Marie à la conquête de la robe kabyle

Partager

« La robe kabyle se distingue dans son ensemble par sa confection et ses motifs à mille et une connotations identitaires tirant leurs origines d’un passé qui remonte aussi loin que les origines des populations autochtones.

Cette millénaire robe ancestrale, de par ses couleurs frétillantes et étincelantes, égaille et fait briller la femme de mille feux. Elle a su traverser les âges et continue d’inspirer un grand nombre d’artistes, de poètes ou de peintres». Il ne s’agit pas là d’un prélude d’une recherche d’un quelconque historien de «chez nous». Ce sont, en fait, les propos d’Ait Yesni Marie, une jeune française d’origines kabyles, animatrice dans un centre culturel au chef-lieu de Lyon à Rhône, en France. Son grand-père, natif d’Akbou, a émigré en France dans les années 20 du siècle passé. Depuis, aucun membre de sa famille n’a visité l’Algérie, «terre natale», aimait-elle répéter. Marie se débrouille bien en Kabyle. En visite en Algérie depuis une vingtaine de jours, elle a une seule «agenda», la Kabylie.

La robe kabyle…et Marie

Tenant un atelier «Histoires et Identités» où traditions et mœurs des communautés y occupent une place prépondérante et ayant sillonné les continents asiatique et latino-américain mais aussi une partie l’Afrique centrale, Marie est une connaisseuse des peuples et de leurs histoires. L’habillement a toujours été à travers l’Histoire plus qu’un ensemble de choses dont on est vêtu. «Se rattachant à l’environnement immédiat, l’habit de l’homme reflète une partie de l’Histoire», explique notre interlocutrice. Comme quoi tous les chemins mènent à Rome. Dans ses recherches qu’elle a entamées depuis des années, Marie s’est retrouvée, dit-elle, sur le chemin qui mène à…la robe kabyle. Chez les Kurdes en Asie comme dans d’anciennes tribus issues de la civilisation Maya en Amérique latine ou encore chez beaucoup de communautés Tsigane en Europe centrale, des similitudes et des traits communs se présentent dans les habits traditionnels. Des couleurs et des motifs symbolisant curieusement, parfois, les mêmes conceptions socioculturelles. Très jeune, notre chercheuse avait déjà découvert la robe kabyle dans le cadre de multiples festivités des associations berbères en France. Son périple même aux fin fonds du Mexique ou du Pérou l’a reconduite à «atterrir» enfin en Kabylie. «La robe kabyle, contrairement à d’autres vêtements traditionnels, m’a fait venir d’elle-même», nous dira en souriant Marie. «Les expositions qui s’organisent là-bas en France se présentaient comme du virtuel quand on a aujourd’hui la chance de toucher de près à la source de cette robe», dira-t-elle encore.

La robe d’Ath Leqsar…

La robe portée par la femme Taqesriwt est de tissu couleur noire, aux motifs divers et dont la couleur rouge est dominante. À notre grand étonnement, Marie remonte à un passé lointain pour relater l’histoire ou la légende liée aux raisons de l’utilisation du noir et du rouge dans la confection de la robe d’Ath Leqsar, unique dans son genre dans toute la Kabylie. Elle nous relatera en effet la légende de «Lala M’lawa» et du prince «Mastenbal» ou la légende faite d’amour et de passion. L’hôte de la région a visité plusieurs villages pour découvrir d’éventuelles variantes de cette robe. Elle a été grandement attirée par la Fouta. Ce tissu qui se noue autour de la taille, donnant un charme à la robe, épouse les formes de la femme, mais surtout suit et donne le mouvement, la légèreté et la sensualité de la danse propre à la Kabylie. Les rayures qui la composent allongent le corps de la femme, et les couleurs vives telles que l’orange, le jaune, le vert et le rouge, nous rappellent la diversité de la nature de la Kabylie, le goût prononcé pour la vivacité et la gaieté mais surtout un rappel des couleurs présentes sur les bijoux berbères (corail et autres pierres colorées). «La femme kabyle, dans son ensemble, reste fidèle à la robe des aïeux, elle la porte ordinairement tous les jours, dans les cérémonies et fêtes pour danser, pour être libre, pour être tagbaylit tout simplement», conclut ainsi simplement Marie. Trois modèles de la robe «Taqesriwt» lui ont été offerts. Ils seront exposés en France, dit Marie qui promet de revenir l’été prochain.

L.M.

Partager