Tiririt n tregwa, un rite toujours d’actualité

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Entouré de montagnes, le village Aït Ouabane n’est visible que de la route menant vers Tikjda, de la montagne séparant les wilayas de Tizi-Ouzou et de Bouira, ou… du ciel. Situé au fin fond de la commune d’Akbil, Aït Ouabane, malgré le temps qui passe, la technologie, le développement et l’évolution, a su garder les rites et traditions des aïeux.

D’ailleurs, chaque année, le dernier vendredi du mois de mai, les habitants de ce village fêtent «Tiririt n tregwa». Un rite consistant à partager équitablement l’eau servant à irriguer les vergers de chaque famille et destiné à réunir et à rassembler tous les At Waban, quelque soit le lieu où ils se trouvent. Et dès le jeudi soir, les familles commencent à arriver de partout pour qu’elles soient toutes au rendez-vous le jour J, soit le vendredi. Ainsi, très tôt dans la matinée du vendredi, quelques citoyens volontaires, armés de pelles et de pioches et guidés par des gens âgés et expérimentés, se rendent à «Oulsous», un endroit où l’eau coule à flot, et ce, pour répartir cette dernière à travers des rigoles afin que tout citoyen d’Aït Ouabane possédant un jardin, puisse avoir sa part d’eau pour l’irrigation. Si ce rite se fait durant ce jour et cette période, c’est tout simplement parce que c’est le début de l’été et des grandes chaleurs, donc l’eau va commencer à manquer, et avec cette répartition équitable, chaque jardin sera irrigué. Ainsi, grâce à leur organisation, les Aït Ouabane continuent à cheminer sur les traces de leurs ancêtres. En effet, durant cette journée de fête, on constate la fraternité la liberté et l’égalité entre les villageois. Alors, pendant que des groupes répartissent l’eau à égalité d’autres s’occupent du sacrifice de bœufs et autres moutons servant à «faire couler le sang» afin que l’eau ne manque pas. Et comme chaque année, des citoyens très aisés font don de bœufs ou de moutons, tandis que d’autres font don de toutes sortes de nourritures, allant du couscous, aux gâteaux traditionnels et autres plats. D’ailleurs, plusieurs bœufs et moutons ont été égorgés, vendredi passé pour accompagner le majestueux couscous traditionnel qui a été offert à tous les présents et convives. Et c’est au lieu-dit «Sidi Mhend Ouamrane» que la grande fête a lieu : c’est là que les bêtes sont sacrifiées, dépecées et partagées en parts égales ou «Tixxamin», selon le nombre de personnes que compte une famille. En face et sous une tente, un membre du comité de village entonnait à travers un micro des remerciements et autres bonnes paroles de présages heureux face aux villageois qui défilaient pour déposer une offrande. Vers la fin de cette journée, le comité de village a annoncé publiquement la somme d’argent donnée par les citoyens et visiteurs. Tout visiteur venu assister à Tiririt n tregwa promet de revenir l’année d’après à ce village typiquement kabyle. Par ailleurs, dans le mausolée Sidi Mhend Ou Amrane, ce sont les femmes qui font la fête, et c’est toujours là que les familles font passer leurs nouveau-nés par une petite fenêtre.

B. M.

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