Vérités, contrevérités et mensonges par omission

Partager

“Un bon historien n’est d’aucun temps ni d’aucun pays” Fénelon

Sa rigueur dans l’épistémologie de l’écriture de l’Histoire lui a attiré l’admiration de ses contemporains même si ces derniers ne partagent pas intégralement sa vision du monde.

Pour les générations de la deuxième moitié du 20e siècle, il reste l’intellectuel qui s’est opposé à la guerre d’Algérie, dans le sillage de la revue Esprit laquelle a publié les premiers textes littéraires d’écrivains algériens modernes ; comme il symbolise le précieux soutien au mouvement estudiantin de mai 1968, mouvement porté à bras-le-corps par un autre intellectuel d’envergure, Jean-Paul Sartre.

Né le 27 avril 1913 à Valence, il est initié à la philosophie au lycée de Rennes par le professeur Roland Dalbiez. Dans les années 1930, il fréquente le philosophe existentialiste Gabriel Marcel et le personnaliste Emmanuel Mounier. Fortement influencé par le courant chrétien, il passera trois années de retraite ascétique dans la communauté cévenole de Chambon-sur-Lignon Juste après son retour de captivité de Poméranie (1940-1945).

En 1945, il se retrouvera professeur de philosophie à l’université de Strasbourg, poste qu’il occupera pendant huit ans. Ensuite, il enseignera à Paris-Sorbonne. Pendant cinq ans, Paul Ricoeur est professeur à Nanterre (1965-1970). Il se déplacera ensuite aux Etats-Unis pour dispenser des cours de philosophie à l’université de Chicago (1970-1985).

Dans ses débuts de recherche philosophique, Paul Ricœur a essayé d’analyser les problèmes psychologiques, éthiques et métaphysiques de la volonté à la lumière de son rapprochement avec les pensées de Karl Jaspers et de Edmund Husserl. Il a beaucoup contribué à faire connaître le système de Husserl en France. Ce fut alors à ce moment-là qu’il publia son ouvrage célèbre Le Volontaire et l’Involontaire (1950). «Il est de l’essence de la volonté de se légitimer dans des motifs qui font apparaître des valeurs pour moi», y écrit-il.

L’analyse de l’acte volontaire en une réflexion éthique et métaphysique sur le sens de l’homme et de son pouvoir d’agir. C’est ce que Ricœur illustrera dans son autre livre Finitude et culpabilité (1960).

Il a également tenté d’élucider la signification des mythes prébibliques et bibliques du mal, de la chute et de la déréliction humaine. Voulant dépasser le langage rationnel, il s’investit dans l’herméneutique, considérée comme une philosophie de l’interprétation dont il a voulu saisir les conditions et les caractéristiques à la faveur des nouvelles découvertes de la psychanalyse.

Didier Julia dit de Paul Ricoeur : “Le but de sa doctrine est de penser la totalité de l’homme (connaissant, sentant et agissant et de ne point le réduire à une simple faculté de connaissance.’’

Jean Greisch, du CNRS, écrit quant à lui : “Ricoeur n’a jamais cessé de militer en faveur d’une idée de la philosophie qui refuse de se couper des débats scientifiques et qui s’intéresse passionnément aux problèmes de la cité et aux fonctionnement des institutions politiques et juridiques.”

Considéré comme un géant de la pensée moderne et un intellectuel accompli, Paul Ricœur «s’est toujours illustré par la singularité de sa pensée. Inclassable et “atypique’’. Il s’est occupé de psychanalyse, de morale et, récemment, de philosophie de l’histoire. Toujours ses travaux ont dérangé. Ils continuent’’, écrit L’Événement du jeudi du 8 septembre 1988. Insistant sur les ressorts de la force intérieure qui fonde l’acte de volonté ou la volition, Ricoeur dit : “Qui n’a pas d’abord de source n’a pas ensuite d’autonomie’’.

Principales œuvres de Paul Ricoeur

-Karl Jaspers et la philosophie de l’existence-1947-

-Le Volontaire et l’Involontaire- 1950-

-L’Homme faillible-1950-

-Histoire et Vérité-1955-

-La symbolique du mal-1960-

-Finitude et culpabilité- 1960-

-De l’interprétation : Essai sur Freud- 1965-

-Temps et récit-1983/1985 en trois tomes

-Soi-même comme un autre- 1990-

-La Mémoire, l’Histoire, l’Oubli-2000-

Les histoires de l’Histoire

Le peuple algérien a souffert de la manière dont est prise en charge l’écriture de son hisoire. La falsification de l’histoire et la scotomisation d’une partie de celle-ci avaient leurs théoriciens et idéologues ainsi que leurs praticiens dans les écoles et les médias. C’est véritablement un parti pris appartenant à une grande entreprise de déculturation/acculturation propre à l’idéologie coloniale. Après l’Indépendance et sous le régime du parti unique qui a bâillonné la société et proscrit toutes les libertés, y compris celle d’écrire l’histoire du pays, la vérité sur la guerre de Libération était celle établie par le prince du moment. Il est tout à fait évident que même les acteurs de cette guerre se sont retrouvés dans une situation inconfortable où le souvenir encore vivace de la tragédie ne permettait pas de prendre le recul, psychologique et pédagogique, nécessaire.

C’est dans la clandestinité que circulaient les quelques ouvrages de Mohamed Harbi publiés aux éditions Jeune Afrique à Paris à la fin des années 1970 et au début des années 1980.

Il faut dire que l’on risquait gros en se baladant avec Les Archives de la révolution algérienne ou Le FLN, mirage et réalité, deux livres écrit par cet auteur qui cumule les qualités d’ancien combattant et d’historien.

Amar Naït Messaoud

Partager