La commission des retraits ne chôme pas !

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Depuis le 01 mars 2005, date de la mise en place des nouvelles dispositions de la loi 04-16 relatives à l’organisation de la sécurité routière, les actions visant à retirer le permis de conduire aux chauffards mettant la vie des automobilistes en danger se sont accentuées, voir même carrément radicalisées.

Un constat que l’on peut faire chaque lundi, dés les premières heures de la matinée devant le siège de la cité administrative de la wilaya de Bouira. Plus d’une centaine de personnes venues des quatre coins du pays attendent la fameuse commission de wilaya chargée de rendre, ou de confisquer le permis de conduire. Hier matin, lors de notre déplacement sur les lieux, une foule compacte attendait le moment où chaque citoyen attendait son tour. Tous attendaient impatiemment le moment de passer devant la commission ‘’ des permis ‘’. Des noms sont appelés chaque dix minutes. Un laps de temps nécessaire pour les fonctionnaires de la Sûreté de la gendarmerie, de la direction des transports, des travaux publics, de la DMI, d’un examinateur et d’un représentant des auto-écoles, composant cette commission de wilaya de se rendre compte de la gravité de l’infraction commise. Parmi les personnes qui attendent dans la salle, un citoyen d’El Tarf qui devait comparaître pour avoir répondu au téléphone alors qu’il était au volant. ‘’ Je n’avais pas vu les motards qui me suivaient et qui m’ont fait signe de m’arrêter alors que j’avais encore le téléphone collé à l’oreille……j’aurais du faire attention. ‘’ A comprendre, bien sûr, que cet homme, surpris en flagrant délit d’infraction, ne reconnaît pas avoir transgressé la loi. D’après ses propos, il ne tiendra pas compte du fait que téléphoner au volant est un acte répréhensible et dangereux, mais qu’avant de répondre sur son portable il prendra soin de vérifier qu’aucun motard ne le suit. Une autre conductrice venue d’Alger était aussi présente hier, pour comparaître devant la commission de wilaya. Elle se rendait à Béjaia lorsqu’au niveau du tunnel d’Ain Chriki, elle a ignoré le panneau de limitation de vitesse 60 km/h. Flashée par un radar, son permis lui a été confisqué par un barrage routier de la Gendarmerie nationale. Un automobiliste de Bouira quant à lui devait se justifier de l’absence du port de la ceinture de sécurité. ‘’ Un oubli ‘’ dira-t-il, que les motards lui ont rappelé en lui retirant le permis de conduire.

Ces trois cas de figure illustrent à eux seuls, la présence de cette centaine de personnes, qui chaque semaine, attend toute une journée durant pour récupérer leurs permis de conduire ou pour se faire une raison quant à la confiscation du petit document rose. Les infractions les plus récurrentes sont celles concernant le non respect du code de la route, notamment les excès de vitesse, le téléphone portable au volant, et la conduite en état d’ivresse. Des manquements graves qui sont souvent à l’origine d’accidents de circulation pouvant entraîner le deuil de plusieurs familles comme le prouve le dernier bilan de la police durant l’exercice de l’année 2010. Les seuls chiffres disponibles pour le 1er semestre 2011 nous ont été gentiment communiqués par la Sûreté de wilaya. Il faut préciser que le chef du bureau des retraits de permis refusera de nous communiquer des chiffres par téléphone.

Comme si ses précieuses statistiques n’étaient pas destinées à être rendues publiques. Depuis janvier dernier, jusqu’au mois de juin, les éléments de la Sûreté de wilaya ont dénombré 685 retraits de permis. Les infractions au code de la route s’élèvent quant à elles, à 151. Les mêmes services ont comptabilisé également 29 véhicules acheminés vers la fourrière. Durant ce premier semestre 6.081 PV ont été dressés. En l’absence de chiffres officiels de la Gendarmerie nationale, il est fort à parier que ces statistiques des retraits de permis sont bien en deçà de la réalité et qu’ils peuvent même être multipliés par deux. Un fonctionnaire de la cité administrative, sous couvert de l’anonymat, nous dira qu’une moyenne de 200 dossiers sont étudiés chaque semaine par la commission de wilaya. ‘’ C’est un chiffre qui varie entre 150, 160, 180 voire 200 dossiers que les membres de la commission de wilaya doivent étudier chaque lundi.’’

Evidemment, les dossiers sont étudiés au cas par cas et inutile de préciser que le côté social des contrevenants n’est pas pris en considération même si les ‘’ arguments ‘’ ne manquent pas. Le cas d’un routier, quadragénaire et père de famille originaire de M’sila qui nous avouera avoir perdu son unique gagne- pain en franchissant une ligne continue. “Je n’avais pas vu la ligne jaune et il y a avait un barrage routier juste derrière le virage. Les gendarmes m’ont arrêté et m’ont retiré le permis.” Le retrait de permis est signifié aux contrevenants selon la gravité de l’infraction, un, deux, trois, six mois pour des infractions légères. La sanction est plus sévère lorsqu’il y a des dégâts corporels et lorsque la faute incombe directement au contrevenant. L’exemple du permis à points comme pratiqués chez nos voisins, tarde à voir le jour en Algérie même s’il est fin prêt dans le nouveau projet de loi. Pour rappel, l’Algérie se positionne en pôle position dans un bien macabre palmarès.

Elle est classée au 4ème rang mondial en terme de mortalité routière. Les statistiques à l’échelle nationale de la Gendarmerie rendue publique démontrent que pour la seule journée de jeudi dernier, au moins dix personnes sont décédées et 46 autres ont été blessées dans 30 accidents de la circulation routière dans plusieurs wilayas du pays.

Ces chiffres pour le moins alarmants mettent en exergue que ce phénomène est devenu l’une des premières causes de mortalité en Algérie.

Hafidh B.

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