Il y a quarante et un an de cela, disparaissait tragiquement l’illustre écrivain Mouloud Féraoun, assassiné à Ben Aknoun par la sinistre organisation terroriste de l’OAS, en compagnie de ses cinq collègues, tous inspecteurs de l’éducation et des centres sociaux, en l’occurrence Ali Hamoutène, Salah Ould-Aoudia, Max Marchand, Robert Eymard et Marcel Basset.
En cette occasion, la maison de la culture mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou a organisé un important colloque pour revisiter l’œuvre et le parcours du défunt. Le coup d’envoi de ce colloque qui s’étalera sur deux jours, sur l’œuvre et la vie de l’auteur du fils du pauvre, sera donné demain à la maison de la culture. Il sera rehaussé par la présence de grandes figures de la littérature algérienne. En plus des conférences, il est prévu une exposition sur la vie et l’œuvre de l’auteur. Le moment se veut comme un véritable hommage à l’illustre écrivain Mouloud Feraoun, Cet événement qui coïncide avec l’anniversaire de sa mort est donc une initiative à saluer car l’écrivain de Tizi Hibel a beaucoup donné à la culture
algérienne.
Nassima Chebbah
Biographie
Mouloud Feraoun venait tout juste de fêter ses 47 ans quand il fut assassiné. Né à Tizi Hibel en Kabylie le 8 mars 1913, ce n’est qu’à l’âge de 7 ans qu’il fut scolarisé. Doué qu’il était mais «fils de pauvre», il obtint 8 ans après une bourse, pour continuer sa scolarité à l’Ecole Primaire Supérieure de Tizi-Ouzou. Il y passa 4 ans avant d’arracher en 1932, une place méritoire à l’École Normale de Bouzaréah (hauteurs d’Alger). Il figurait parmi les 20 places réservées aux indigènes, sur 318 candidats, alors que les européens en avaient 54 pour 64 candidats. C’est là qu’il rencontra Emmanuel Roblès avec lequel il s’est lié d’amitié. A l’issue de ses 3 ans à Bouzaréah, il retourna dans son village pour y enseigner, aider les siens à accéder à l’instruction. Ses qualités lui firent vite grimper les échelons. Il fut d’abord nommé en 1932, directeur des cours élémentaires de Fort National (Haute Kabylie). Mais en 1957 en pleine guerre d’Algérie, il quitta sa Kabylie pour Alger. Il fut nommé directeur de l’école Nador de Clos Salembier (hauteurs d’Alger). En 1960, il fut nommé en même temps que plusieurs de ses amis, inspecteur des centres sociaux, nouvellement crées à Ben Aknoun, sur les hauteurs de la capitale. Le 15 mars 1962, quatre jours avant les accords d’Evian, un commando de l’OAS surgit, il est fusillé avec cinq de ses compagnons: Ali Hamoutène, Max Marchand, Robert Eymard, Salah Ould Aoudia et Marcel Basset. Ali son fils écrivait à Roblès: «J’ai vu mon père à la morgue quelques heures après sa mort. On lui avait logé 12 balles dans le corps… La salle était pleine ce jour, au moins une centaine de cadavres. Mon père gisait au milieu sur une table». Jack Lang disait à propos de ces crimes, à l’occasion d’un hommage, «Cet hommage est pour l’Education Nationale… Il faut rappeler que des figures du domaine de l’enseignement n’ont jamais cessé de travailler au rapprochement des peuples français et algériens…» L’œuvre de Feraoun est grandiose pour quelqu’un de son époque. Il a commencé à écrire disait-il, à la lumière d’une lampe à pétrole. Il travaillait le jour pour nourrir sa famille, et écrivait la nuit. Il ne s’est pas contenté de mener une carrière dans l’enseignement. Il tenait à raconter au monde entier, la vie dans cette contrée de Kabylie durant la colonisation. Il s’est investi dans l’enseignement puis l’écriture et enfin les centres sociaux. Le but de ces centres était d’abord de venir en aide aux plus démunis, les laissés pour compte. Par la même, créer un dialogue entre les deux communautés. Feraoun a été sans conteste, le premier à porter la littérature nord africaine sur la scène internationale. Il est l’aîné de tous les écrivains maghrébins d’expression française. Il nous a laissé pleins d’écrits: littéraires, autobiographiques, pédagogiques, journal, articles et
nouvelles.

