Au cours de la semaine passée, des ateliers d’évaluation du projet d’emploi rural 2 ont été organisés à Alger par la direction générale des forêts conjointement avec le bureau national des études de développement rural (BNEDER). Cette évaluation intervient cinq ans après le lancement des premières actions sur le terrain.
L’étude d’évaluation confiée au BNEDER a tenu à mettre en exergue les impacts économiques, sociaux et environnementaux du projet en question.
L’on sait que la vraie perception des impacts du projet est censée être capitalisée d’ici quelques années, c’est-à-dire lorsque les investissements réalisés au profit des bénéficiaires porteurs de projet commencent à produire leurs effets sur le plan du rehaussement des revenus et du niveau de vie. Néanmoins, d’emblée, ce projet, cofinancé à l’origine par le gouvernement algérien (20 %) et la Banque mondiale (80 %), a largement contribué au retour dans leurs foyers des populations victimes de l’exode pendant la décennie du terrorisme.
Le projet d’emploi rural a pu atteindre ses objectifs grâce aux méthodes de gestion rigoureuse de tous les segments du projet et grâce aussi à la démarche innovante sur le plan de l’intervention des agents de développement en milieu rural. Cette démarche, dite participative, réserve une place de choix aux populations dans la prise en charge de leur destin. Les communautés rurales ont été largement associées à la conception du projet, à la programmation des différentes actions et aux travaux physiques réalisés sur le terrain.
Le projet d’emploi rural touche six wilayas de l’Algérie du nord-centre et du nord-ouest: Chlef, Aïn Defla, Tiaret, Tissemsilt, Médéa et Bouira, et cible essentiellement les zones de montagne et le flanc nord de la steppe qui reviennent à ces wilayas.
C’est en 2002 que les études préliminaires ont été initiées. Il s’agit principalement des approches modernes du monde rural mises en place par les dernières analyses sociologiques basées sur la méthode participative.
Des enquêtes-ménages et des focus-groups (discussions dirigées avec les populations) étaient menées sur le terrain par des agents forestiers encadrés par des sociologues et démographes. Le but étant de faire un check-up détaillé des conditions de vie des campagnards et, surtout, de connaître leurs besoins et les grandes tendances qu’ils manifestent à l’égard du travail et des activités rurales. Sur la base du diagnostic socio-participatif, ont été élaborés les ‘’arbres de problèmes’’ (hiérarchisations des contraintes illustré par un arbre généalogique) et les “arbres de solutions’’ (clefs proposées par les paysans pour résoudre leurs problèmes, aidés en cela par les orientations techniques des équipes pluridisciplinaires présentes avec eux). Une fois traités par un bureau d’études, ces résultats sont transformés en programmes d’actions.
Pour la première fois en Algérie, une méthode scientifique et décentralisée est mise en œuvre dans la conduite de l’approche du mode rural.
Evaluation du projet : une démarche moderne
Le marché d’évaluation a été confié au BNEDER par la direction générale des forêts.
Ce bureau d’études de statut public vient d’être réhabilité par le ministère de l’Agriculture et du Développement rural après une relative éclipse due à la difficile conjoncture économique de la fin des années quatre-vingt-dix du siècle dernier. En effet, lors du Conseil des ministres tenu au début du mois de décembre 2010, le ministre de l’Agriculture a présenté un projet de contractualisation de gré à gré avec ce bureau d’études afin de lui confier l’ensemble des études relatives au programme de Renouveau rural.
Outre les tableaux chiffrés et les statistiques rationnelles retraçant les performances du projet d’emploi rural (réalisations physiques, emplois crées), l’évaluation a aussi utilisé les moyens audiovisuels. En effet, le BNEDER a sous-traité une partie du dossier d’évaluation avec le réalisateur Abdallah Tikouk, connu pour ses reportages filmés dans le domaine de l’environnement et de l’agriculture. Le réalisateur a filmé les nouveaux paysages crées par le projet d’emploi rural (arboriculture fruitière, gabions de corrections torrentielles, ruchers, basses-cours de poule pondeuse, reboisements,…), comme il a aussi réalisés des interviews avec les principaux acteurs sur le terrain (agents forestiers, cadres, P/APC, bénéficiaires porteurs de projets,…).
La méthode du reportage filmé est une première dans l’évaluation des projets de développement rural. Elle permet de rendre compte de l’ensemble des segments du projet depuis la conception et la contractualisation jusqu’à la mise en œuvre sur le terrain. Le film renforce les rapports écrits et apporte une touche de vivacité fort originale.
Le reportage a été diffusé la semaine passée au cours des ateliers d’évaluation devant les représentants des six wilayas du Projet (administration, entreprises, bénéficiaires, élus, société civile) et des acteurs du monde universitaire et des centres de recherche.
Bouira : un projet et des résultats encourageants
Le projet d’emploi rural touche la wilaya de Bouira dans sa partie sud, soit onze communes relevant des daïras de Sour El Ghozlane, Bordj Okhriss et Bir Ghebalou) touchant 11 communes. Les travaux ont démarré en janvier 2006 et sont actuellement achevés. Cependant, sur les reliquats d’autorisation de programme, la direction générale des forêts compte financer de nouvelles actions, et la procédure est en cours.
Actuellement, le projet fait l’objet d’une étude effectuée par un étudiant de Béjaïa dans le cadre de la préparation de son master à l’Institut agronomique méditerranéen de Montpellier. Le thème choisi est lui aussi en rapport avec l’évaluation des impacts du projet. Dans ce cadre, des enquêtes-ménages sont réalisés avec les porteurs de projet.
Les principales action réalisées sont : reboisements ( 500 ha ), travaux sylvicoles ( 1 150 ha ), fixations biologiques des berges ( 231 ha ), corrections torrentielles ( 70 000 M3, plantations fruitières ( 2178 ha ), viticulture ( 12 ha ), plantation de brise-vent ( 300 km ), amélioration foncière ( 1 700 ha ), aménagement de points d’eau (46 unités), aménagement de pistes ( 80 km ), distribution de ruches (7 200 unités), distribution de poule pondeuses (15 000 poulettes démarrées) et artisanat (distribution de 300 machines à coudre pour les femmes au foyer nécessiteuses).
Les travaux réalisés et les fournitures distribuées ont profité à quelque 14 000 bénéficiaires et ont généré 250 543 journées de travail.
La saison oléicole qui a commencé il y a quelques semaines a, pour la première fois dans cette région présteppique de la wilaya de Bouira, été inaugurée avec un faste particulier. Les plants d’olivier âgés de 4 à 5 ans donnent leurs premiers fruits. Le problème qui commence à être entrevu par les exploitants c’est celui du pressage ; pour trouver une huilerie, ils sont tenus de se déplacer dans la région nord de la wilaya et se faire inscrire sur la liste d’attente.
Amar Naït Messaoud

