L’espace, entre forêt et poussière

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Ces actions ont donné lieu à une plate-forme de revendications d’ordre social que les représentants de la population ont négocié avec les directeurs de l’Exécutif de la wilaya dépêchés sur place par le premier magistrat de la wilaya. Des promesses ont été faites par les pouvoirs publics pour résoudre le maximum de problèmes que vivent les habitants de la commune à commencer par dynamiser la création d’emplois dans la région. A la fin de l’année 2001, les statistiques de la wilaya signalent un taux de chômage de 28,49% sur une population active de près de 2200 habitants. Actuellement, la commune compte plus de 10 000 habitants dont 70% environ vivent dans le chef-lieu de commune, 5% dans les zones éparses et 25% dans les agglomérations secondaires (hameaux et bourgades). La superficie de la commune est de 8 990 ha. Elle se situe dans une grandeur moyenne parmi les 45 communes que compte la wilaya de Bouira. Région à vocation agricole et pastorale située sur le grand axe routier qu’est la RN, la terre d’Ath Mansour compte une superficie agricole de 4 881 ha dont seuls 2 365 ha constituent la SAU (Surface agricole utile). Céréaliculture, oliveraie, vergers, arboricoles et maraîchages continuent une ancienne tradition de polyculture végétale associée à l’élevage. Au vu de sa position géographique, à 40 km à l’est de la ville de Bouira et sur l’une des routes les plus importantes d’Algérie, la RN5, Ath Mansour serait logiquement destinée à un avenir florissant où se complèteraient tous les secteurs : commerce, tourisme, agriculture, artisanat et PME. Or, dans l’état actuel du développement rien de tout cela ne pointe à l’horizon. Et pourtant des potentialités réelles existent, mais elles demeurent sous-exploitées. Le chef-lieu de la commune offre l’image d’un village du début du XXe siècle, certes beau pour un esprit exotique, mais malheureusement étroit et peu développé pour ses habitants.

Ath Mansour occupe la vallée faisant la jonction entre Assif Amazigh et la Soummam dans laquelle le premier se déverse.

Nous sommes à 350 m d’attitude sur une butte faisant face au Djurdjura au nord et au Massif des Bibans au Sud. Les deux chaînes de montagnes semblent se regarder dans une atmosphère de féérie et de solennité. La route, la RN5, est doublée par la voix ferrée sur son flanc nord et qui va aboutir au bout de moins de 5 km à la gare de triage de Beni Mansour, dans la wilaya de Béjaïa.

Tailler la pière, un métier, une passion…

Pour un visiteur qui passe pour la première fois par cette route, le spectacle le plus saisissant demeure les chantiers de la taille de pierre. Des jeunes, marteau et burin en main, s’affairent à donner à la pierre la forme, le poli et la configuration les plus parfaits pour la proposer à la vente. “Ce sont des pierres qui vont embellir les maisons cossues de Chéraga ou de Tizi Ouzou”, nous dira un adolescent dont le visage est recouvert de poussière et les mains crevassées profondément.

La pierre est extraite des entrailles de la terre, à la lisière ou à l’intérieur de la forêt. Un peu plus loin, sur les bords d’Amarigh et au pied de la butte d’Azrou Kallal, des masses de poussière montent dans le ciel poussés par un vent de l’Est. Elles proviennent des carrières et stations de concassage qui rongent chaque jour davantage les espaces de verdure. Ces derniers sont constitués par la pinède de Beni Mansour vaste de quelque 3 640 ha dont plus de 90% appartiennent à l’Etat (forêt domaniale). La pinède de Beni Mansour commence à moins de 2 km sud de Taourirt, village duquel elle est séparée par des terrains agricoles (céréales et oliveraies). Les deux premiers cantons, Tichi et Iguéni, sont situés sur deux crêtes séparées par une “infructuosité” où passe une piste cahoteuse empruntée par les paysans ayant des propriétés là-haut. Le massif s’élargit vers le Sud formant des tentacules allant de Azrou Oughilès à Tassif Oualda, près du hameau de Rodha. En plusieurs endroits, la forêt est endommagée par les incendies, mais la force de la nature est plus grande puisque la régénération du pin d’Alep est partout visible. Le même spectacle continue jusqu’à la limite avec la wilaya de Bordj Bou Arréridj au niveau du cours d’eau de Karma. La clairière de Tala n’Tebhirine, appartenant à des particuliers et vaste de 106 ha, est un petit paradis sur terre. Pelouses, oliviers, figuiers, ruines de maisons et eau coulant à flot sur le côté gauche de la clairière confèrent à ces lieux une ambiance de sérénité et de retraite spirituelle. Sur cette butte, le Djurdjura apparaît avec des dessins plus prononcés et des couleurs printanières plus chatoyantes. Malheureusement, comme nous le fait remarquer un vieil émigré de la région, on ne peut pas vivre d’amour et d’eau fraîche. Entre la forêt et la poussière, quels horizons pourront s’ouvrir pour les Ath Mansour ?

Amar Aït Messaoud

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