L’oiseau à l’aile brisée

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Après une série de succès depuis ses premières apparitions au début des années 80, Abdelkader Bouhi, un des meilleurs chanteurs qu’a enfanté la baraka de Yemma Gouraya, est rattrapé par une terrible maladie.

Depuis sa première cassette avec des chansons phares dont un hommage à l’exilé défunt Slimane Azem, Bouhi, qui a émergé sous le nom “Athmathen”, groupe qu’il a créé avec son propre beau frère, n’a cessé de voir le cercle de ses fans grandir comme en un effet de boule de neige. Des thèmes de l’amour, de l’exil, des maux de la société en passant par la cause identitaire, l’élève de Si Sadek Abjaoui honore sa ville natale en traçant son chemin avec une touche propre à lui. En gardant jalousement la Kabylie bien de chez lui, il a contribué à promouvoir la chanson avec une imprégnation musicale bien mariée à ses verbes.

Après plusieurs décennies sacrifiées au seul service de l’art et de la culture, Bouhi chute eux enfers et laisse à contre-cœur sa guitare pour mener une bataille sur un autre front. Celui de se battre contre un destin qu’il n’a jamais choisi, un malheur venu d’en haut, qui le contraint en combat de David et Golliath. Les oiseaux se cachent pour mourir. C’est le sort de plusieurs artistes qui tombent après le succès dans l’oubli et la tristesse comme de vulgaires vagabonds.

Cloué au lit et isolé de la scène publique, la vedette doit affronter aussi de folles rumeurs qui lui assènent un autre lot de souffrance.

La tumeur qui ravage son estomac lui a coûté une lourde opération dans un grand hôpital d’Alger avec un séjour hospitalier de plusieurs jours. Donné comme mort, Bouhi, malgré la faiblesse et la douleur s’est efforcé de rassurer son public dès sa sortie de l’hôpital en clamant qu’il est toujours vivant et stoïquement prêt à reprendre son chemin d’artiste. Un élan de solidarité commença à se former pour aider le chanteur souffrant. Il a ainsi été invité à faire une réapparition à Amizour lors d’un gala organisé spécialement à son honneur. Après c’est au tour de la localité de Barbacha qui a accueilli Bouhi en lui donnant même l’occasion de retrouver la scène après plusieurs mois d’éclipse. Bouhi, d’un humour incontestable n’a pas omis de submerger le public. Sans aucune autre ressource, la vedette de Bgayet, père d’une famille nombreuse, vit des moments pénibles. Il est appelé à suivre un traitement très coûteux et des contrôles réguliers. Une vie contraignante que seule la solidarité du public mais aussi le devoir de l’Etat envers ces souffre-douleurs de la société peuvent atténuer. Ceux qui ont bercé la patrie et se sacrifient pour porter bonheur aux citoyens ne méritent pas d’être oubliés. Le retour de l’ascenseur qu’un devoir aux meilleurs enfants de ce peuple. Bouhi en est un.

Nadir Touati

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