L’ancien diplomate Lakhdar Brahimi a souligné, hier à Alger, la nécessité de mettre en place un dialogue «structuré», pour aller vers une deuxième République. «La revendication du changement est parfaitement légitime, compréhensible et je dirais même attendue. Mais le changement ne se fait pas tout seul», a affirmé M. Brahimi, lors de son intervention sur les ondes de la chaîne III de la radio nationale.
Tout en reconnaissant l’existence d’«un blocage», l’ancien diplomate souhaite que «ça ne soit pas une impasse». Il souligne que «le dialogue est indispensable et urgent. «Que la rue tienne à sa position, je crois que cela est compréhensible, ce qui est moins compréhensible, ce sont ceux qui se disent des leaders, des cadres et des meneurs qui suivent la rue au lieu de diriger ce mouvement», estime-t-il.
Selon M. Brahimi, la deuxième République est une «aspiration légitime» mais c’est aussi un «programme compliqué». «Le premier pas ne se fait pas dans le désordre, mais plutôt dans l’organisation», a-t-il ajouté, mettant l’accent sur la nécessité de «commencer à parler de manière structurée et organisée». «Il faut que les gens s’assoient et mettent un programme pour effectuer ce changement et arriver à la deuxième République», a-t-il insisté.
A la question de savoir si le système a compris la demande de la population, il dira : «D’après les interventions du président de la République et ce que j’ai entendu de la part des responsables que j’ai rencontrés, il me semble que le message est arrivé cinq sur cinq». «D’un côté, poursuit-il, c’est très beau et enthousiasmant de voir la population de mon pays dans la rue, mais d’un autre, ça ne peut pas continuer indéfiniment».
M. Brahimi a par ailleurs mis en garde «ceux qui se sont proposés comme porte-parole de la rue» et qui sont pour un «partez tous». «Cela est impossible», lance-t-il, illustrant ses dires par le scénario irakien «Depuis 1962, l’Algérie a connu des tournants très importants, qui n’ont jamais été négociés. Cela nous à chaque fois précipités dans le fossé», ajoute-t-il, estimant : «Cette crise est une opportunité historique pour nous mettre sur les rails».
Se défendant d’avoir été mandaté «pour vendre la feuille de route du Président», M. Brahimi croit déceler «une mauvaise volonté de la part de ceux qui lui posent, chaque fois, cette question». «Ni le Président, ni le gouvernement ne m’ont mandaté», a-t-il lancé. Et d’ajouter : «Je voulais venir voir ce qui se passe dans mon pays et dire ce que me semblait logique de par mon âge et mon expérience».
Samira Saïdj