Affaire des non-jeûneurs de Aïn El Hammam et Ighzer Amokrane / Ould Kablia interpellé à l’APN

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La question de la liberté de culte et de conscience a réinvesti le débat public à l’occasion d’une série d’arrestations opérées par la police sur des citoyens accusés d’attenter à l’Islam par le non-respect des règles de son jeûne sacré. Après avoir été placé sous mandat de dépôt, un citoyen accusé de tenir un restaurant clandestin à Ighzer-Amokrane est remis en liberté par le Tribunal d’Akbou.

“Sommes nous en République, qui est censée consacrer la citoyenneté ou aurions-nous glissé sans le savoir dans un régime théocratique ?”.

Après avoir alimenté les débats sur les réseaux sociaux et les colonnes de la presse nationale, l’affaire des non- jeûneurs arrive enfin à l’APN, instance suprême de représentation populaire engoncée dans un implacable autisme sur nombre de questions agitant la société.

Le député Tarik Mira (Bejaia, ex-RCD) a déposé jeudi, sur le bureau de l’Assemblée populaire nationale une question orale à l’adresse du ministre de l’Intérieur et des collectivités locales, Daho Ould Kablia, relative à l’interpellation de “déjeuneurs” à Aïn El Hammam, Ighzer-Amokrane (Ouzellaguen) et à Tébessa.

Il demande des explications sur les bases sur lesquelles, la police a arrêté des citoyens au motif de non observation du Ramadhan.

« L’article 144 bis-2 du Code pénal par ailleurs si vague et si extensible, sur lequel, la police semble avoir assis son action est-il supérieur à l’article 36 de la Constitution algérienne qui garantit l’inviolabilité de la liberté de conscience (Article 36 : La liberté de conscience et la liberté d’opinion sont inviolables) « , s’interroge le député.

Il rappelle également que l’Algérie a ratifié des pactes internationaux et que le droit algérien consacre la suprématie de ces pactes sur la Constitution et de celle-ci sur les lois et les règlementations.

Tarik Mira souligne ainsi que le Pacte international civil et politique, ratifié en 1989 par l’Algérie, dispose que  » toute personne a droit de pensée, de conscience et de religion, ce droit implique la liberté d’avoir ou d’adopter une religion ou une conviction de son choix « .

La question de la liberté de culte et de conscience a réinvesti le débat public à l’occasion d’une série d’arrestations opérées par la police sur des citoyens accusés d’attenter à l’Islam par le non-respect des règles de son jeûne sacré.

Après avoir été placé sous mandat de dépôt, un citoyen accusé de tenir un restaurant clandestin à Ighzer-Amokrane est remis en liberté par le Tribunal d’Akbou. Lui et sa  » clientèle  » sont cités à comparaître devant le même tribunal le 8 novembre prochain, pour officiellement, re-convoquer des témoins absents à l’audience du 06 septembre.

Le Tribunal de Aïn El Hammam avait auparavant ajourné au 21 septembre courant, un procès similaire face à une grande pression populaire. Deux travailleurs ont été cueillis par la police alors qu’ils déjeunaient tranquillement à l’intérieur d’un chantier mitoyen au commissariat.

Dans des interviews au journal en ligne DNA, ils proclameront leur foi chrétienne et conséquemment leur indifférence aux rites musulmans.

Le prévenu d’Ighzer-Amokrane, et par la voix de son avocat, affirme, pour sa part, ne pas pratiquer le Ramadhan  » par conviction  » (La Dépêche de Kabylie du 06 septembre).

Des déclarations assumées qui extraient les procès à la sphère du simple droit commun pour les inscrire dans des optiques intensément politiques.

La Justice a ainsi affaire, non pas, à des citoyens honteux et repentants mais à des prévenus d’opinion dont les procès ne manqueront pas de soulever la sulfureuse question de la place des catégories citoyennes non musulmane dans la société. En plus de la mobilisation des franges démocratiques, c’est vraisemblablement cette optique politique que redoutent les magistrats, qui à Aïn El Hammam comme à Akbou, ont ordonné des reports sur de longs délais, des délais inusuels en matière de simple droit commun.

M. Bessa

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