Les précisions de Mohand Akli Benyounès

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1961. La guerre d’Algérie touchait à sa fin. Mais le couvre-feu imposé aux Algériens de France, et par extension à tous les Maghrébins, était toujours décrété. 

Les travailleurs algériens n’avaient pas le droit de sortir entre 20h30 et 5h30. Les cafés appartenant aux Maghrébins devaient être fermés à 19 heures. Pour dénoncer toutes ces restrictions, le Front de Libération Nationale (FLN) appela à manifester, pacifiquement, dans les rues de la capitale française. Le 17 octobre, près de 30 000 personnes répondirent à cet appel. Maurice Papon, alors préfet de Paris, eut carte blanche des plus hautes autorités pour stopper la marche. Une violente répression eut lieu dans la capitale des droits de l’Homme. On parle de manifestants jetés dans la Seine, d’autres tués par balle ou morts le crâne fracassé par des manches de pioche ou des crosses de fusils et d’autres abattus de rafales de mitraillettes. Si les faits sont avérés aujourd’hui, et que la France, par la voix de son Président, a fini par reconnaître que « trop longtemps cet événement a été occulté des récits historiques » , il se trouve que certaines zones d’ombre gagneraient à être éclaircies. C’est le cas par exemple de la prétendue participation active, aux manifestations, des responsables de l’époque. Sur ce point précis, Mohand Akli Benyounès, authentique acteur de la lutte de libération nationale, en sa qualité de responsable de la fédération de France, est catégorique : « C’est complètement faux ! », s’est il exclamé jeudi dernier, sur Canal Algérie qui consacrait une émission à l’anniversaire de cette sanglante répression. Ayant inlassablement mené le combat jusqu’à la proclamation de l’indépendance nationale, Mohand Akli Benyounès sait de quoi il parle. Aussi, a-t-il pris le soin de puiser dans sa mémoire, restée intacte, les détails des circonstances qui ont précédé l’historique manifestation. « Les manifestations du 17 octobre avaient été décidées la veille. Nous avions préféré ne pas y prendre part parce que l’arrestation de l’ensemble des responsables de la représentation du FLN dans l’Hexagone aurait conduit à son démantèlement», a-t-il affirmé. Plus loin, il soulignera l’insignifiance, sur le plan du nombre, de la participation des initiateurs : «Qu’est-ce que cent manifestants de plus ou de moins auraient apporté à une manifestation à laquelle ont pris part 80 000 Algériens ?», s’est interrogé l’actuel sénateur dans le tiers présidentiel. Un autre point, qui ne peut être occulté se rapporte à la déception et à la surprise des manifestants qui croyaient sincèrement que la patrie des Droits de l’homme n’allait pas verser dans la répression sanglante. A ce propos, Mohand Akli Benyounès a affirmé que les initiateurs de cette manifestation d’envergure, dont il faisait partie, ne s’attendaient pas à une répression d’une telle férocité de la part des autorités françaises : « Nous avions cru qu’étant au pays des droits de l’Homme, la police n’allait pas agir avec une telle brutalité ». Ces détails révélateurs ont été évoqués dans son livre témoignage ‘’Sept ans dans le feu du combat’’, paru aux éditions Casbah. L’auteur refuse de se considérer comme historien, mais dit avoir tout seulement désiré rapporter, fidèlement, ce qu’il avait vécu et subi.                          

Ferhat Zafane 

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