La colline n’oubliera jamais l’amusnaw !

Partager

Mouloud Mammeri est incontestablement l’intellectuel algérien qui a su et pu donner à sa langue et et à sa culture, avec les moyens scientifiques, les supports modernes de transcriptions et de compréhensions.

Même si banni, des années durant, des médias algériens, pour cause de ses travaux scientifiques et linguistiques en tamazight, Mammeri est l’un des intellectuels algériens les plus en vue de sa génération. Anthropologue de renom, romancier talentueux et linguiste pertinent, Mammeri est tout simplement cet intellectuel aux facettes multiples qui a su, avec le sens du savoir, redonner espoir et vie à une culture vouée à la haine d’un pouvoir inique et nihiliste.

Son statut d’intellectuel acquis après un long et épineux parcours scolaire et universitaire, déambulant d’une école à l’autre à la recherche de moyens dédactiques, afin d’affronter une mission des plus dures, a permis à l’intellectuel de forcer même le respect de ceux qui sentaient en lui une liberté de pensée et d’action, inacceptable aux yeux du régime politique de l’époque.

Quelques années après l’indépendance du pays, feu Mammeri assurait, bénévolement l’enseignement de la chaire berbère à l’université d’Alger. Avec un groupe de militants berbéristes, il a défriché le terrain pour cet enseignement, et surtout, il a jeté les jalons d’un enseignement en tamazight qui ne cesse, aujourd’hui, de prendre de plus en plus d’ampleur. Même si, Mammeri était la cible d’attaques politicardes dans lesquelles le pouvoir incarné par le parti unique excellait à merveille, Mouloud Mammeri symbolisait le côté intellectuel et érudit du combat identitaire et démocratique porté haut et fort par la Kabylie. En avril 1980, l’interdiction de sa conférence sur la poésie kabyle ancienne a mis le feu aux poudres. Ces événements signèrent la première manifestation anti-pouvoir depuis l’Indépendance. Le mouvement politique qui s’en est suivi, a fait de la revendication amazighe son fer de lance. Présent dans toutes les manifestations scientifiques dédiées à la langue et culture amazighes, Mammeri s’était lancé, plusieurs années avant dans sa quête de la vérité scientifique et culturelle amazighes. Se rendant auprès des autres peuples berbères, Mammeri, en homme de science, a publié plusieurs ouvrages dans le domaine de la grammaire et de la linguistique amazighes. L’aventure intellectuelle de Mammeri ne s’arrête pas là, puisqu’il a dirigé le Crape pendant plusieurs années et le Ceram. Il fondait la revue Awal, cahiers d’études berbères, jusqu’à sa mort en 1989.

Sa mort « accidentelle » le soir du 26 février 1989, sur la route de Aïn Defla, mettra fin à cette vie d’érudit. Sa mort dans des conditions plutôt obscures, a laissé des zones d’ombre à l’aube de l’ouverture démocratique. Une ouverture à laquelle l’apport de Mammeri est incontestable. Mammeri a été enterré dans son village natal à Taourirt Mimoun en présence de plusieurs centaines de milliers de personnes, d’où les officiels étaient absents aux qui l’ont, non seulement censuré durant toute sa vie, mais aussi décidé à bouder ses obsèques, des obsèques, qui confirment pourtant, que l’amusnaw n’est plus de ce monde !

Mohamed Mouloudj

Partager