“Mon comportement était dû à mon tempérament de gagneur”

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La Dépêche de Kabylie : Pour commencer pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Mourad Amara : Je suis né en 1959 à Bgayet et je suis d’origine d’Ifnayane. Mon père a déménagé à Tizi Ouzou en 1964 pour travailler au lycée Fadhma N’soumeur comme intendant, donc, j’ai vécu toute mon enfance à la cité Kadi ou j’ai commencé à taper dans le ballon comme tous les jeunes de notre époque

En disait que c’est votre grand frère Kamel qui vous a encouragé à faire gardien de but ?

Oui, effectivement, au début, j’était joueur de champ dans le quartier, mais mon grand frère Kamel qui était gardien de but n’arrêtait pas de m’encourager à être gardien, d’ailleurs chaque jour, il m’entraînait, et c’est à partir de là que j’ai commencé à garder les bois, et j’ai signé ma première licence en cadet à Boukhalfa en 1974.

En quelle année avez-vous rejoint la JSK ?

En réalité, le club a voulu m’enrôler dés la première saison, puisque déjà étant cadet, je jouais les matchs en senior a Boukhalfa, et à l’époque, on jouait souvent en ouverture des matchs de la JSK au stade d’Oukil Ramdane mais, le règlement l’interdisait vu mon âge, donc j’ai attendu l’année de la reforme, en 1977 pour intégrer la JSK en junior.

Vous avez trouvé deux grands gardiens sur place, en l’occurrence Harb et Cerbah, donc vous avez pris du temps pour vous affirmer ?

Déjà, durant ma première saison avec le club, je faisais les entraînements avec les seniors, et je suis même parti en préparation avec eux en Pologne.

Pour ma place dans l’équipe, j’ai profité de l’absence des deux gardiens Harb et Cerbah, sélectionnés en Equipe nationale et de là j’ai commencé à jouer les matchs amicaux, mais ma première saison comme titulaire c’était en 1979-1980, à l’époque Cerbah avait des problèmes avec le club, donc il a quitté et Harb est resté au Mexique après le stage de l’Equipe nationale, donc j’ai saisis ma chance pour être le gardien numéro 1 de l’équipe.

Vous vous souvenez sûrement de votre premier match avec la JSK ?

Absolument, par ce que le hasard a voulu que je joue mon premier match contre le Mouloudia d’Alger ici à Tizi Ouzou, je ne vous cache pas que j’avais le trac, d’ailleurs la veille du match, je n’ai pas dormi toute la nuit, en plus du cachet spécial du derby, il y avait le départ de Cerbah, qui était le gardien titulaire, et ce n’était pas facile de le faire oublier aux supporters du jour au lendemain, mais dès que j’ai mis les pieds sur le terrain, j’ai tout oublié, j’ai pensé seulement à rendre heureux les amoureux du club qui ont pris d’assaut les gradins et Dieu merci, j’ai fait un grand match avec à la clé une victoire par deux buts à un. Une semaine après, j’ai joué un autre match choc avec l’USMA au stade du 5 Juillet en coupe d’Algérie, nous avons perdu par la séance de tirs aux buts mais j’ai réussi à arrêter trois penalties, donc, c’est à partir de là, que j’ai décroché ma place de titulaire en équipe.

Vous avez vécu beaucoup de bons moments avec la JSK, quels sont les choses qui vous sont restés en mémoire ?

Jouer à la JSK, c’était déjà un rêve pour moi. Etre supporter d’un club et défendre ses couleurs par la suite c’était une chose extraordinaire qui m’arrivait, donc je vous dirais que j’ai passé les meilleurs moments de me vie avec la JSK, mais la saison qui m’a marqué le plus, c’était ma première saison avec la JSK, durant laquelle, nous avons remporté le championnat, la coupe d’Afrique des clubs champions et en plus j’ai participé avec l’équipe nationale aux jeux olympique de Moscou.

Et les choses que vous avez regrettées ?

Je suis un gagneur et chaque défaite me fait très mal, car on avait les moyens de remporter tout, car on possédait une très grande équipe. Mais la défaite contre le Zamalek en Egypte était la plus dure à supporter pour moi, car à l’époque, on pouvait remporter largement la coupe d’Afrique mais ils ont tout fait pour nous éliminer, il y a aussi la fameuse coupe d’Algérie qu’on a perdu face à Bel Abbès en 1991.

En vous accuse d’être agressif sur le terrain, que diriez-vous ?

Tout d’abord il faut que vous sachiez qu’avant d’être joueur, j’étais un supporter de la jsk, comme tous mes coéquipiers de l’époque, donc, on faisait tout pour garder toujours la JSK sur la plus haute marche, certes, j’étais jeune mais j’avoue que j’avais un tempérament de gagneur acharné qui aime vraiment son club, en plus il ne faut pas oublier qu’à l’époque, on était la cible de tout le monde, non seulement de l’équipe adverse mais également de la part des arbitres et des supporters, on nous traitait de tous les mots et des fois ça me touche au cœur et je me révolte à ma manière.

Et avec vos coéquipiers ?

Certes, il y a des chose qui se passent sur le terrain mais il faut que les gens sachent que j’en ai aucun problème avec mes camarades bien au contraire, dès la fin du match, on oublie tout, car on s’entendait très bien entre-nous, car chacun de nous connaissait le tempérament de l’autre, en plus, on habitait le même quartier, donc on est comme une vrai une famille.

Quelles étaient vos relations avec les supporters ?

A l’époque, il y avait un grand respect entre nous, car avant tout, ce club appartient à tous, la différence, c’est que nous, nous sommes sur le terrain et lié eux dans les tribunes, donc on est pour la même cause, celle de gagner. Alors, on discutait avec eux en leur expliquant et en faisant la fête ensemble.

Quoique vous soyez sélectionné en équipe nationale à plusieurs reprises vous n’ayez pas joué beaucoup de matchs, quelles sont les raisons ?

Il faut savoir qu’à l’époque, il y avait un grand gardien qui s’appellait Cerbah, donc j’étais son remplaçant, je participais de temps en temps aux matchs amicaux et je n’ai jamais créé de problèmes car je savais qu’il était un titulaire indiscutable. Mais en 1986, pendant le mondial du Mexique, j’ai été le 3e gardien après Drid et Larbi, là c’était pas moi qui le disait mais c’était tout le monde qui s’était étonné car après le départ Cerbah c’était moi le gardien numéro 1 en plus durant cette saison, on avait gagné le doublé et j’étais au top de ma forme, mais les choses se sont passées autrement.

Apparemment, c’est la même chose qui se reproduit avec Chaouchi qui n’est pas sélectionné, que pensez vous ?

J’ai entraîné Chaouchi pendant deux mois la saison passée, j’ai essayé surtout de l’aider sur le coté psychologique, car il ne faut pas oublier qu’il est jeune et surtout qu’il est venu d’un petit club, je dirais que sur le volet technique, il est le meilleur gardien d’Algérie, s’il se concentre sur son travail je pense qu’il fera une grande carrière, sincèrement il est pétri de qualités.

Vous avez terminé votre carrière en beauté puisque vous avez reçu l’unique Coupe d’Algérie remise par le défunt Boudiaf 04 jours avant son assassinat, quel sentiment aviez-vous quand vous avez entendu la nouvelle de sa mort ?

Tout d’abord il faut savoir que j’ai décidé de mettre fin à ma carrière juste après la finale perdue face à Bel Abbès, mais je suis resté par amour au club parce qu’il traversait la période la plus dure de son histoire, avec le départ de Khalef et Zywotco et aussi le départ du président Ben Kaci. Donc, je suis resté encore une année, avec à la clé un trophée que j’ai remporté pour finir la saison en beauté. Pour revenir à votre question, je vous avoue que je ne savais pas que Boudiaf était vivant, jusqu’au jour où il est revenu, donc recevoir l’unique coupe d’Algérie de ses mains c’était quelque chose d’extraordinaire. Et sa mort m’a beaucoup affecté.

Ensuite, vous avez évolué aussi à Bordj Menaiel la saison suivante

Oui, effectivement, le défunt Tahanouti m’a approché pour l’aider car il n’avait pas de gardien remplaçant car Sid Rouhou était suspendu, donc j’ai accepté, et j’ai fait ça pour mon ami Tahanouti que je regrette d’ailleur, j’ai joué quatre à cinq matchs. Juste après le retour de Sid Rouhou, j’ai mis fin à ma carrière. Je vous signale aussi, que je n’ai touché aucun centime de Bordj Menail, j’ai fait cela gratuitement pour mon ami Tahanouti.

Vous avez quitté la JSK en 1992 pour revenir en 2007, pourquoi tout ce temps ?

En réalité, je n’ai jamais voulu quitter la JSK, parce que c’est grâce à elle que j’ai réussi ma vie. C’est le club de mon cœur, mais les circonstances de l’époque m’ont poussé à m’éloigner du club. L’année passée, le président m’a contacté, et j’ai répondu présent parce que j’ai senti qu’il y avait une bonne équipe dirigeante donc j’ai pris en main les catégories jeunes pour les aider et surtout leur donner la chance de faire leur carrière comme nous, en suite après le départ de Izri, j’ai travaillé 2 mois avec les gardiens de but ensuite j’ai pris la section senior. Dieu merci, on a réussi à remporter le championnat et rendre heureux notre merveilleux public, malheureusement pendant l’été, je suis tombé malade pour prendre un peu de recul, maintenant, il y a déjà une équipe dirigeante en place qu’il faut laisser travailler

Vous avez peut être un mot à dire pour conclure ?

Je vous remercie beaucoup pour l’occasion que vous m’avez offerte pour m’exprimer, je remercie aussi les supporters de la JSK pour leur soutien pendant toute ma carrière et je profite de l’occasion pour vous dire que je n’ai touché aucun sous quand je suis revenu à la JSK, et j’ai fait ça gratuitement par amour au club.

Entretien réalisé par Hamid Oukaci

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