Passionnés par les matches disputés par la sélection nationale, lors de ces éliminatoires pour le mondial sud-africain, les Algériens ont redécouvert l’emblème national. Accrochant le drapeau à leurs balcons, le suspendant aux portières de leurs voitures, les millions de supporters de tout âge, de toutes conditions, ont démontré leur dévotion patriotique. Ils se sont réconciliés avec ce symbole des sacrifices de la Nation. Un attachement que certains ont, d’ailleurs opportunément, transformé en filon juteux. Des jeunes et des moins jeunes se sont engouffrés dans ce créneau. Dans des magasins, sur des étals improvisés, dans les artères de toutes les villes du pays, le drapeau était vendu, selon le format, entre 100 et 500 DA. Une frénésie commerciale qui se déroulait au vu et su de tout le monde, même devant les services de sécurité. Complaisants, les policiers laissaient faire même si cette pratique n’est pas autorisée. En effet, la réglementation fixe des conditions devenues draconiennes en termes d’utilisation, déploiement et confection de l’emblème national. Des peines sévères sont infligées aux contrevenants. Des ateliers spécialisés dans le textile ou autre ont même changé de vocation pour fabriquer le drapeau. Des particuliers, parfois dans des ateliers semi-clandestins, fabriquent et confectionnent l’emblème en infraction totale des dispositions réglementaires en vigueur. Il revient pourtant à l’Etat de mettre en place les conditions adéquates en matière de fabrication du drapeau. Certes, l’initiative privée est la bienvenue mais elle doit néanmoins se conformer strictement aux conditions légales. Il est de la responsabilité des pouvoirs publics d’empêcher le dévoiement du symbole national et de le protéger, car sacré. Mais il s’agit surtout pour l’Etat de le promouvoir par des actions plus efficaces que celles déjà lancées. En effet, une action, « un drapeau pour chaque foyer », avait été lancée l’année dernière sous l’égide gouvernementale. Cette action n’a pas toutefois rencontré l’écho attendu et peu d’Algériens y ont souscrit. Egalement, le ministère de l’Education nationale a imposé aux élèves de saluer l’emblème en chantant l’hymne national deux fois par jour : le matin à 8h et à la sortie des classes. Une formalité que les enfants observent uniquement par obligation alors qu’elle est pourtant censée susciter leur patriotisme. Ces deux initiatives gouvernementales ont achoppé sur le désintérêt populaire. Même lors des fêtes nationales, le 5 Juillet ou le 1er Novembre, les Algériens sont très peu nombreux à arborer l’emblème, manquant de motivations même si l’amour du pays est sacré.
Peut-être que les pouvoirs publics pourraient profiter de la ferveur née autour de ces matches pour relancer de manière intelligente leurs actions de sensibilisation. Pour que ce ne soit pas seulement le sport qui réussisse là où le politique, même porteur d’idées nobles, échoue.
Ferhat Zafane
