A travers son comité de Bouira, l’Association algérienne du planning familial (A.A.P.F) s’est intéressée à l’avortement, un sujet encore tabou. Et c’est sous le thème générique “le danger de l’avortement à risque” que le comité de l’A.A.P.F a consacré une journée scientifique au sujet, hier, au niveau de l’auberge des jeunes. Ainsi et au terme des communications qui se sont succédé les conviés à la journée se feront une idée de l’avortement à risque et de la morbidité et mortalité maternelles qui lui son liées. Même si les communications étaient, somme toute, instructives, il n’en demeure pas moins que leurs langues support (arabe classique et français) ne permettaient pas une meilleure lisibilité au plus large public. Et c’est donc cet aspect vulgarisation qui en pâtit. Cela dit, l’initiative du comité de Bouira est fort louable d’autant que ce phénomène d’interruption de grossesses non désirées prend de l’ampleur dans la société.
Le chiffre 80 000 avortements par année et à travers le territoire du pays (chiffre avancé par la Gendarmerie nationale) en dit long sur l’importance du phénomène. Bien entendu, la Kabylie n’est pas en reste. Encore ce chiffre reste en deçà de la réalité puisqu’il ne reflète en aucun cas la réalité de la situation clandestine non perçue par la gendarmerie et non traitée par la justice. Ces cas de nouveau-nés sans vie retrouvés jusqu’à dans des décharges publiques ne sont, hélas, que la partie visible de l’iceberg. La contrainte d’expulser le foetus avant-terme, dans des conditions déplorables et par des personnes non qualifiées, est essentiellement liée aux agressions sexuelles, les viols, les incestes, les attentats à la pudeur.
Mais au-delà de cette réalité criminelle, l’interruption de la grossesse dans des conditions clandestines et à risque est imposée par “le regard de la société”. La jeune “porteuse d’enfant non désiré”, déjà victime d’agression ou d’un amour feint, n’a d’autre choix que d’avorter ou, dans le meilleur des cas, vivre dans la honte et isolée de tous.
En plus du risque de laisser la vie sur “l’étal des avorteurs” et celui très probable de survivre avec de graves séquelles la jeune fille qui, pourtant ne s’est pas faite le bébé toute seule, est condamnée par la loi en vigueur et par la charia.
Pour la charia et selon le docteur Kaki de l’université de Bouira l’avortement est licite dans deux cas précis : lorsque la vie de la mère est en danger et lorsque le bébé est déclaré gravement atteint de malformation congénitale par une commission de médecins.
A noter à ce sujet que l’autorité religieuse d’El Azhar avait déclaré “licite l’avortement de femmes bosniaques violées par des miliciens serbes, parce qu’il s’agissait de femmes musulmanes violées par des chrétiens”.
Et l’avortement d’Algériennes violées par des terroristes algériens ? Il semblerait que outre l’autorisation des autorités publiques, une fetwa aurait été également consentie à l’avortement dans ce cas précis.
Quant à la loi en vigueur, elle stipule dans son article 304 du code pénal :
“Quiconque par aliments, breuvages, médicaments, manœuvres, violence ou par tout autre moyen, a procuré ou tenté de procurer l’avortement d’une femme enceinte ou supposée enceinte qu’elle y ait consenti ou non est puni d’un emprisonnement de 1 à 5 ans et d’une amende de 500 à 1 000 DA. Et si la mort en résulte, la peine est la réclusion de 10 à 20 ans”.
T. O. A.