1re partie
«Amachahou rebbi ats iselhou Ats ighzif anechth ousarou» (Ecoutez, que je vous conte une histoire, Dieu fasse qu’elle soit belle, longue et se déroule comme un long fil). Pour vous en convaincre, lisez ce conte du terroir. En mourant, un vieillard laisse comme héritiers deux garçons. Les aléas de la vie ont fait que l’aîné est devenu très riche et le cadet très pauvre. Ils sont mariés tous les deux, le premier n’a que des garçons et le second que des filles. Ils habitent l’un près de l’autre mais ne s’entraident pas. Ils appliquent à la lettre le dicton qui dit : “Chacun pour soi, Dieu pour tous”.Alors que le frère aîné vit dans l’opulence en exploitant ses terres, le cadet vit dans la misère et ne survit qu’en devenant bûcheron. Un jour, en se rendant comme à l’accoutumée dans la forêt pour ramener des fagots de bois, il surprend une colonie de sept ogres se dirigeant vers la rivière qui coule au-dessus de l’endroit où il est. Curieux, il les suit. Ces derniers, en arrivant devant un très gros rocher, il entend quelqu’un parmi eux, dire à haute voix :- “Rocher, ouvre-toi !”Comme par enchantement, le rocher s’ouvre en deux et laisse apparaître une grotte jonchée de pièces d’or, qui scintillent au soleil matinal.Après avoir déposé les marchandises qu’ils avaient sur leur dos, il ressortent pour en aller chercher d’autres. Le dernier des ogres ordonne au rocher de se refermer en lui disant : – “Rocher, ferme-toi !”Il pivote sur lui-même, et l’entrée devient invisible.Dès que les ogres se sont éloignés le cadet qui avait entendu le mot de passe dit au rocher : – “Rocher, ouvre-toi !” Et il s’ouvre.En entrant prudemment à l’intérieur, il découvre sept énormes plats de couscous garnis de viande et un énorme tas de pièces d’or. Malgré qu’il avait très faim, de crainte de se faire surprendre et dévorer, il n’y touche pas. En toute hâte, il enlève son burnous et met dedans des centaines de pièces d’or, qu’il soupèse à chaque fois afin de s’assurer qu’il peut les porter et courir pour ne pas être rattrapé. Son ballot terminé, il ressort et dit au rocher : – “Ferme-toi, rocher !”Et il se referme.Arrivé chez lui sain et sauf, il verse les pièces ramenées dans “ThivarketsI” (espèce de fosse se trouvant à l’intérieur des maisons et servant à triturer les olives) puis demande à sa fille de lui ramener de chez son père le “amoud” (double décalitre), instrument servant à mesurer le blé, l’orge, les fèves, etc…La demande du cadet est incongrue pour l’aîné. Il réfléchit et se dit à lui-même : – “Que va-t-il mesurer ?”Intrigué, curieux, jaloux, avant de lui remettre l’objet, il prend du “Lazouq” (glue) et met un peu en-dessous du fonds (sur la partie externe).En possession de l’instrument, le cadet s’enferme et se met laborieusement à mesurer les pièces d’or comme s’il s’agissait de céréales. Après avoir terminé, il remet le “amoud” à son frère aîné. Ce dernier l’examine pour en découvrir, ce qui a été mesuré. Son stratagème a réussi, une pièce d’or s’est collée à la glue. En la voyant, l’aîné est furieux. Sans retenue, il s’arme d’une hache et va voir le cadet et lui dit :- “Avec le double décalitre, on mesure du blé, et voilà que toi, tu mesures des pièces d’or, d’où les as-tu ramenées ? Dis-le moi vite, sinon, je vais t’étriper !”Sachant que son frère est capable de le tuer, le cadet lui dit :- “Bien que tu n’as jamais voulu m’aider, je n’agirai pas comme toi. Je vais t’indiquer l’endroit où j’ai trouvé des pièces d’or en quantité, mais méfies-toi, elles appartiennent aux ogres qui vivent dans la forêt.”Après avoir obtenu les renseignements qu’il voulait, l’aîné se montre arrogant envers son frère cadet qu’il humilie, quand celui-ci le met en garde et lui prodigue des conseils avisés.
(A suivre)Benrejdal Lounès