»Les Abranis est un concept en constante évolution »

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Dans cet entretien, Karim relate ses débuts dans la chanson. Ses premiers penchants vers la musique moderne. Il nous explique le concept du groupe Abranis qui a connu des moments très forts depuis sa création.

La Dépêche de Kabylie : D’un jeune immigré pour des raisons qu’on connaît bien, vous vous êtes retrouvé artiste, comment s’est présentée la mue pour vous ?

Karim Abranis : Je pense d’abord à la fréquentation dans les écoles parisiennes, où la majorité des camarades de classe étaient des Français, avec lesquels on sortait pour aller voir des spectacles et des concerts, surtout des films d’Elvis Presley, des concerts de Jonny Halliday, des Beatles… donc si vous voulez, cette envie de faire de la musique moderne est venue de là. C’est l’influence sur les jeunes. Et ce, malgré que j’aimais beaucoup la musique avant même de partir en France à l’âge de 13 ans. Je me rappelle que j’étais puni par les moudjahidine du village parce que je collectionnais dans mon carnet les poèmes de Si Muhend U Mhend. J’ai été très intéressé par cela, et ils avaient mal pris la chose, donc ils m’ont puni pour ça, en me coupant les cheveux. Je pense que l’envie de faire de la musique est innée. C’est tout cet amour pour la poésie, la culture et la musique. C’est une chose que j’aime depuis ma naissance, donc je dirai que c’est atavique.

Les Abranis reviennent sur la scène artistique nationale, qu’est-ce que vous avez prévu comme spectacle et concerts ?

Nous avons prévu une tournée qui démarre aujourd’hui, au Théâtre de verdure. Cette tournée est particulière. C’est un spectacle très élaboré, au sens qu’on a travaillé en amont et depuis très longtemps, avec des ingénieurs, qu’ils soient au niveau du son, ou de la lumière. D’ailleurs, le spectacle est intitulé, “Son, Verbe et Lumière”. Au sens que sur le son on a mis l’accent sur des techniques pour obtenir un gros son énorme. De toutes les façons, la musique c’est l’art de combiner le son de façon agréable à l’oreille. Afin d’obtenir un gros son énorme, on utilise ici, pour obtenir un confort sonore pour les auditeurs, une nouvelle technologie qui s’appelle, une  » Façade en banane « . Cela veut dire qu’il y a une disposition des baffles qui renvoient le son à l’avant en forme de banane de façon à obtenir le même son, soit celui qui est à l’arrière de la salle obtient le même son que celui qui est au devant. Avant, c’était droit en forme d’équerres, et celui qui est au devant est, à la limite, dérangé par le volume sonore et celui qui est derrière entend parfaitement bien. Cette nouvelle technologie qui vient de voir le jour sera utilisée pour la première fois. ce n’est pas seulement cela, et bien sûr, quant on dit, Son Verbe et Lumière, verbe au sens où il y a le verbe dans ce qu’on chante, et puis le verbe parce qu’on compte rendre hommage à de grandes personnalités de la culture algérienne, tels Mouloud Feraoun, Kateb Yacine, Slimane Azem… A cet effet, on a prévu un grand vidéo projecteur avec lequel seront projetés les photos de personnes qui seront, au fur et à mesure, évoquées dans le spectacle. Lumière, car il y a des ingénieurs qui ont travaillé sur les effets spéciaux, comme les stroboscopes et les fumigènes et les différentes lumières. La lumière doit être en parfaite synchronisation avec le son de la musique et les rythmes. Et peut-être avec le sens du texte. Donc il n’y aura pas de lampe qui s’allumera par hasard. Tout est très élaboré.

C’est une manière de travailler un peu particulière. On a voulu lui donner cette envergure, dans l’esprit, je pense que, maintenant et vu mon âge avancé, même si je ne suis pas encore à la retraite, je vais laisser la place aux jeunes pour prendre la relève.

Les Abranis est un groupe de musique kabyle qui a marqué l’évolution de notre chanson et l’a révolutionnée, pouvez-vous nous le résumer en quelques mots ?

Il faut savoir que  » Abranis  » est plus qu’un concept, qu’un groupe figé sur des personnes. On a travaillé longtemps dans des pays étrangers, et quand on signe un contrat avec des Italiens ou des Anglais pour participer, tel jour et telle heure à un spectacle, on ne peut pas se permettre d’annuler trois jours avant, parce qu’on a un bassiste ou un guitariste qui s’est foulé la jambe ou qui veut aller au mariage de sa sœur ! Donc on en est revenu de cet esprit de groupe figé sur les histoires des personnes. Je me suis amusé à compter le nombre de musiciens qui sont passé dans le groupe et j’en ai eu 36 et ce n’est pas encore fini. Il faut savoir que c’est un concept, donc dans cette tournée, notamment le 21 juin, nous seront à sept sur scène, avec deux filles qui vont faire la chorale. Ceci, en dehors du staff technique, des ingénieurs de son…il y aura un grand travail en amont, qui sera plus fatigant, peut-être plus que le travail sur scène. En résumé, les Abranis est un concept évolutif et en constante évolution. Même au niveau des albums, il n’y a aucun album qui ressemble à un autre. C’est pour cela que chaque année, il y a une cuvée spéciale.

Après 22 ans d’absence, comment se présente pour vous votre public que vous avez laissé depuis une vingtaine d’années ?

J’espère qu’ils ne nous ont pas oubliés. On verra ça jeudi. S’ils viennent, donc c’est qu’ils nous ont pas oubliés. Ils viendront jeudi en compagnie de leurs enfants. Cela leur permettra de nous faire découvrir à leurs enfants. Ils étaient tous des jeunes et maintenant, ils sont tous des pères et des mères de famille. Je les invite à venir nombreux, car comme on dit en Kabyle, Win Yeccen Yecca, W’ur Necci Tarvut Takkes ! ça pourrait être que ces derniers spectacles, donc celui qui n’a jamais vu les Abranis sur scène, c’est une occasion de les voir. Il faut aussi ajouter que les Abranis sont un groupe de scène, à voir et à écouter et surtout voir. On a mis beaucoup l’accent sur le plan visuel.

Je souhaite qu’ils soient nombreux pour cet ultime mégaconcert, qui est par ailleurs, très élaboré, aujourd’hui à 21h. Et après ce concert au Théâtre de verdure, une série de concerts suivra. Nous serons à Boumerdès le 18 juin, à Tizi Ouzou le 19, à Bougie le 23, à Sétif le 24, Bordj Bou Arreridj le 25 et à Bouira le 26.

Sinon, des surprises pour le public ?

Oui ! Il y aura une surprise qu’on ne va pas dévoiler, dans le sens où elle doit rester surprise. Il y aura beaucoup d’invités. Nous laisserons le public découvrir les agréables surprises. On va laisser le plaisir de la découverte au public.

Un dernier mot ?

Je vous remercie d’abord de votre accueil. Je suis ravi et très heureux de revenir de nouveau dans notre cher pays, l’Algérie, après une longue absence. C’est toujours un immense plaisir de me produire dans notre pays et devant notre public.

Propos recueillis par Mohamed Mouloudj

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