Le cercle vicieux et l’éternel recommencement

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Harold Pinter vient de s’éteindre à 78 ans à Londres. Fils de juifs russes installés dans la capitale britannique, ce dramaturge de renom a séduit autant par son talent que par son parcours et son engagement. C’est que les hommes de lettres de son niveau de célébrité sont rares à ne pas avoir connu tout de suite le succès. Harold Pinter a construit sa réussite au forceps. Sa première pièce, l’anniversaire a été un bide et la critique londonnienne l’a traîné dans la boue, jusqu’à l’humiliation. Personne alors ne pensait que cet écrivain qui a “adoré ses échecs” allait un jour connaître un succès de l’ampleur de celui que lui ont valu ses écrits majeurs, le Messager et surtout La maîtresse du lieutenant français.

Harold Pinter n’a pas fait qu’écrire, il a aussi parlé et milité. Il a même décidé, alors qu’il était au sommet de la gloire après avoir été consacré par le prix nobel de littérature en 2005, d’arrêter l’écriture pour se consacrer aux causes qui le passionnaient.

Particulièrement opposé à la guerre en Irak, il avait traité Bush de tous les noms d’oiseau.

La maladie l’ayant considérablement affaibli ces derniers mois, il n’a pas dû voir le lancer de chaussures contre le Président le plus calamiteux de l’histoire des Etats-Unis. On ne peut pas savoir s’il aurait apprécié le geste du journaliste irakien, mais on sait que Pinter et Mountadher Ezzaïdi ne se sont pas battus avec les mêmes armes. Loin de Londres et un peu plus près de Baghdad, Ghazza souffre de l’isolement en attendant le pire qui semble imminent. Otages d’un Hamas qui pousse sa folie, jusqu’au bout et d’une administration israélienne qui ne fait pas que riposter comme elle le dit, les populations palestiniennes s’apprêtent à vivre une énième tragédie qui risque d’être la plus meurtrière de l’histoire de cette confrontation. L’armée israélienne qui n’en a pas souvent eu besoin semble tenir un argument imparable : elle ne “peut pas rester les bras croisés” face aux tirs de roquettes du Hamas qui ne donne pas l’impression de vouloir tempérer ses ardeurs. Alors Ehud Olmert se fait “sagement” menaçant : “arrêtez, nous sommes plus forts, il y aura plus de sang de votre côté…” Pendant ce temps, sa ministre des affaires étrangères tente de vendre en l’expliquant une attaque d’envergure contre Ghazza.

Hosni Moubarak, le premier à la recevoir au Caire semble avoir trouvé les mots les plus doux pour exprimer sa désapprobation vis-à-vis du Hamas.

Il “met en garde” Israël contre “toute entreprise de représailles collectives.” L’autorité palestinienne, elle, n’a rien d’autre à faire que tenter de “gérer” la folie mais aussi la popularité du mouvement islamiste qu’il doit, en grande partie, au manque de volonté de la part d’Israël. Un cercle vicieux que les palestiniens vont encore malheureusement payer.

En Guinée, un sombre capitaine du nom de Moussa Camara vient de s’emparer du pouvoir à la faveur d’un putsh “pacifique” alors que le président en place venait d’être emporté par la maladie. Le général Lausana Counté aux affaires depuis 24 ans après le coup d’etat perpétré contre Sekou Touré doit être le seul président à être destitué pendant qu’il attendait… ses funérailles. Petit despote comme il y en a tant en Afrique, il a fini par concéder un pluralisme de façade et s’est fait réélire à trois reprises dans des parodies électorales qui ont toutes mené le pays aux bords de la guerre civile. Comme tous les autres putshistes de ce temps, le capitaine Camara a déclaré avoir “agi par civisme” et qu’il n’a aucune intention de “s’éterniser au pouvoir.” Il promet donc les élections dans 18 mois.

En Palestine c’est le cercle vicieux, en Afrique l’éternel recommencement.

S. L.

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