La musique andalouse est en panne de création

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Dans le cadre du programme des activités de la Direction de la culture de la wilaya de Béjaïa, et profitant d’une tournée de Beihdja Rahal, la Maison de la culture de Béjaïa a accueilli la diva de la musique andalouse dans la soirée du mardi 24 février 2009. Avec un orchestre réduit comme du temps de l’épopée andalouse dans les palais de Grenade, Beihdja Rahal a présenté son dernier album Nouba Sika devant un public connaisseur qui l’a écoutée dans un silence religieux.

A la fin du récital, l’artiste a procédé à une vente-dédicace de son dernier CD et d’un livre sur la musique andalouse. Ensuite, Beihdja Rahal a eu l’amabilité de répondre à nos questions.

La Dépêche de Kabylie : Vous venez de vous produire pour la première fois dans la capitale des Hammadites. Quelles sont vos impressions sur le public bougiote ?

Beihdja Rahal : C’est un public connaisseur et attentif, d’autant plus que durant la première partie du concert, nous avons interprété des classiques de la musique andalouse, la Nouba Sika.`

Mais cela je le savais avant de venir car je sais qu’il y a des associations qui travaillent depuis des années pour la sauvegarde de ce patrimoine et qu’il y a même une relève.

On dit qu’il n’y a plus de création en musique andalouse. Est-ce vrai ?

Oui, c’est vrai. Je le confirme et je signe. Et cela pour la simple raison qu’il s’agit d’un patrimoine qui nous a été transmis de génération en génération et de siècle en siècle depuis la chute de Grenade. Nous aussi nous ne faisons que le transmettre à d’autres générations. En ce qui me concerne, mon rôle n’est que d’interpréter ce qui m’a été transmis par mes maîtres.

Donc, par respect pour eux et en leur rendant hommage, j’interprète ce patrimoine comme il m’a été transmis. Pour que les gens comprennent, je vous donnerai un exemple concret. Prenons pour exemple les ruines romaines ou celles de Tipaza, c’est-à-dire un patrimoine archéologique : Est-ce que, sous prétexte que ce sont des ruines, on peut se permettre de les reconstruire et de les peindre pour que cela fasse plus joli ? Non, bien sûr, puisque c’est un patrimoine à sauvegarder tel qu’il est. En tout cas, c’est vrai que l’on ne perçoit pas cela de la même façon pour le patrimoine immatériel comme la musique andalouse. Et pourtant, c’est la même chose. En effet, par exemple, on pense que l’on peut y rajouter quelques notes. En tout cas, si un jour, je décide d’arranger ou de rajouter quelques notes, je ne serai plus pour la sauvegarde du patrimoine.

N’empêche que vous avez votre propre style et, si l’on peut se permettre ce terme, votre orchestre est “léger”.

Par rapport au style, ce qui fait quelque chose de particulier, c’est la voix. C’est la mienne et c’est ma personnalité. Même si j’interprétais la même chose qu’une autre voix féminine, elle ne sera pas la même car j’ai ma propre voix et ma propre personnalité. Mais cela reste toujours le même patrimoine. Par rapport à l’orchestre réduit, eh bien je suis revenue au temps de l’Andalousie arabo-musulmane. En effet, à cette époque-là, c’étaient comme cela que se produisaient les concerts dans les palais. Ce n’étaient pas des orchestres de 40 musiciens. Maintenant, par contre, c’est le cas. Mais, il faut que vous sachiez que c’est parce que ce sont des associations musicales, c’est tout. Elles prennent tous leurs élèves sur scène, surtout lorsqu’il s’agit de se produire dans des festivals. Mais quand il s’agit de professionnels, un seul musicien pour chaque instrument suffit et là, c’est le talent de chaque musicien qui est mis en valeur.

Le mot de la fin ?

J’espère que, par ce que je viens de dire, plus de public à Béjaïa connaîtra un peu ce qu’est le patrimoine de la musique andalouse.

A. S.

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