Inoubliable Matoub

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“Déjà sept années !”, s’exclame Aldjia, une jeune étudiante, qui a pris place dans le fourgon KIA, qui prend la direction d’Ath Douala, en cette journée torride. “On dirait sept jours seulement”, enchaîne sa copine, vêtue d’une robe kabyle. Depuis le matin, l’arrêt des fourgons d’Ath Douala (situé en face du stade du 1er Novembre) grouille de monde. Durant tout le trajet, la discussion tourne autour de Matoub. Les passagers parlent de l’artiste. “C’est le meilleur chanteur kabyle de tous les temps, il chante sur les vrais problèmes des Kabyles”, lance dans la foulée un jeune de moins de 30 ans. On parle des circonstances de son assassinat, de son kidnapping, de son immortalité, mais aussi de ceux qui utilisent, à ce jour, sa mémoire à des fins politiques.“Ils vont tous payer !”, dit une vieille, assise au fond du véhicule. Une fois à Ath Douala, il faut prendre un autre fourgon qui achemine vers le village natal du Rebelle. Chaque deux minutes, un fourgon démarre. Des bus et d’autres fourgons, pleins à craquer, passent à vive allure.Des posters géants du chanteur sont collés à l’avant et à l’arrière des véhicules. On imagine d’emblée la multitude qui nous attend à Taourirt. Le fourgon est contraint à s’arrêter à des centaines de mètres du domicile de Matoub, parce que la circulation est bloquée. Des jeunes, à bord d’un camion, crient haut et fort “Assa, azeka, Matoub yella yella” et “A Lounes, mazalegh d’imazighen”. Des dizaines de véhicules tentent de se frayer un chemin sur une chaussée étroite. D’autres tentent de trouver une place pour stationner dans une ambiance de cacophonie. Le service d’ordre est complètement débordé. Des dizaines de jeunes filment la cérémonie de recueillement. D’autres prennent des photos. Des voisins de Matoub ramènent des plats de couscous avec des œufs durs.A l’intérieur de l’école primaire, située à une vingtaine de mètres de la maison Matoub, des jeunes installent la scène et le système de sonorisation en prévision du gala artistique qui devait démarrer à 14h. Des baffles géantes diffusent l’hymne national kabyle, version Matoub.Tout le monde lève la main droite, les doigts en signe de victoire. Mme Aldjia Matoub, après plusieurs appels à l’aide d’un micro, réussit à se frayer un chemin. Elle sort de la maison avec une gerbe de fleurs. Elle avance doucement vers le monument où est inhumé son cher fils et dépose les fleurs. Applaudissements. Elle tire une salve en l’honneur de son fils avant de regagner le domicile.Les centaines de citoyens continuent à atterrir à Taourirt Moussa. Dans le garage de la bâtisse, la Mercedes de Matoub, criblée de balles, constitue aussi l’objet de curiosité des visiteurs. 78 impacts de balles, rappelle une fiche collée sur le capot.A côté, des jeunes vendent des tee-shirt à l’effigie de Matoub ainsi que des exemplaires de la revue Azar.

Aomar Mohellebi

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