Un pas de géant pour l’amazighité

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Berbère télévision fête en ce mois de janvier ses dix ans d’existence. Avec un menu électrique à souhait et résolument familial, elle ne cesse depuis sa création de prendre du galon. Aux premières lueurs du troisième millénaire, un certain premier janvier 2000, Berbère Radio Télévision vient de naître à la faveur de la volonté inextinguible d’une poignée de personnes dévouées à la cause berbère dont le leitmotiv est on ne peut plus clair : donner à l’Amazighité les ailes qui lui manquent. “Il est temps de se prendre en charge”, tonnait M. Mustapha Sadi, le directeur de la chaîne naissante dans les colonnes du magazine Izuran en vogue à l’époque et dès les premières heures a su capter l’intérêt des téléspectateurs et des curieux de l’audiovisuel, d’Algérie ou d’ailleurs. Avec une tranche horaire fixée à 4 heures de diffusion par jour, BRTV, pour le commun des mortels, a réussi le défi de réunir de nouveau les membres d’une même famille devant l’écran. La maturité et l’expérience aidant, la chaîne s’est enrichie d’une grille de programmes destinés à toutes les tranches d’âge confondues et dirigés joyeusement tous azimuts, variétés, cultures, débats et dessins animés… Incontestablement porteuse d’un baume au cœur au parfum curieusement exotique, BRTV est devenue compagne chérie des femmes au foyer, en premier. “Pour une fois, j’aime regarder la télévision, jubile Nna Saâdia de Sidi Aïch. Les images ont un sens, elles me parlent. Le jour où cette chaîne de télévision est arrivée dans mon foyer, je me suis mise à lancer des youyous à gorge déployée jusqu’à me donner du mal aux cordes vocales”. Les enfants trouvent également leur compte. “Juste à la sortie de l’école, je cours voir Millou et patrache, un bol de lait à portée de main !”, confie un écolier de la même ville se sentant à l’aise devant l’écran comme un embryon entouré du liquide amniotique. A n’en pas douter, BRTV a ouvert des horizons jusque-là presque inespérés au point de devenir le trait d’union des berbérophones d’Afrique du Nord et ceux de notre diaspora en Europe (en France notamment) qui se dédicacent des chansons et s’envoient des nouvelles par micros interposés. Et bien plus, aux USA, aux confins du Canada, au Moyen-Orient et dans la lointaine Asie et régions océaniques, on n’en est pas en reste ! Cependant, depuis le premier janvier 2000 et le premier janvier 2010, de la rue du Cherche Midi (Paris VIe où se trouve le nouveau siège) à la rue du Marias à Montreuil (en Seine Saint-Denis où se trouve le nouveau siège), que de sueurs ont coulé des fronts et de sacrifices consentis à rendre BRTV un canal à connotation moderne ; un savant mélange de culture ancestrale et d’ouverture sur le monde qui nous entoure. Il aura fallu du temps pour que le nid BRTV devienne si fourni ; des cartes d’abonnements et décodeurs commercialisés d’abord en Hexagone et plus tard, aux quatre coins du territoire national, les berbérophones ont patienté avec fidélité et appris à se serrer la ceinture jusqu’à nos jours où les ondes sont gracieusement disponibles sur le satellite, par Internet et autres canaux d’informations pour entendre, images à l’appui, des discussions de plus en plus pertinentes dans un décorum allant du bariolé au pittoresque. Caisse de résonance des rêves de plusieurs millions de gens à travers le monde, émettant en deux langues, berbère et français, et désormais accessible toute la journée depuis 2004, ce fleuron compte deux sœurs jumelles que sont Berbère Music et Berbère jeunesse sans oublier les deux radios : Berbère Radio et Antinéa Radio, les bien nommées, sont toutes venues renforcer l’audience et la promotion du produit amazigh. S’il est difficile actuellement d’avancer un chiffre exact pour évaluer l’audimat du groupe (quelque cinq (5) millions de téléspectateurs en Afrique du Nord et jusqu’à 400 000 en France, affirment certaines sources), il est indéniablement acquis que ce bébé de dix ans est bien portant, le souffle intact et dont les espoirs sont grands comme ça. Avec un florilège d’émissions quotidiennes et hebdomadaires, quatre journaux télévisés par jour et en deux langues, des séries ramadhanesques, des sketches, des jeux de divertissement, des reportages et autres documentaires, cours d’apprentissage de tamazight aux feuilletons et longs métrages, on peut affirmer sans prendre le risque de se tromper, que BRTV a pris du galon avant l’heure. Indéniablement, ce canal est arrivé au moment opportun, ce qui est un tournant décisif dans l’histoire de notre pays qui somme à la léthargie, les espaces d’expression culturels et citoyens. Et à l’heure où les normes de la mondialisation battent leur plein, avançant comme des criquets sur les oasis, cette chaîne prône la défense des acquis ancestraux pour faire face mordicus au tsunami qui ravage des cultures normalement protégées. En dix ans de diffusion, des liens affectifs se sont crées entre l’incontournable chaîne de télévision et ses téléspectateurs allant crescendo d’année en année. Chouette, lorsque BRTV monde, ça enchante !

Tarik Djerroud

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