CRISE POLITIQUE – Le panel en pleines turbulences : Le difficile consensus sur le dialogue

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Pendant que le président du panel pour le dialogue national, Karim Younes, défend son action au lendemain de l’opposition de quatre personnalités à le rejoindre, le chef d’État-major rejette, pour sa part, les préalables des uns et des autres.

Vingt-quatre heures après le niet de Hamrouche, Aït Larbi, Ben M’hidi et Ben Yeles à rejoindre le panel devant mener le dialogue national, Karim Younes sort, pour la seconde fois, de son silence pour déclarer, cette fois-ci, qu’il n’est pas l’émissaire du pouvoir, ni le pouvoir lui-même.

Dans un texte publié sur son compte Facebook, le président du panel affirme être «seulement un citoyen appelé à apporter sa contribution au règlement de la crise politique que traverse le pays».

«Je suis plus soucieux du futur de mon pays que du présent de ma propre image. C’est alors en mon âme et conscience que je me suis senti obligé… l’obligé de mes compatriotes, l’obligé de nos enfants, adultes en devenir, exclusivement», a indiqué M. Younes pour qui «l’histoire est une roue qui se déroule sans fin et nul ne peut entraver sa course ni l’empêcher d’atteindre son destin.»

Visiblement très affecté par les critiques du mouvement populaire et des personnalités nationales parmi les 23 que le panel compte intégrer dans sa démarche, Karim Younes a tenu à répliquer en précisant : «Même si je dois encore être victime de mise en accusation, je continuerai à agir de façon équitable en dépit de la manière inique dont certains opèrent car je me veux engagé dans ce processus qui vise à prendre à bras le corps la réalité telle qu’elle est».

La réaction négative, avant-hier, des quatre personnalités l’a considérablement attristé puisqu’il s’est dit «triste» que son appel à l’action «se transforme en appel à la réaction».

Ironisant sur les réactions qu’ont suscitées «ses» sept préalables posées au chef de l’État, jeudi dernier, avant l’entame du processus du dialogue, Karim Younes se pose la question s’il faut «laisser tous ses leviers de pouvoir au pouvoir que l’on veut abattre» :

«Tenter d’obtenir la libération de jeunes manifestants pour avoir porté le drapeau de ses couleurs identitaires est une tare ? De faire arrêter les violences policières sur les manifestants est une hérésie ? Faire sauter les verrous qui empêchent l’accès à la capitale les jours de marches est une faute grave ? Appeler à l’ouverture des médias aux opinions qui courent dans la société est une ineptie ? De porter la voix de millions d’Algériens pour le départ de l’actuel gouvernement, une lubie ? Que veut-on au juste ? De laisser tous ses leviers de pouvoir au pouvoir que l’on veut abattre ?», s’est-il interrogé.

Ces mêmes préalables semblent aussi être siennes à l’avocat Mokrane Aït Larbi qui a dit «non» à l’invitation du panel.

La mise au point de Gaïd Salah au sujet des préalables

Pour le chef d’État-major, Ahmed Gaïd Salah, ces préalables sont «catégoriquement rejetés», a-t-il dit dans son discours prononcé hier lors d’une cérémonie organisée en l’honneur des meilleurs lauréats des cadets de la Nation au baccalauréat et au BEM.

«Un dialogue que nous saluons et espérons qu’il sera couronné de succès et de réussite, loin de la méthode imposant des préalables allant jusqu’aux diktats. De telles méthodes et thèses sont catégoriquement rejetées», dira-t-il tout en déclarant son soutien au dialogue devant mener à l’organisation des élections présidentielles.

«Nous valorisons, au sein de l’Armée Nationale Populaire, les étapes franchies sur la voie du dialogue national, notamment après l’audience accordée par Monsieur le Chef de l’État à un groupe de personnalités nationales, qui se chargera de la conduite de ce dialogue, s’engageant à mettre à disposition les moyens nécessaires pour l’accompagner dans cette noble démarche et réunir les conditions idoines pour la tenue des présidentielles dans les plus brefs délais», insiste le général-major, Gaïd Salah. Pour lui, «il n’est plus question de perdre davantage de temps, car les élections constituent le point essentiel autour duquel doit s’axer le dialogue».

Plus loin, Gaïd Salah appose également un niet à la libération des détenus tout en prenant soin de rappeler que cette question est l’affaire de la justice :

«Il m’appartient, dans ce contexte, de mettre en exergue certaines de ces idées empoisonnées que véhicule la bande et qu’adoptent certains porte-voix qui orbitent autour d’elle, notamment l’appel à l’élargissement des détenus, qualifiés à tort comme des prisonniers d’opinion, en guise de dispositions d’apaisement selon eux. Aussi, je rappelle encore une fois que seule la justice est souveraine de la décision, conformément à la loi, concernant ces individus qui se sont pris aux symboles et aux institutions de l’État et ont porté outrage à l’emblème national. Il n’est permis à quiconque d’interférer dans son travail et ses prérogatives ou tenter d’influer sur ses décisions.»

S’agissant de la demande formulée par Karim Younes et plusieurs personnalités devant participer au panel, inhérente à l’allègement du dispositif sécuritaire entourant Alger les jours de marches, Gaïd Salah s’y oppose aussi, indiquant que ces «mesures sont prises pour l’intérêt du peuple et non le contraire».

Faisant louange à «la satisfaction de la majorité des revendications populaires», le chef d’État-major se désole de «certaines voix» qui tentent «nuire à la crédibilité et la performance des institutions de l’État, à travers des rumeurs qui visent à tromper l’opinion publique».

«Aussi, nous rappelons encore une fois que les institutions de l’État sont une ligne rouge qui n’admet ni tractation, ni préalables ou encore des diktats illégaux, de quelque partie que ce soit et continueront à accomplir leurs missions jusqu’à l’élection du nouveau président de la République qui jouira de toutes les prérogatives pour entamer les réformes nécessaires», rappelle encore Ahmed Gaïd Salah.

M. A. T.

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