Rabah Aissat assassiné

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Rabah Aissat, président de l’Assemblée populaire de la wilaya de Tizi Ouzou a été assassiné dans un attentat terroriste, jeudi à 20 h à Ain Zaouia, à 5 kilomètres de Boghni. Le meurtre s’est produit sur la terrasse du café maure Djurdjura, situé sur la Route nationale N° 30 en face du siège de la mairie et à quelque 200 mètres du détachement de la Garde communale. Le Djurdjura, l’un des plus grands cafés du chef-lieu, était bondé de monde, comme chaque soir en ce mois de Ramadan. La victime était attablée avec trois de ses amis, avec lesquels elle avait l’habitude de jouer à des parties de dominos quand un homme surgit au milieu de la terrasse avec un klach. « Il était de grande corpulence et avait les yeux bridés, on daurait dit un Japonais et il portait un gilet qui ressemble à celui des services de sécurité », raconte un quinquagénaire rencontré sur les lieux du crime hier à dix heures. « Nous pensions que c’étaient des éléments des services de sécurité qui cherchaient quelqu’un », ajoutent un groupe de jeunes, encore sous l’effet du choc. Et d’ajouter : « Le jeune est resté un bon moment au milieu de la terrasse, il regardait dans tous les sens, visiblement en train de chercher la victime du regard ». Il s’est dirigé ensuite vers la table de Rabah Aissat. « Moi, j’étais assis sur le côté gauche de Rachid, quand j’ai levé la tête, j’ai vu un homme habillé d’une veste en daim et d’un jean. Il a répété plusieurs fois le mot hett ! (pose ! en arabe NDLR) et il a tiré plusieurs rafales en direction du défunt qui s’est écroulé sur le champ ». Le grésillement des rafales a provoqué un grand affolement chez les citoyens qui se sont mis à courir dans tous les sens. D’autres, en revanche, ont couru pour se réfugier à l’intérieur des magasins adjacents. Après avoir perpétré l’attaque, le terroriste est revenu au milieu de la terrasse et a tiré encore plusieurs rafales vers le ciel. « J’ai suivi la scène à partir de mon magasin. J’ai vu un groupe armé, habillé en civil et de gilets ressemblant à ceux des services de sécurité. J’ai pensé que c’était la police qui recherchait un suspect quand j’ai entendu les rafales », raconte un autre témoin oculaire qui, au moment de l’attentat, était à une vingtaine de mètres. La fusillade a provoqué des blessures légères à quatre autres citoyens présents sur la terrasse du café maure. L’un d’eux était encore sous le choc hier lors de notre passage.

Il a été légèrement effleuré par une balle au niveau du pouce de la main droite. « Je n’ai rien compris. Comme chaque soir, nous étions attablés pour jouer aux dominos quand subitement j’ai entendu des rafales de kalachnikov. Je me suis levé et dirigé vers l’intérieur de ce local pour me cacher », dit-il avant de nous montrer sa blessure où subsistent encore des marques de sang. Tous les magasins et les cafés ont baissé rideau juste après l’attentat et la localité a été plongée dans la consternation. Jusqu’à hier, l’abattement était encore perceptible sur tous les visages. Les éléments de l’ANP sont arrivés quelques minutes plus tard pour ratisser les lieux. Hier à midi, des dizaines de citoyens étaient sur le lieu de l’attentat, en plus des gendarmes et des éléments de la Garde communale. Les magasins contigus au café étaient fermés tandis que les autres ont ouvert dans la matinée.

La victime de l’attentat avait été transportée vers l’hôpital de Drâa El Mizan alors que les quatre blessés ont été transférés vers celui de Boghni. Ces derniers ont quitté l’établissement hospitalier dans la soirée même. Quant à Rabah Aissat, il a passé de longues heures à lutter contre la mort au niveau du bloc opératoire. Les médecins ont constaté qu’il a été grièvement touché au niveau du thorax. Jusqu’à cinq heures du matin, les chirurgiens tentaient de sauver la vie du défunt. A cinq heures, le dernier souffle est rendu.

Des centaines de citoyens affluaient hier vers le domicile familial de Rabah Aissat à Ain Zaouia, village où était exposée la dépouille mortelle. Le wali de Tizi Ouzou est arrivé à onze heures avec une escorte sécuritaire impressionnante.

Des cadres de la wilaya et des militants de partis politiques, principalement le Front des forces socialistes, auquel appartenait le défunt, avaient la mine affectée. Rares étaient les personnes qui échangeaient des paroles tant la tristesse était chargée. La dépouille était exposée dans la cour de la villa. Elle était entourée des enfants du défunt qui étaient inconsolables. Le frère de Rabah Aissat, dont la ressemblance avec ce dernier est frappante, accueillait avec dignité les visiteurs malgré l’étendue de la douleur. Rabah Aissat sera inhumé aujourd’hui à Ain Zaouia-village.

Aomar Mohellebi

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