Epreuves marquantes

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1re partie

«Amachahou rebbi ats iselhou Ats ighzif anechth ousarou» (Ecoutez, que je vous conte une histoire, Dieu fasse qu’elle soit belle, longue et se déroule comme un long fil).

On dit que les voyages forment la jeunesse, on pourrait rajouter les épreuves aussi, si on prend comme référence ce conte du terroir.Dans une contrée lointaine vivait jadis un couple, qui avait mis au monde un enfant attendu depuis très longtemps.Gâté à l’extrême, il ne faisait qu’à sa tête. D’une cruauté et d’une méchanceté sans bornes, il tuait les oisillons dans leur nids, aveuglait les abeilles, insultait les vieilles personnes, et cognait avec un bâton, sur les garnements de son âge. Loin de s’assagir en prenant de l’âge, il devient insupportable pour son père, que les gens ne cessent de vilipender à longueur de journées, en public ou en aparté.Désespéré, le pauvre père ne sait que faire. Ce fils, au lieu de le seconder dans les tâches champêtres, accroit ses difficultés. N’y tenant plus, un soir il s’éloigne de sa demeure et se met à pleurer pour se soulager.Une vieille femme très sage qui passait par-là, le trouvant dans cet état lui dit : “-Achou Ik youghen ay argaz laâli,Tharit’eth iy met’t’i ?(Que t’arrive-t-il homme de bonne famille, pour pleurer ainsi.“-D’lemh’ayen a khaltiYarouyi memmi !”(j’éprouve d’énormes difficultés avec mon fils, je ne sais plus à quel saint me vouer, je suis au bord de la folie !)-Allons mon ami, ressaisis-toi, il y a des solutions à tout ! -Si tu me m’en trouves une, je te serais reconnaissant à vie !Si tu m’en donne la permission, je vais m’en occuper. Il est trop gâté, il faut le secouer comme un figuier.Ma permission t’est accordée, fais de lui ce qui te plaît, pourvu qu’il change d’attitude à mon égard et envers autrui !”Le lendemain matin, dès qu’elle le voit sortir de chez lui, à la recherche d’une victime, à houspiller, elle passe à ses côtés. Comme prévu, il ne tarde pas à la provoquer. Au lieu de s’enfuir, comme le font d’habitude les femmes et enfants. Elle l’attaque de front, en lui disant : “-La thetszou khoudh bla lamaânaK’etch our thezmiredh i ouiraLoukan : thoughidh loundja as inigh d’argaz d’gha !(Tu te vantes inutilement, pour moi tu n’es qu’un incapable si tu étais l’époux de Loundja je dirais que tu es un homme, mais je vois que ce n’est pas le cas !”Pour la première fois de sa vie à dix-hui ans, le jeune homme se sent offensé et humilié, par cette vieille toute ratinée. D’habitude, en pareil cas, il cogne avec n’importe quoi. Mais intéressé par les paroles de la vieille, il ravale son orgueil exacerbé et lui dit : “-Antats loundja agiDi Laânay-m a khalti(Qui est cette Loundja, je t’en prie !)”Loundja est la plus belle fille du pays, c’est une princesse dont le père a des brebis. Il a éconduit des centaines de prétendants. Si tu arrives à l’épouser et à la ramener un jour ici, tu ne sera plus craint, mais considéré. Si tu es un homme vas-y !”Touché dan son amour-propre et sa dignité, le jeune homme rentre chez lui et déclare à son père ravi : “-A partir d’aujourd’hui, je vais m’exiler à des lieues d’ici. C’est une bonne initiative mon petit, ça va te changer les idées, vas y !”Le jeune homme demande à sa mère de lui préparer un viatique (Aâouin) afin d’entame le long voyage. Passant par monts et par vaux, fatigué il s’assoit près d’une fourmilière. Bientôt il est assailli par des milliers de fourmis affamées, qui le supplient de leur donner à manger. Pris de compassion, il leur procure de l’orge, pour survivre jusqu’à l’été. Pour le récompensez de sa générosité, les fourmis lui donnent une patte d’une d’elle trépassée, et lui disent :“-Si un jour tu as besoin de nous, jette cette patte au feu, et nous serons à tes côtés pour t’aider. Le jeune homme les regarde de haut et hausse les épaules. Il se dit à lui-même, que ces fourmis sont folles, rien ne pourra lui arriver, mais il garde tout de même la patte sur lui.Continuant son chemin, il traverse une forêt, et tombe sur un sanglier et ses marcassins affamés. Les voyant il lui dit : -Mes petits et moi ont faim, peux-tu nous aider ?”Pris de compassion, il leur procure des fèves pour survivre. Pour le récompenser de sa générosité, le sanglier lui remet une touffe de pois et lui dit : Si un jour tu as besoin de nous, jette ces poils au feu et nous serons, mes petits et moi, à tes côtés pour t’aider.Le jeune homme éclate de rire et se dit à lui-même, que ce sanglier est fou, jamais il n’aura besoin de ses services, cependant il fourra dans la capuche de son burnous la touffe de poils, à côté de la patte de fourmi, et prend congé de lui.

Lounès Benrejdal

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