L’hiver a belle et bien dressé son camp en lieu et place de l’automne et du coup, sans crier gare, il annonce les couleurs d’une saison très rude avec à la clef, neige, pluies, vents glacials et un froid de canard à faire givrer la lave d’un volcan. En effet, depuis quelques jours maintenant, le quotidien des habitants de la vallée de la Soummam, mais surtout des localités situées sur ses hauteurs, à l’image d’Akfadou, Ikedjane, Ifri ou encore Ichelladen, est fait de tempêtes de neige, pluies à interruption régulière, mais aussi de violentes rafales de vents qui rendent l’atmosphère intenable, vu que le mercure flirte désormais avec le 0° C et parfois moins, dans certaines localités. Les habitants de ces régions de la haute montagne savent pertinemment que l’hiver ne leur a jamais fait de cadeaux, au contraire, il leur cause toujours beaucoup d’ennuis. La plupart se sont déjà préparés pour ce duel entre l’homme et la nature, duel où les Kabyles, depuis la nuit des temps, en sont toujours sortis vainqueurs, malgré les moyens parfois très rudimentaires de ces villageois forgés par les épreuves et défis à répétition. Stocker des vivres, du bois de chauffe et remplir toutes les bonbonnes de gaz butane, tels sont les gestes qui sauvent, que tout un chacun doit connaître ou, à défaut, apprendre. Les vêtements légers aux couleurs chatoyantes ont cédé la place aux gros manteaux, châles, pulls et bonnets. Les bottes remplacent en ces circonstances les baskets et autres mocassins, et le burnous de laine blanche garde toujours sa place et sa popularité intactes. Poêle à mazout, chauffage électrique, chauffage au gaz butane et cheminée, tous les moyens sont bons et tous sont mis à contribution pour vaincre le froid. Malgré ces conditions de l’extrême, les habitants, les jeunes notamment, vaquent à leurs occupations quotidiennes et l’après-midi, Tajmaât ne désemplit jamais car les inconditionnels tiennent toujours à leurs papotages habituels entre amis. En fin de journée et le soir, c’est au tour des cafés et des magasins d’accueillir ces clients de dernière chance. Là aussi, les portes sont toujours fermées pour éviter que le froid, qui n’est jamais le bienvenu, ne se faufile entre les jointures. Dans tous les cas de figures, sous le mistral, le sirocco, le foehn ou le blizzard, la Kabylie reste belle comme l’étoile qui avance, entourée des autres étoiles, au plein cœur de la nuit, comme l’Étoile du soir, la plus belle au milieu du firmament. Une beauté dont nous nous enivrons, pour toucher le zénith de l’extase, et dont nos poètes s’inspirent pour produire les plus beaux poèmes.
Arezki Toufouti
