L’écrivain algérien le plus lu

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Quarante-trois ans après sa disparition, l’écrivain kabyle, Mouloud Feraoun, reste l’auteur algérien le plus lu. Ses livres ont fait l’objet de plusieurs rééditions, vendus à des centaines de milliers d’exemplaires, ses romans sont traduits dans plusieurs langues, notamment l’anglais (aux Etats-Unis), le russe, l’arabe, l’amazighe.Son journal, bien que réédité plusieurs fois, entre autres, par les éditions Bouchène et l’ENAG (en poche), n’est actuellement disponible dans aucune librairie algérienne. Les éditions algérienne de La Terre et le sang, des “Chemins qui montent et Le fils du pauvre ne sont non plus pas disponibles. Ce sont aux éditions Le Seuil que l’on peut retrouver sur les étals à des prix accessibles 250 DA.

Le fils du pauvreC’est son premier roman. Il l’a rédigé pendant la période de vacances en 1939. Ce n’est que onze ans plus tard qu’il parviendra à le publier à compte d’auteur. Le roman, autobiographique, sera ensuite réédité par Le Seuil, en 1954, et connaîtra le succès. Les éditions Le Seuil sera amputée des 70 dernières pages, la partie sera reprise plus tard dans L’anniversaire.Dans ce roman, Feraoun raconte l’enfance difficile dans un village kabyle de la montagne. Tout en narrant la vie du petit Fouroulou, Mouloud Feraoun dépeint la vie en société en mettant en relief notamment les traditions et coutumes d’une part et la rudesse du quotidien, à une époque où, pour subvenir aux besoins de la vie, le père doit émigrer et se séparer de ses enfants. Ceci donne bien à la déchirure. En même temps, Feraoun raconte la détermination de l’enfant à s’instruire et à réussir en dépit de tous les écueils. Mouloud Feraoun, en publiant ce premier roman signe une réussite qui sera suivie par d’autres.

La terre et le sang Les chemins qui montentLe décor, c’est toujours la Kabylie. Mais les faits sont autres. Il y a des passions amoureuses mais aussi une description minutieuse de la région de l’auteur, des passages sur la vie en France, la vie dans les villages. Est évoqué également le problème de la religion puisque dans le cas de la Terre et le sang, la femme du personnage principal est une française chrétienne. Sa mère est Kabyle chrétienne. La trame traverse toute une époque de l’histoire de la région kabyle. Elle est agrémentée par une belle et impossible histoire d’amour entre Amer et Chabha. Dans Les chemins qui montent, le récit se prolonge.Il est question d’un amour entre, le fils d’Amer (celui de La terre et le sang avec Dahbia. Là aussi, la passion est impossible, car au moment où Amer décide d’épouser Dahbia, il découvre qu’elle n’est pas vierge. Amer se demandera, avant de se donner la mort : « Dieu m’est témoin que j’étais sincère, prêt à lui donner mon affection, ma vie, j’étais heureux, que mille projets se formaient dans ma tête, que tout m’apparaissait limpide, que je découvrais tout d’un coup pourquoi j’étais là à Ighil N’Ezmane, pourquoi j’étais seul pourquoi j’avais vingt-cinq ans, pourquoi j’étais beau et fort et tendre. Tout cela, c’était pour Dahbia ».

JournalLe journal de Mouloud Feraoun est le regard percutant de l’auteur sur la guerre d’Algérie vécue de l’intérieur du pays. Des faits concrets sont décrits et décrit avec précision par Feraoun. Des embuscades, assassinats, attaques, dont Mouloud Feraoun rend compte en usant d’un style littéraire. Le livre, riche de plus de 350 pages est également friand en évènements. Mais au-delà des faits, ce qui attire l’attention dans cet ouvrage de la maturité, ce sont les prises de position de l’auteur. Il livre ses opinions avec distantration et rejetait la violence d’où qu’elle vienne. Mouloud Feraoun a été visionnaire, à travers Journal et c’est dans ce livre que l’on peut retrouver sa célèbre citation : « Vos ennemis de demain seront pire que ceux d’aujourd’hui ». Mouloud Feraoun est un écrivain connu pour son humilité. Dans l’une de ses lettres à Albert Camus, il encense de manière franche ce dernier et en même temps, lui reproche amicalement son silence par rapport à la répression que subissait le peuple algérien.

Aomar Mohellebi

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