…Les barrages, un palliatif ?

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Malgré ses immenses capacités hydriques, provenant des réserves souterraines et des eaux pluviales, les citoyens sont sous la gestion rigoureuse de l’eau des mois durant.

Si les nombreuses fontaines, autres joyaux des villages et montagnes de Kabylie venaient à être entretenues et exploitées raisonnablement, les villageois seraient épargnés par la corvée de la quête de l’eau, appelée à juste titre « Or bleu ». Aussi, les nombreux villages reculés et isolés seraient à l’abri du crucial problème d’eau potable. En effet, la période s’étalant de juin à octobre est devenue un véritable cauchemar pour les citoyens de nombreux villages, dans la mesure où ils sont contraints quotidiennement à l’inévitable besogne, à savoir parcourir des dizaines de kilomètres pour chercher cette précieuse denrée. Lors de la saison estivale, ses stations balnéaires, ses infrastructures touristiques enregistreraient, sans doute, une affluence plus accrue.

Certes, depuis la mise en service du gigantesque barrage de Taksebt, dont les réseaux et les ramifications atteignent au fur et à mesure de plus en plus de localités, un soulagement des populations villageoises est perceptible.

Certes, l’investissement dans des projets au coût aussi faramineux que celui du barrage de Taksebt (Tizi-Ouzou) et de Koudiet Acerdoune (Bouira) verra l’amélioration du taux d’alimentation en eau potable et, avec le temps, ces ouvrages seront d’un apport considérable et fort appréciable dans le domaine de la pêche et de l’aquaculture.

L’alimentation des régions de Fréha et Azazga qui se fera à partir de Taksebt, avec 20 millions de mètres cubes annuellement, a vu les citoyens de nombreux villages soulagés un tant soit peu. Ainsi, ce transfert d’eau touchera 16 chefs-lieux communaux et 320 villages avec une population de plus de 418 000 habitants, pour un montant de 2,7 milliards de DA. Par ailleurs, un sixième réservoir d’une capacité de 5000 m3 est inscrit, pour la région de Tamda. Quant au non moins colossal projet de Koudiet Acerdoune, dont l’enveloppe budgétaire est estimée à 22 milliards de DA, il désengorgera la région du sud de la wilaya, ainsi qu’une partie de la wilaya de Bouira.

Ce faisant, la multiplication de projets de développement – qui, d’ailleurs, sont à même de sortir la région de son isolement et de sa torpeur économique – ne saurait justifier l’abondant d’un patrimoine aussi précieux à plus d’un titre. La fontaine est un lieu chargé de tant de symboles inhérents à la vie des populations locales. La fontaine, tajmaât est entre autres un lieu… presque sacralisé ; pour les femmes pour la première ; pour les hommes pour la seconde.

Et exclusivement ! Des lieux où tout se mêle et se démêle. Tant d’anecdotes et d’événements sont directement liés au vécu quotidien des villageois. C’est aussi le lieu où pratiquement toutes les unions sont scellées. Pour les jeunes, c’est le lieu de longues veillées d’été où se racontent les rêves et amours de jeunesse en « confidence » de polichinelle. Pour les moins jeunes, ces lieux évoquent immanquablement bien des souvenirs. Bons et moins bons. En ce lieu réceptacle de toutes les nouvelles du village, des ârchs et de la communauté en général, il est loisible de tâter le pouls de ce microcosme social même si les langues n’ont pas toujours tendance à se délier facilement. De nos jours, les fontaines publiques et la place du village sont abandonnées et dans un piteux état. Si, pour les fontaines, les troupeaux n’en ont cure, les femmes regrettent ces lieux, c’est certain. L’ambiance conviviale et particulière que ces lieux procuraient jadis à ceux, aujourd’hui moins jeunes, ne sont que souvenirs d’une époque que leur progéniture n’auront peut-être pas la chance de vivre. Il s’agit d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître. Le poète n’a-t-il pas raison ?

Ahmed K.

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