… à Boudjima aussi

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Dans tout pays qui se respecte, le livre est chose sérieuse, vitale même. Aussi, pour son édition, sa promotion et sa distribution dans les meilleures conditions possibles, des moyens colossaux y sont mis chaque jour tout au long de l’année. Dans ces pays, le livre fait vivre directement ou indirectement des milliers de gens, à commencer par les auteurs eux-mêmes. Lire chez ces gens-là est une seconde nature. L’offre pour satisfaire tous les goûts est variée, on va du simple roman à l’eau de rose jusqu’aux textes les plus hermétiques, les plus philosophiques, les plus mystiques. C’est que dans ces pays, les maisons d’éditions jouent le jeu et agissent en acteurs cardinaux dans la conception et l’aboutissement d’une œuvre. Pour qu’un livre marche et parvienne au lecteur et, partant, fasse connaître son auteur et lui assure la notoriété il faut une promotion en amont et en aval. Il ne suffit pas, en effet, de sortir un livre pour que celui-ci, comme par miracle, soit acheté et lu. Il faut convaincre, au préalable,  le lecteur, l’appâter d’abord par la pagination du livre lui-même, sa couverture, son format ensuite par une bonne publicité. C’est pour cela qu’autour du livre gravitent des critiques, des analystes, des journalistes qui activent tous pour le même but, celui de valoriser le texte afin de le rendre accessible aux éventuels lecteurs. En ces temps modernes, tout un réseau de distribution du livre tisse sa toile sur le net pour renforcer le mode de gestion traditionnel de la distribution du livre. Des sites comme Amazon deviennent des passages obligés pour la promotion de toute œuvre. Mieux, des éditions en ligne sont proposées aux jeunes auteurs afin de les aider à mettre le pied dans l’étrier en attendant leur prise en charge par les éditions qui ont pignon sur rue. Tout cela démontre l’importance accordée au livre, ailleurs. Peut-être que c’est ce qui motive les associations Ikhoulaf, Imnar, Anza, Un livre une vie, LACD, ACABM ainsi que l’APC de Boudjima à organiser cette deuxième édition du Salon du livre au niveau de la bibliothèque communale de la commune, et surtout à concocter un programme alléchant animé par des personnalités fort connues dans le monde de la littérature, comme Amine Zaoui, Brahim Tazaghart, Hocine Haroun, Lezhari Labter, Tarik Djerroud. Peut-être c’est cela aussi qui a dicté le choix d’organiser cette deuxième édition en hommage à l’immortelle Assia Djebar. Pour A. H., poète à ses heures, la question qui se pose est comment redorer le blason du livre chez nous, comment parvenir à rendre l’acte de lire comme un prolongement naturel de nos besoins vitaux ? « Lire devrait être un reflexe. Mais pour acquérir ce reflexe, il faut un travail de fond. Revoir les programmes de langues dans nos écoles en proposant aux apprenants davantage de textes d’auteurs qui, eux seuls, pourront greffer  dans l’âme de l’enfant l’envie d’écrire, de découvrir et surtout de penser. Car comme le disait si bien Descartes : je pense, donc je suis. Les textes comme ceux de Jack London, des extraits du Petit prince ont fait naître en nous l’envie de lire et, par la suite, de vouloir créer soi-même des textes. Par ailleurs, on gagnerait à faire découvrir à la jeune génération les textes de Yacine, Mammeri, Dib, Feraoun,… car souvent, leurs écrits sont sources d’inspiration pour les jeunes talents. Mais, il ne suffit pas d’écrire. Le gros problème pour nos futurs écrivains, surtout dans la langue amazighe, c’est comment éditer ? », fera-t-il remarquer. En effet, c’est là où réside toute la problématique du livre dans notre pays. Souvent, nos écrivains sont réduits à éditer à compte d’auteur pour certains, ou à confier leurs manuscrits à des éditeurs français qui les appâtent par des contrats fallacieux, mais qui en fin de compte s’avèrent une pur arnaque, car jamais ces auteurs ne reçoivent leurs droits d’auteurs. Tel est le climat ressenti lors de notre visite à cette deuxième édition du Salon du livre de Boudjima. Initiative louable en soi, mais bien insuffisante, selon les dires de beaucoup de présents, pour booster la production du livre dans notre pays.

   

  A.S Amzigh

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