communication politique

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Les hommes politiques ont ajusté leur comportement et discours aux nouveaux outils médiatiques apparaissants ; la radio, la télévision, le sondage et Internet récemment… Qu’est-ce que la communication en politique? Est-ce un échange ? Est- ce une propagande ? Est-ce un retour d’écoute ? Est-ce de la séduction par le verbe et la manière? La communication a-t-elle changé la politique ?

Telles sont les questions auxquelles a essayé d’apporter des éléments de réponses Christian Delporte, professeur d’histoire contemporaine à l’université de Versailles Saint-Quentin, et directeur du Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, lors d’une conférence- débat animée, jeudi dernier, au Centre culturel français(CCF) d’Alger.

Auteur de plusieurs ouvrages : Intellectuels et politique en France au 20ème siècle (1995) ; Les journalistes en France, de 1880 à 1950 et de 1950 à nos jours (1999) ; Histoire des médias en France, de la grande guerre à nos jours (2003) ; Images et politique en France au 20ème siècle (2006), La France dans les yeux, une histoire de la communication politique de 1930 à aujourd’hui (2007), le conférencier, très à l’aise face à la nombreuse assistance présente, répondra aux questions posées avec minutie et détails après avoir pris soin, au cours de la conférence, de faire visionner des photos d’hommes politiques français depuis les années 30 : Mendès France, de Gaulle, Mitterrand,…ainsi que la première interview télévisée de l’actuel Président français ; Nicholas Sarkozy, à l’âge de 23 ans.

D’emblée, M. Delporte s’est interrogé sur l’incidence des médias et de la communication sur les hommes politiques et leur manière de faire de la politique. « De nos jours, la communication des politiques est à la mode,… Communiquent-ils bien, pour autant ? » Les hommes politiques ont recours à la « séduction », à la « transparence », « dévoilent une partie de leur vie de famille »,…Ils sont appelés des peoples politiques. « Pour eux, la communication est une stratégie pour arriver, rester au pouvoir », expliquera-t-il avec des exemples illustratifs. Dans le souci de placer la problématique du thème de sa conférence dans le contexte temporel, l’orateur a, depuis les années 30, réparti son exposé en trois chapitres : “La découverte des techniques de communications (1930- 1960)”- “Point Carré en 1927-” ; “Les années de conversions aux techniques de communications (1960- 1980)” ; “Le temps de la culture de communication (de 1980 à nos jours)”.

Précisant que les techniques de communication sont conçues pour répondre à des exigences immédiates, le conférencier affirmera que le 20e siècle a bouleversé l’expression politique. « Depuis les années 30, il y a eu des appels aux parlements et groupes d’opinions pour triompher, …Sous la 3ème République, l’homme politique s’est aussi exprimé par la plume » ; dira-t-il.

Les hommes politiques ayant découvert la popularité vers le début des années 50 et le sondage en août 1960 ; la TV, la radio, la publicité et les sondages ont été d’usage lors des campagnes électorales – Ce que de Gaulle avait très bien compris à son retour au pouvoir, a-t-il souligné au passage -; Il y avait eu recours face à l’opposition qui, plus tard, a mis le Président en ballottage. Avec Pompidou qui a pratiqué l’ouverture, c’est la rupture ; c’est la « peopolisation » qui s’annonçait.

Vers les années 80, le désintérêt manifesté par les populations face à la politique a amené les hommes politiques à opter pour le discours à la diversité des opinions. Par ailleurs, concernant la démocratie qui elle-même a succombé aux effets des artifices de la communication, l’orateur dira : « La démocratie s’est profondément transformée depuis un demi-siècle ; elle s’est laissée séduire ». Faisant le parallèle entre la communication et la politique; qui, selon lui, sont respectivement « Image » et « Action », le conférencier a affirmé que « l’abus de la communication risque d’abîmer les différents mécanismes ; et de la communication et de la politique.

Ce qui inéluctablement aura des incidences sur la démocratie ». L’abus de la communication et des techniques de communication réduira la politique à une bataille d’images. Et pour la démocratie ça sera… une véritable catastrophe » !, avertira-t-il. Sans nul doute, la communication a changé l’attitude des hommes politiques ; pourtant, ses techniques ne sont qu’un instrument entre les mains des responsables publics. La communication, si elle s’est sensiblement imposée, c’est que la démocratie, elle-même, s’est profondément transformée…Au fait, quelle est la meilleure technique de communication dont les hommes politiques pourraient faire usage sans, toutefois, porter atteinte aux préceptes de la démocratie ? … C’est peut-être là que l’art de faire de la politique prend véritablement tout son sens ; il inculque à l’homme politique l’esprit de la « prévision » ainsi que la culture de la « planification » qui, de fait, engendreront une action politique à même de renforcer les soubassement de la démocratie.

Ahmed Kessi

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