Equilibrisme factice ?

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Le problème soulevé, dans sa réunion d’avant-hier matin, par la Coordination des archs de la wilaya de Bouira ayant participé au dialogue avec le chef du gouvernement jette une lumière crue sur les réalités sociologiques et culturelles de ce vaste territoire de l’ancienne sous-préfecture relevant de la wilaya de Tizi Ouzou au rang de wilaya. Les archs de Bouira crient à la discrimination dans l’identification des assemblées locales ciblées par la dissolution. En effet, le décret présidentiel relatif à cette opération ne retient pour la wilaya de Bouira que la seule commune d’El Asnam. Les communes des autres wilayas (Tizi Ouzou et Bgayet) touchées par les tragiques évènements de 2002 ayant accompagné ce rendez-vous électoral sont prises en charge par le décret présidentiel.Or, il est de notoriété publique — la presse de l’époque peut être consultée à ce propos — que tout le territoire kabylophone de la wilaya de Bouira a été dramatiquement ébranlé par les événements liés au rejet des élections du 10 octobre 2002. Des incidents graves avaient accompagné les tentatives d’acheminement des urnes dans les bureaux de vote. Des chiffres de participation burlesques ont été enregistrés dans la plupart de ces communes. Par conséquent, les citoyens de ces communes et les délégués des archs se sentent légitimement floués par la teneur du décret présidentiel qui établit une distinction, dont l’explication peut prêter à des lectures directement liées à la composante culturelle et sociologique de la wilaya de Bouira. Etant une région dont la la carte linguistique est caractérisée par une césure nord/sud (kabyle/arabe), Bouira risquerait de voir son APW dissoute si toutes les APC kabylophones étaient remises en cause. Or, l’APW représente toute l’étendue de la wilaya et beaucoup de communes arabophones du sud où le vote s’est déroulé d’une façon normale ne les “concerne” pas. Lors de la réunion d’avant-hier, la coordination des archs de Bouira a attiré l’attention de l’opinion et met en garde les pouvoirs publics quant à la consécration de ce fait accompli. Mieux, elle demande la dissolution de l’APW et de l’APN en application des engagements contenus dans le protocole d’accord signé avec le chef du gouvernement. Il semble que pour des calculs d’“équilibre régional” d’un nouveau genre, le gouvernement a fait une entorse à ses propres engagements. Sur ce chapitre précis, il ne ferait que susciter des frustrations nouvelles dans une région qui s’est engagée corps et âme dans les événements ayant fait suite à l’assassinat de Guermah Massinissa et qui s’est inscrite dans la droite ligne du combat mené par le Mouvement citoyen.Le risque sera aussi que cette forme de déception des populations soit exploitée par l’autre aile des archs qui se sont opposés au dialogue. On n’hésitera certainement pas à désigner à la vindicte publique les délégués sincères, mus par l’esprit de responsabilité en leur serinant la papelarde argutie : “On vous a bien prévenus !”

Amar Naït Messaoud

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